Dimanche on votait en Hongrie
Dimanche 13 octobre se tenaient les élections municipales hongroises. Un premier vote pour le maire de la commune. Un second vote pour le conseiller municipal de secteur dans les villes de plus de dix mille habitants ainsi que dans les 23 arrondissements de Budapest considérés comme des villes. Et à Budapest un troisième vote pour le maire principal de la ville. Au scrutin uninominal à 1 tour. Les conseils municipaux sont complétés par quelques élus à la proportionnelle à partir des restes, les voix des candidats non élus et l’excédent de voix des candidats élus (puisqu’il leur suffisait d’avoir une voix de plus que le second). C’est ainsi que le conseil municipal de Budapest est composé du maire principal, des 23 maires d’arrondissement et de 9 élus à la proportionnelle. 33 membres pour une ville de 1 800 000 habitants. Cela semble suffisant pour faire un travail efficace.
Résidant en Hongrie à temps partiel et possédant donc, comme tous les hongrois, une carte d’adresse j’ai été informé par un simple courrier de la date des élections et de mon bureau de vote. Pas de carte d’électeur, il suffit d’avoir une adresse officielle pour être inscrit sur la liste électorale. Pas de coûteux envoi de matériel de vote en papier glacé à domicile. Il suffit de regarder autour de soi dans les rues, il y a suffisamment d’affiches. Et parfois un peu de propagande dans la boite à lettres.
Au bureau de vote on m’a demandé ma carte d’identité et ma carte d’adresse puis on m’a remis 3 feuilles de papier. La première, relative au conseiller de secteur comportait 2 noms, celui du candidat du FIDESZ et celui de l’opposition. Même chose pour la seconde feuille relative au maire d’arrondissement (110 000 habitants). Pour le maire de Budapest la feuille comportait quand même 4 candidats, celui du FIDESZ, celui de l’opposition, un candidat indépendant, et un barbu se réclamant d’une association dont je n’avais jamais entendu parler. J’ai coché le nom de mon candidat préféré sur chacune des 3 feuilles et placé le tout dans une enveloppe que j’ai glissée dans l’urne.
Pourquoi aussi peu de candidats. Tout d’abord l’opposition s’est regroupée : les deux clans sociaux-démocrates (le libéral et l’ultralibéral), les deux factions écologistes (libérale et conservatrice) et le mouvement de jeunes Momentum à l’origine du retrait de la candidature de Budapest pour l’organisation des jeux olympiques. Dans de nombreuses villes cette opposition a reçu le soutien du Jobbik, parti qualifié d’extrême droite lorsqu’il était anti-tzigane, anti-juif et islamophile (même Marine Le Pen n'en voulait pas dans son groupe au Parlement européen) mais devenu fréquentable pour la gauche depuis qu’il s’est recentré en excluant ses éléments les plus radicaux. Par ailleurs pour éviter les candidatures de farfelus les candidats doivent recueillir un certain nombre de signatures d’électeurs, 5000 pour Budapest, 500 pour un arrondissement ou une ville de plus de 100 000 habitants, pour pouvoir se présenter.
L’opposition comptait beaucoup reprendre la ville de Budapest qu’elle avait perdu en 2010 suite à de nombreux scandales touchant la gestion de cette ville par les socialistes alliés aux libéraux. D’autant plus que la liste du FIDESZ n’avait recueilli que 42 % des voix aux dernières élections européennes dans la la capitale (contre 52 % au niveau national). Les derniers sondages annonçaient un résultat serré avec une légère avance pour Tarlós István, membre du FIDESZ. Mais c’est bien l’alliance de tous les partis d’opposition qui l’a emporté. Le nouveau maire de Budapest sera Karácsony Gergely, un écolo légèrement de gauche qui avait été choisi comme chef de file lors d’une primaire. L’opposition emporte par ailleurs 14 mairies d’arrondissement sur 23, en laissant 7 au FIDESZ et 2 à des indépendants. Elle conquiert également 10 des 23 grandes villes de province. Par contre dans les campagnes le FIDESZ domine largement puisqu’il est vainqueur dans la totalité des 19 comitats, structures sans beaucoup de compétences, que l’on pourrait comparer à nos départements mais qui n’incluent pas les grandes villes.
Un revers pour Orbán ? Plutôt une déception. Les résultats sont conformes aux tendances constatées lors des dernières élections, législatives en 2018 et européennes en 2019. Cependant, alors que l’opposition partait divisée lors des précédents scrutins (majoritaire à un tour pour les législatives comme pour les municipales), elle a su cette fois réaliser une union au-delà de toute attente, allant de gauche très modérée à l’extrême-droite devenue modérée. Dans les rangs du FIDESZ on espérait que les disputes du passé entre frères ennemis sociaux-démocrates laisseraient des traces et que l’alliance avec le jobbik troublerait certains électeurs au moins chez les juifs et dans l’intelligentsia. Cela n’a pas été le cas. La gauche olfactive s’est bouché le nez.
Comme en France on assiste à une fracture entre les grandes villes à l’électorat aisé qui rêve de sociétal, de mariage pour tous (interdit par la constitution) ou d’accueil de migrants pour imiter les pays occidentaux et les campagnes où la population qui vit plus modestement pense à son pouvoir d’achat et sait gré à Orbán d’avoir imposé la baisse des charges aux fournisseurs d’énergie et d’eau (-10 % sur l’eau, -25 % sur l’électricité, le gaz et le chauffage collectif) et augmenté le SMIC de 15 % en 2017, 10 % en 2018 et 8 % en 2019. Et puis dans les campagnes l’immigration fait peur. On voit tous les jours à la télévision d’État les ravages que cela cause dans les pays occidentaux. Pas question de voter pour les partis pro-migrants soutenus par Soros (c’est ainsi que le FIDESZ qualifie ses opposants).
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