Dieudonné ou l’outrage de Racha
L’article de la honte
Racha est une petite fille de 6 ans, handicapée, elle lutte depuis sa naissance pour sa survie. Le 4 Mai 2015, cette enfant a été la cible de Dieudonné et de sa bande qui - dans une diatribe inouïe de méchanceté, de bêtise, de haine, et de lâcheté - ont osé l'irréparable de se moquer de son infirmité en suggérant rien moins que son élimination physique. L’article de la honte a été publié à la une de Quenel+, le site de propagande de l’ex-humoriste. Ce tissus de haine dirigé contre les handicapés est la réponse à une interview bien argumentée d’un certain Laurent Louis, le père adoptif de la fillette, au sujet de sa collaboration passée sur le projet d’ananassurance de Dieudonné. On constatera qu’à l’image de la pègre et des régimes totalitaires qui pratiquent la sippenhaft, le clan Dieudonné s’attaque lui aussi à l’entourage proche de ceux qui lui déplaisent. Je ne m’étendrai pas sur le fond de ce projet d’assurance, les discordes monotones de Monsieur M’Bala M’Bala ne présentent pas d’intérêt à mes yeux, j’invite ceux qui veulent se forger leur propre opinion à visionner l’interview qui a déclenché les foudres de l’artiste.
Sous couvert d’humour noir, les insultes dirigées contre la petite fille ont été maquillé dans un dialogue entre Germain Gaiffe-Cohen et Patrice Alègre, deux criminels récupérés parmi d’autres par l’ex-humoriste pour faire le buzz, le véritable auteur de l’article ayant courageusement évité de signer sa prose. Humour dieudo, foi de corbeau. Face au dégoût de son propre camp, l’équipe a rapidement choisi d’assumer la publication en la retirant du site, sans fournir ni excuses, ni explications.
Pour Dieudonné, l’humour est une forme d’expression qui s’affranchit de toutes ses limitations, une sorte de passeport diplomatique qui autorise l’incitation à la haine, la calomnie, la diffamation, l’injure… Il est malsain de réclamer de telles libertés, mais chez Dieudonné, le désir de nuire est plus fort que la raison : ni l’éthique, ni la crainte d’une sanction pénale pourtant inévitable n’ont pesé dans sa décision de ne pas publier l’article de la honte. Pour ce récidiviste, chaque injure fait sa petite recette qui lui rapporte plus que ne lui coûte la condamnation qui s’y rapporte. Pour être dissuasives, il faudrait que les sanctions soient proportionnelles aux revenus. Pour l’heure, ses procès et ses condamnations sont autant de publicités à très bon prix (surtout quand il fait payer ses fans [1]) qui lui apportent la garantie de faire salle comble.
Sur cette capture d’écran qui témoigne du délit, l’article de la honte avait quand même été liké 1400 fois pour un total de 35200 vues. Une statistique assez terrifiante qui révèle qu’un peu plus de 4% des lecteurs sont prêts à cautionner Dieudonné pour le pire sans la moindre réserve.
Bienvenue dans la dieudosphère.
La dieudosphère et la thèse du complot sioniste
Faire partie de la dieudosphère, c’est la garantie d’être un rebelle ! C’est appartenir à un mouvement d’émancipation qui lutte et qui dénonce le complot de l’oligarchie mondialiste et son idéologie, le sionisme. Un combat qui séduit un public jeune et maniable en manque de repère politique dans une France qui va mal [2]. Pour financer la dissidence, il faut des sous. Sur la boutique internet du grand libérateur, on trouve des portes clé à son effigie, et on peut même acheter la tenue du parfait dissident : tee-shirt, casquette superquenelle et tongs ananas. Israël n’a qu’à bien se tenir, d’ailleurs Dieudonné le philanthrope a promis d’envoyer un million d’euros à Gaza. Mais que les palestiniens ne s’impatientent pas, le transfert n’est pas direct, il passe d’abord par le Cameroun [3]. Cette solidarité purement verbale prête à sourire quand on sait que Dieudonné est rejeté par la plupart des mouvements de soutien à la Palestine [4]. Ce militant de la cause des noirs ignore qu’il n’est pas nécessaire de souiller les souffrances des juifs déportés pour soulager ses propres souffrances ou celles des palestiniens.
La dieudosphère ne se limite pas au fan club de Dieudonné, elle attire aussi moult idéologues d’extrême droite, négationnistes et autres antisémites avérés. Dans cette nébuleuse néofasciste où Dieudonné joue le rôle de rabatteur, son public se retrouve malgré lui pris en étau sous les griffes d’un Soral ou d’un Faurisson prêts à les engloutir idéologiquement, et ils y parviennent très bien, trop bien… Des proies désarmées d’un côté, des virtuoses d’une dialectique au service de la haine de l’autre.
Dans ce folklore de la France de Brasillach, la complexité du monde s’en retrouve comme par magie réduite à une simple lutte pour sa domination au profit d’une petite communauté, les juifs, encore les juifs, toujours les juifs… Cette théorie était déjà écrite dans les protocoles des sages de Sion, on la retrouve dans Mein Kampf, elle est réaffirmée par Dieudonné qui a simplement remplacé les juifs par les sionistes pour échapper aux sanctions judiciaires. Comme toute théorie du complot, elle permet d’interpréter un très grand nombre de faits politiques et économiques comme autant de preuve de cette supposée volonté de domination par les sionistes. Cette apparente économie de pensée produit un fort impact psychologique, car elle fournit au quidam moyen la puissante illusion d’être capable d’expliquer l’histoire. Le peuple allemand n’a-t-il pas en effet été hypnotisé par la propagande efficace de Goebbels autour d’un complot juif qui permettait d’expliquer tous les malheurs de l’Allemagne ? Une conviction antisémite qui a été la cause du génocide des juifs d’Europe, une conséquence beaucoup plus difficile à assumer que le simple fait de haïr les juifs.
C’est là que les négationnistes comme Faurisson font leur apparition dans le jeu de la dieudosphère. En falsifiant l’histoire de la shoah, ils fournissent aux idéologues antisémites la matière factice pour se dédouaner des terribles conséquences de leur discours. La présentation qu’ils font du génocide comme un mensonge sioniste visant à culpabiliser les européens, est à la fois une justification de la théorie du complot, et une radicalisation virulente du discours antisémite. Dès lors on comprend comment la thèse du complot entraîne ses adhérents dans une spirale infernale où la conviction antisémite se renforce d’elle même par sa propre justification. L’idéologue Alain Soral, récemment condamné pour son geste de la quenelle au mémorial de la shoah, use insidieusement de cette abjecte dialectique qui l’expose à des sanctions pénales [5]. Pour Dieudonné et ses amis une atteinte à leur liberté d’expression ou plus exactement à l’interprétation bien particulière qu’ils en ont.
La France exposée à une menace fasciste
Les spectacles de Dieudonné s’adressent à un public déjà conquis de voir leur héros défier les autorités et braver les interdits. Un jeu très dangereux dans une France en crise économique qui déroule les scandales politiques et où la jeunesse perd petit à petit la confiance dans les institutions gouvernementales. Dieudonné ne manque jamais une opportunité de fragiliser un peu plus l’édifice, à cet effet il n’hésitera pas à promouvoir la campagne de désinformation surréaliste de Farida Belghoul lorsqu’elle appelait à boycotter les établissements scolaires [6]. (Certains établissements ont enregistré un taux d'absentéisme de 30% !) Une bagatelle à côté du conspirationnisme délirant d’Alain Soral qui voit dans les attentats de Charlie hebdo la main des services secrets israéliens, français et américains... Ce national socialiste - comme il se définit lui même - ne cache pas ses ambitions politiques, il est le référent intellectuel de Dieudonné, ensemble ils viennent encore de monter un nouveau parti : « Réconciliation nationale » [7]. Racialiste, sexiste, antisémite et nationaliste, Alain Soral ne parle pas la langue de bois, mais celle du 3ème Reich, le fond du message est un discours de haine, la forme aussi. Ses nombreux dérapages témoignent de ses névroses : “On a vu aussi le petit Elkabache, c’est mon analyse un peu plus racialo-communautaire qui est finalement le petit sémite séfarade se soumettre comme une femme à quelqu’un qui représente encore la virilité aryenne (Poutine), même si elle est slave, et ça c’est la juste hiérarchie traditionnelle. [8].” Décidément, non, la République ne peut pas défendre le droit d’exprimer de telles idées, même si la contradiction doit logiquement apporter avec le temps le triomphe de la vérité, les morts de l’épouvante nazie ont précédé la proscription des thèses d’Adolf Hitler et de sa juste hiérarchie des races. La liberté réclamée par Dieudonné et Soral de pouvoir débattre de leur idéologie de la haine, ne peut donc constituer une garantie d’échapper à ses conséquences.
Dans ce pire très sombre où s’enracine un mépris décomplexé pour la dignité humaine, dans ce pire où l’on souille la mémoire des déportés [9], dans ce pire où la défunte chanteuse Barbara est traitée de "cinglée" et de "tarée" pour son oeuvre l’aigle noir [10], dans ce pire où un juif est suspect d’être ce qu’il est, l’outrage de Racha sonne comme un avertissement, nous avons le devoir de ne pas en ignorer la portée.
Extraits de l’article de la honte
« Mais, hé, entre nous, profiter de sa fille trisomique, la sortir du formol, là, dans une sorte de tentative insane de racket à la pleurniche, heureusement avorté… Même Alfredo, il aurait pas osé faire ça. Pensez donc, la pauvre petite… À cause d’un manque d’oxygène à la naissance, elle est nourrie par une sonde gastrique, ou anale, je ne sais plus. Du coup, elle ne grandit pas, ou à peine. Et en plus, bin si, obligé, elle est toute tordue et toute cabossée de partout, à croire, oui, que quand il la sort pas de son bocal pour faire un billet, il la cache dans une cornemuse. Et d’ailleurs, hein, oui, puisqu’on en parle, là, de la dégénérescence placentaire qui lui sert de fille… »
« Son machin, là, sa fille, elle se chie dessus 24 heures sur 24, y’a même pas de bouton pour arrêter l’truc. Bon, lui il nous dit que c’est à cause d’un manque d’oxygène à la naissance. Mais hé, qu’est-ce qui nous prouve que c’est vrai ? Rien ! Va savoir si c’est pas plutôt lui qui lui a secoué le moutardier, à sa morte-née, hein, et ceci alors que, peut-être tiens, elle était encore accrochée au fion de sa mère ?
Il lui a défoncé la boite à chocolat un peu trop fort, et puis c’est tout ! »
« Quand c’est E.T. qu’on a dans le couffin, hein, un E.T. tout pourri, en plus, un genre de cancrelat tout désarticulé, tu sais, un ballon de rugby à moitié dégonflé et qui bave (ouais : beurk !), quand c’est ça qu’elle vous tend, la sage-femme, en lieu et place d’un enfant normal, d’un enfant humain, et ben, un peu de courage, que diable ! Un grand coup de pelle dans la tête, un trou dans le jardin et on n’en parle plus. »
« Puisque Monsieur Laurent Louis m’a parlé, à moi, de décence, moi je leur réponds ceci, à Laurent Louis et à sa monstresse de fille : Monsieur, quand on n’est pas capable de faire un enfant normal à sa femme, on a la décence de l’enculer ! C’est une question de dignité humaine. »
« Et l’autre, Laurent Louis, il me crache à la gueule, tu sais, comme si c’était de ma faute, hein, si ce qui lui sert de fille, là, son Frankenstein femelle miniature, incontinence et compagnie, est complètement tarée. »
« Et celà tant pour le père que pour la progéniture avariée. Et alors, attention, hein, à ce niveau-là, on peut dire que lui il a décroché la timbale ! Tenez, si un jour ils transforment le musée du Louvre en hall d’exposition, des pires résidus des dysfonctionnement utérins humains, c’est sûr, sa fille elle va remplacer la Joconde. C’est un genre de poulpe, prédigéré tu sais, tout visqueux, et moitié cul-de-jatte en plus, et avec j’sais pas combien de bras. D’ailleurs, on sait même pas si c’est des bras ou des branchies, qu’elle a. Ah j’te jure, c’est horrible ! La première fois que j’ai vu le truc, j’y ai vomi dessus direct. Et cinq fois d’affilée. Non, on pouvait plus m’arrêter. Le docteur aux urgences, il m’a dit que mon œsophage, il avait été comme subitement rongé de l’intérieur par une vision apocalyptique. Et c’est tout à fait ça, en fait. Et puis alors le pire, c’est quand elle essaie de communiquer. Ah, elle émet des sons, c’est atroce ! T’as envie de te crever les tympans, tellement ça t’agresse. Et en plus ça te résonne dans le bide, tu sais. Ah, quand t’as pas l’habitude, tu pars aux chiottes en courant. Rien que tu regardes le truc, t’as toute la tripasse qui se met à zouker. Alors si t’ajoutes le bruit à l’image, instantanément y a tout ton manger de la semaine qui descend dans tes chaussettes. Parce que, attention, en plus du bruit, t’as les odeurs ! Ah la salope : qu’est-ce qu’elle coince ! Non, sérieux, j’te jure : c’est insupportable ! Tellement elle pue, à coté, Alfredo, quand il pète, c’est que du bonheur. C’est du désodorisant, c’est de l’Airwick. Et pourtant, le pet d’escroc, crois-moi, ça envoie. »
« Bon, c’est normal qu’elle pue, l’autre : elle baigne continuellement dans sa pisse. Non, ils la lavent plus. Comme en plus elle fait que péter, ils la laissent dedans. Ben oui, ça lui fait comme un jacuzzi, à la p’tite : elle s’éclate. Et puis de toute façon, à part ça, elle a aucune sensation, donc autant qu’elle en profite. En plus, je veux pas avoir l’air de me répéter, mais quand elle essaie de communiquer, on capte rien. Personne entrave que dalle à ce qu’elle raconte. Même Roger il y comprend rien. Et pourtant c’est une mouche à merde ! Tiens, d’ailleurs, une fois, Roger il avait atterri dessus, il l’avait pas vue, il s’est posé dessus par hasard, un coup de pas de bol. Ben il a fallu qu’on l’amène à l’hôpital, hein. Ah, on a failli le perdre ! Ben va faire du bouche-à-bouche à une mouche, toi ! Une semaine, qu’il est resté dans le coma, le Roger. C’était pire que s’il s’était pris un coup de Baygon. »
« Non, c’est pour ça que je dis que quand on a une fille comme ça, il faut se montrer humain : tu lui fous une balle dans la tête, tu la jettes au fond d’un puits, ou alors tu lui perces le bide, enfin tu mets fin à ses souffrances, quoi. Vous vous souvenez du film La Mouche ? Au début, pour vérifier si le truc de téléportation fonctionne ou pas, le héros du film (j’sais plus qui sais, oui : celui qui joue dans Jurassic Parc aussi, et dans Independance Day. Non, pas Will Smith : l’autre). Ben le gars, au début du film il fait un essai avec un singe. Et visiblement à ce moment-là, son truc de téléportation, il est vraiment pas encore au point. Non, parce que quand il ouvre le téléporteur d’arrivée, c’est pas un singe qui en sort, c’est un genre de bouillie hurlante, tu sais, et qui s’agite dans tous les sens. Et ben la fille de l’ami dont je vous parle, c’est tout à fait ça. Donc normalement, c’est poubelle. Et d’ailleurs, c’est ce qu’il fait le type dans le film : la bouillie de singe, il la fout à la poubelle. Bon, vous m’direz, c’est un film. Mais c’est quand même ce qu’il faut faire : quand on a un gosse liquide, poubelle ! »
Références
[1] Enquête sur les appels aux dons lancés par Dieudonné pour ses amendes, Le Parisien, 21 Janvier 2014
[2] Message vidéo d’un jeune soralien typiquement endoctriné par la propagande du complot sioniste
[3] Dieudonné soupçonné de blanchiment pour avoir envoyé de l'argent au Cameroun, Le Monde, 7 janvier 2014
[4] Dieudonné, l’imposteur raciste, n’est pas l’ami du peuple palestinien, Association France Palestine Solidarité, 3 Janvier 2014
[5] Propos de Soral sur les chambres à gaz
[6] Farida Belghoul sur la théorie du genre
[7] Soral et Dieudonné, nouveau parti politique
[8] Alain Soral : "quand Poutine parle, Elkabbach s'écrase"
[9] Dieudonné cité en correctionnelle pour provocation à la haine raciale, 22 Mai 2015
[10] Dieudonné condamné à payer 80 000 euros de plus aux ayants droit de Barbara, Libération, 12 mai 2015
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