Dieudonné demande l’asile politique à la Turquie
Comme souvent avec les dissidents français, c'est par des brèves de la presse locale que nous avons de leurs nouvelles. Ainsi, le site eurélien Radio-intensité.fr nous apprend ce 20/02/2021 que l'humoriste et polémiste Dieudonné M'Bala a été verbalisé par les gendarmes de Dreux (28) pour "entrave à la quarantaine anti-covid". Car il est de retour d'un séjour en Turquie... où il s'est rendu pour faire une demande d'asile politique (!)
La prune destinée à Dieudonné n'est qu'anecdotique par rapport à la raison de son voyage à l'étranger, qu'il décrit dans quelques entrevues à des bloggeurs du web. Voici un imperçu :
« La liberté d'expression en Turquie est protégée par la Constitution. Je pense qu’il y a un respect naturel dans votre pays. A cet égard, je ne sens plus du tout ce respect en France. C’est pourquoi j'ai choisi de demander l’asile politique à la Turquie. La Turquie est une synthèse dont les portes s’ouvrent à l’est et à l’ouest. C'est pourquoi c'est un pays chargé d'histoire, fort et respectable. J'ai l'impression qu'il y a moins de problèmes dans les rues à Istanbul qu'à Paris. Une ville avec une ambiance plus calme et plus familiale. On voit aussi des jeunes s'amuser. Je me sens plus à l'aise en Turquie qu’en France » (...)
Mille euros d'amende pour être sorti faire ses courses au lieu de rester consigné chez lui, c'est déjà un motif qui inciterait le citoyen lamba à envisager l'émigration. Des marées de contraventions et de peines de prison pour des délits d'opinion en vertu du politiquement correct à la française en sont plus sûrement, et nous comprenons la démarche de l'ex-comique préféré des français, un Coluche du XXIème siècle dont l'humour satirique n'est plus toléré en période de crise sociale aggravée.
On notera que dans l'article trouvé en parcourant le web, un autre artiste a déjà gagné la Turquie d'Erdogan depuis quatre ans. Il s'agit du pianiste Stéphane Blet, interdit d'exercice en France depuis la parution d'un bouquin sur la franc-maçonnerie rédigé par ses soins à partir de sa propre expérience. Après Alain Soral parti en Suisse (et pas seulement pour les impôts, vous l'aurez compris), on peut s'inquiéter du nombre d'intellectuels et d'artistes qui quittent un pays qui fut autrefois celui des droits de l'homme, et qui semble aujourd'hui pris en otage par des groupes communautaires, politiques et sociétaux ayant la main-mise sur l'éducation, la justice, les médias de masse et surtout la culture.
Outre une liberté d'expression qu'ils estiment plus large qu'en France, nos exilés vantent une qualité de vie, une atmosphère familiale dans les rues, l'absence de tensions. On ne brûle pas les bagnoles dans les quartiers populaires d'Istambul, la police est respectée, les valeurs morales mises en avant pour l'éducation des enfants. La Turquie a certainement ses problèmes (chômage, pauvreté etc.) mais l'ambiance serait malgré tout moins tendue sur de nombreux sujets. Stéphane Blet met aussi en avant la créativité artistique, le croisement des cultures, la plus diversité du monde culturel à l'opposé du système français où quelques uns tiennent l'essentiel. Sans doute exagère-t-il, mais il y a une incontestable part de vérité dans son point de vue.
Il suffit d'observer le conformisme de la scène culturelle française. L'absence des nouveaux Coluche, Desproges voire même Guy Bedos. Il n'y a plus d'artistes satiriques, et ceux qui se disent politisés prennent garde à suivre la direction du vent médiatique afin d'éviter poursuites pénales, harcèlement et exclusion médiatique. D'ailleurs, la réouverture des cinémas et les programmations sont édifiantes : que des fims franchouillards sans intérêts, subventionnés par le CNC, réalisés par des gens qui n'ont rien à dire à part déballer leurs états d'âmes.
Blet, ex-réalisateur de musiques de films, conclut d'ailleurs son analyse par la phrase suivante :
"On est des artistes avant tout et ils auront pu tout nous prendre, notre argent, nous menacer, et nous faire les pires choses -ce qui est arrivé, encore plus à Dieudonné que moi mais à moi aussi-, et ils auront tout eu peut-être, mais ni notre dignité ni notre potentiel artistique »."
On a l'impression d'assister à un exil digne de l'ancien régime. Soral, Blet et Dieudonné partent pour échapper à la prison, condamnés sans avoir commis d'autres crimes que d'émettre des opinions sur l'antisionisme, la franc-maçonnerie, le mondialisme, les religions et l'état général de notre société. Il y a encore quarante ans, les propos déplacés laissaient de marbre, aujourd'hui ils mènent droit aux tribunaux avec condamnations à la clé. Si la Turquie n'est pas un modèle de tolérance pour reporters sans frontières, la France classée en zone jaune a finalement peu de leçons à donner en la matière.
Nous verrons si Erdogan donnera suite à la demande certainement très documentée de Dieudonné. Pour sa part, Stéphane Blet donne des perspectives en proposant d'ouvrir un centre culturel français à Istambul, qui accueillerait les artistes dissidents. Il serait malheureux de devoir prendre l'avion pour voir un spectacle de Dieudonné, mais s'il n'y a pas d'autres solutions, pourquoi pas. La question est de savoir combien d'intellectuels ont déjà quitté la France depuis les années 1980 ? Il serait regrettable de rester seuls avec les médiocres et les guimauves du show-bizz hexagonal. A-t-on encore le droit d'être intelligent et talentueux en France sans devoir passer par les tribunaux ?
Une des sources de l'article : https://www.trt.net.tr/francais/europe/2021/04/28/interview-pourquoi-stephane-blet-et-dieudonne-quittent-ils-la-france-pour-la-turquie-1630261
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