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Accueil du site > Tribune Libre > Disparités salariales en France : l’INSEE s’essaie au (...)

Disparités salariales en France : l’INSEE s’essaie au rase-mottes statistique ?

L'INSEE vient de publier une étude intitulée : " Une diminution des disparités salariales en France entre 1967 et 2009. " Ce titre, dont une lecture rapide pourrait donner à croire que les inégalités se sont résorbées en France sur la période étudiée, offre une magnifique illustration de la difficulté de restituer la réalité sociale avec quelques chiffres. Laquelle difficulté permet à toutes les convictions et toutes les propagandes de s'appuyer sur des statistiques soigneusement sélectionnées pour soutenir leur cause.

Dans le cas présent, les premières lignes du résumé de l'étude par l'INSEE fournissent elles-mêmes - mais sans beaucoup les mettre en avant - les informations permettant de relativiser grandement le sentiment dégagé par le titre du document : " Les disparités de salaires des hommes travaillant dans le secteur privé à temps complet ont reculé en France entre 1967 et 2009, contrairement à l'évolution observée dans plusieurs pays développés. "

Il en ressort que l'étude ne porte que sur le secteur privé (mais on découvre plus loin qu’elle couvre aussi le secteur semi-public) et surtout qu’elle concerne uniquement :

- les travailleurs masculins ; on a un peu de mal à y croire puisque le titre ne laisse rien supposer de cette exclusive, mais la lecture du rapport lève le doute ; le champ de l’étude y est décrit comme suit : « hommes nés en France travaillant à temps complet dans le secteur privé et semi-public » ; la montée en charge du travail féminin au cours de la période et le fait que celui-ci soit, à qualification égale, sous rémunéré n’est donc pas pris en compte (pas plus d’ailleurs, semble-t-il, que le sort des travailleurs masculins nés hors de France ?) ;

- les travailleurs à temps complet, à l'exclusion donc des temps partiels dont on sait qu'ils se sont développés dans un contexte plus général de précarisation du marché du travail (CDD, intérim ...) ; là encore, le titre de l'étude nourrit l'ambiguïté en faisant l'impasse sur cette seconde exclusion.

L’évacuation des femmes du champ de l’enquête (48 % de la population active en France en 2009 !) est d’autant plus déroutante que le même INSEE a publié le 8 mars, à l’occasion de la Journée des droits des femmes, une étude faisant apparaître que celles-ci avaient perçu, en 2009, dans le secteur privé, des salaires inférieurs de 28 % à ceux des hommes (précisons que, en salaire horaire, l’écart n’est plus « que » de 18 %, les femmes représentant 82 % du travail à temps partiel en France). Ecart encore considérable, même s’il s’est réduit depuis 1995, où il était de 34 %.

L’INSEE est une référence statistique. Les médias reprennent largement les titres de ses rapports, qui font autorité. Sur un sujet sensible, en une période difficile, il n’est pas superflu de peser ses mots. Pour cette fois-ci, c’est raté !

Cela est d’autant plus fâcheux que, en dépit de cette réduction des disparités à l'intérieur de la sphère des salaires (pour les hommes nés en France travaillant à temps complet …), globalement, la part du travail dans la répartition de la richesse produite (valeur ajoutée) s’est réduite au cours de la même période. Il n’aurait pas été mauvais de le rappeler. 

Profitons-en pour souligner qu'il ne faut pas confondre les disparités salariales et les disparités de revenus qui impliquent de prendre bien d’autres facteurs en considération : la précarité (dont le chômage), les revenus du capital, la répartition de la valeur ajoutée entre toutes les parties prenantes (travail, capital, investissement ...) après application de la fiscalité, des prélèvements sociaux et de la redistribution par la collectivité publique. Au bout du compte, c'est à un enrichissement des plus riches et à un appauvrissement des plus pauvres que l'on a assisté, sur la période couverte par l'étude de l'INSEE.

www.citoyensunisdeurope.eu

Pour prendre connaissance de l'étude de l'INSEE sur les disparités salariales : http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/ref/EMPSAL13f_D4_dispesa.pdf

Pour une approche plus générale de cette question de l'évolution des salaires en France : http://www.citoyensunisdeurope.eu/france/salaires-et-politiques-salariales-en-france-depuis-1950-t366.html

 


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15 réactions à cet article    


  • spartacus spartacus 18 mars 2013 11:39

    L’ INSEE donne aujourd’hui des résultats . 

    D’institut statistique c’est devenu un institut de propagande politique...
    Mais quand un institut ne vit qu’avec un seul client, l’état, en situation de monopole, vous n’êtes pas étonné. 

    Ce qui est nouveau c’est que la partialité est devenue plus effectivement de plus en plus flagrante.

    J’avais fait un article sur l’INSEE, mais la censure de gauche en modération n’a pas souhaité sa publication. 
    En effet preuves à l’appuis, les stats sur l’absentéisme des fonctionnaires était une vaste fumisterie. Mais bien entendu comme pour la gauche ce sont des intouchables, vous n’avez pas vu cet article.

    Vous pouvez le retrouver ici l’article non censuré par l’extrême gauche en sur-nombre sur Agoravox qui utilise la modération en censure pour ne faire passer que ses opinions :

    • scripta manent scripta manent 18 mars 2013 12:17

      @ spartacus

      Intéressant l’article que vous citez ... A creuser.
      Qu’il y ait des administrations ayant développé une culture de la petite vitesse, cela ne fait guère de doute. De là à entonner l’air du « fonctionnaires, tous feignants ! », très peu pour moi. 
      Et j’ai connu de près de grandes entreprises privées où, entre réunions inutiles et pauses à répétition, certains n’étaient guère présents non plus.
      Quant à la « censure de gauche » sur Agoravox, j’ai pu constater que le camp d’en face évoque aussi une « censure de droite ». En tout cas, votre commentaire est en bonne place ainsi que votre renvoi au quidam. Et je m’en réjouis.


    • scripta manent scripta manent 18 mars 2013 13:05

      @ subzéro

      Oui, chaque forum finit toujours par avoir une tendance de modération pas totalement équilibrée. Tout est dans le dosage !
      La modération devrait consister à arrêter ce qui est injurieux, obscène, dépourvu de tout intérêt ... indépendamment de l’opinion exprimée. Ce n’est pas toujours facile, même avec la meilleure volonté du monde.


    • scripta manent scripta manent 18 mars 2013 13:38

      @ Sub-Zéro.
      Intéressant.
      Voila de l’information !


    • subliminette subliminette 18 mars 2013 11:50

      Avons-nous une chance de sortir indemnes de ces manipulations incessantes qui surgissent de tous les côtés, nous emplissant les oreilles avec l’efficacité d’un cérumen purulent ?

      Ce matin une « journaliste » de RTL (pardon je n’ai pas retenu son nom, peut-être Bonfillon, mais pas sûr, j’écoutais distraitement au début) nous annonce qu’en ces temps de crise, les Français se réfugient dans des valeurs-refuges, des produits phares dont les ventes explosent, même s’ils ne « sont pas donnés ».
      Je dresse l’oreille, m’attendant à entendre parler d’or, de rolls, de rollex, et toutes ces choses que l’on nous fait miroiter comme autant de hochets indispensables à gagner sa propre estime la cinquantaine venue.

      Quelle déception ! Foin des ors et des chromes alléchants. Ou encore des valeurs culturelles ou morales de note belle et masochiste société. Rien de tout ça :

      Les 5 « valeurs-refuges des Français en ces temps de crise » sont, dans l’ordre :

      1) le Nutella
      2) la Vache qui rit qui a bondi de 33% des ventes en un an.
      3) Les lardons Herta
      4) Le thon Petit Navire
      5) les carambars

      Je sais pas vous, mais moi, même par ces temps de crise, je n’ai pas envie de me réfugier dans ces cochonneries industrielles. J’ai même pensé que la chronique était ironique et j’ai attendu la chute. Euh... J’attends toujours....

      J’associais tout autre chose au mot « valeur ». Mais bon, excusez-moi, je ne suis pas journaliste !


      • scripta manent scripta manent 18 mars 2013 12:01

        @ subliminette
        Excellent !
        Et en 6/, il y a les lasagnes ?


      • pens4sy pensesy 18 mars 2013 12:43

        Faut savoir comment l’INSEE est administrée (cf wikipedia)
        ...
        Les administrateurs de l’Insee en activité sont employés ou travaillent avec les entreprises ou services suivants : les administrations françaises (Insee, ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, de l’éducation nationale, du travail, etc.), les établissements publics (Arcep, Conseil de la concurrence, etc.), les grandes banques (Goldman Sachs, Société générale, BNP Paribas, Caisse des dépôts et consignations, etc.), les organisations internationales (Banque mondiale, FMI, ONU, etc.), les instituts de sondages et d’études (Médiamétrie, BVA, Ipsos, etc.), l’enseignement supérieur (École polytechnique, École nationale de la statistique et de l’administration économique…) et la recherche (au Crest notamment).

        On ne s’étonnera donc pas que ce soit mensonges et manipulations.

        Par contre que Monsieur Spartacus, héraut du libéralisme sauvage s’offusque que ses amis ici énumérés, soient les inspirateurs de ces manipulations me semble étrange.

        L’INSEE est une entité qui participe a la conspiration du Nouvel Ordre Mondial.


        • scripta manent scripta manent 18 mars 2013 13:33

          @ pensesy

          Pouvez-vous préciser à quels mécanismes, relations ... vous faites allusion lorsque vous écrivez que « Les administrateurs de l’Insee en activité sont employés ou travaillent avec (...) Goldman Sachs » etc ...



        • spartacus spartacus 18 mars 2013 15:10

          @ pensesy

          Le libéralisme est toujours « sauvage »...amusant.

          Quand a exposer que les corps de l’état seraient amis des libéraux, c’est ubuesque.


          « On reproche au libéralisme d’être matérialiste, de prôner la poursuite exclusive de la richesse aux dépens de toute autre valeur, alors qu’il n’a d’autre aspiration que de permettre l’épanouissement des êtres humains et la réalisation de leurs objectifs, spirituels, affectifs ou esthétiques autant que matériels. On lui reproche d’être sauvage alors que, fondé sur le respect intégral des autres, il exprime l’essence même de la civilisation. » Source : pascal salin

        • scripta manent scripta manent 18 mars 2013 18:02

          @ pensesy

          Cela prouve simplement qu’il arrive aussi à Wikipedia de publier des articles bizarroïdes.

           


        • bruno 18 mars 2013 15:12

          A propos de l’INSEE, il me paraît opportun de citer ici un extrait de l’excellent ouvrage de Laurent Mauduit, « Les imposteurs de l’économie » :
          « La puissance publique n’a souvent pas fait son devoir [...] Dans une course aux économies budgétaires, elle ne veut, ou ne peut plus assumer ses responsabilités. C’est l’une des innombrables conséquences de l’Etat pauvre : de nombreuses missions ont été rognées. Et les organismes publics un peu trop indépendants ont souvent été les premiers à en faire les frais. Que l’on observe par exemple les mauvais coups en cascade dont l’INSEE a pâti ces dernières années. Réductions drastiques de de crédits, remise au pas de l’institut au prétexte fallacieux d’une délocalisation[...].
          En fait, l’Etat a parfois achevé le travail entrepris par la finance pour qu’il n’y ait plus de recherche économique indépendante. Et pour qu’en bout de course, la société soit, si l’on peut dire, aveugle sur elle-même. Car sur une longue période, il n’y a pas eu que l’INSEE que lon’ a cherché à démembrer et dont les moyens ont été amputés. Il y a eu aussi le célèbre et fâcheux précédent du centre d’étude des revenus et des coûts (Cerc), purement et simplement supprimé [...] Et le résultat et celui que l’on sait. Si l’INSEE a repris une partie des études de l’ex-Cerc, il en est beaucoup d’autres qui ont été abandonnées ou sont désormais beaucoup moins complètes. Sur les inégalités, sur la pauvreté, sur les travailleurs pauvres... ».


          • pidgin 18 mars 2013 16:04
            L’un des ressorts de la vie en société (heureusement il y en a d’autres) est le rapport de forces.

            Pour le modifier, il y a une trousse à outils : l’élimination, l’intimidation, la séduction, le mensonge et ses modalités (falsification, amalgame, artifice, bluff, faux-semblant, illusion, escroquerie intellectuelle, poudre aux yeux, vessies pour des lanternes etc …).

            La variété enfumage par les chiffres est très pratiquée par le personnel politique.

            Au cours d’un débat par exemple, on ensevelit l’adversaire sous un tombereau d’assertions chiffrées en y glissant, discrètement ou non, quelque contre-vérité que, dans l’urgence, l’adversaire pas plus que l’auditeur n’a les moyens de vérifier. Ça peut passer même si c’est gros, du moment que c’est prononcé avec aplomb par quelqu’un qui sait inspirer confiance.

            Et maintenant l’INSEE, un service public censé travailler dans l’intérêt général !

            C’est une erreur ponctuelle, ou plus grave, une dérive et il faut REDRESSER LA BARRE !

            Merci aux veilleurs de tous poils de signaler ces dérives mais … sans nous enfumer.

            Une bonne assurance : cultiver son propre discernement.


            • JohnS 18 mars 2013 21:35

              Bah si l’INSEE a raison : après 60 ans de nivellement par le bas socialo-communisme les français s’appauvrissent vers une belle égalité de revenus..


              • scripta manent scripta manent 19 mars 2013 09:44

                @ JohnS

                Belle illustration de la confusion des chiffres et des idées : le rapport de l’INSEE évoqué dans l’article parle de disparités salariales et non de disparités de revenus.
                Pour ce qui est de la disparité des revenus, je vous invite à vous rendre sur le site officiel de l’INSEE et à prendre connaissance des études régulièrement publiées sur ce sujet.
                Pour ceux qui n’aiment pas les chiffres, on peut aussi se contenter de constater que, d’un côté, l’industrie du luxe n’a jamais été aussi florissante, à un moment où le reste de l’économie est en berne, et que, de l’autre côté, les associations caritatives croulent sous les demandes.

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