Djibouti : Ismaïl Omar Guelleh s’accroche à son trône
Les élections sont la plus grande hantise des hommes politiques une fois arrivés au pouvoir. La peur de perdre un poste prestigieux les pousse à ne pas s’occuper de la chose publique et seule leur prochaine réélection compte. Ce défaut intrinsèque au système démocratique sous perfusion médiatique n’existe pas dans bon nombre de pays africains. C’est le cas de Djibouti où le président Guelleh règne en maître depuis près de deux décennies. La problématique de la réélection n’en est pas vraiment une, mais la chose publique est là encore bien lointaine des préoccupations présidentielles. Se maintenir au pourvoir quitte à plonger le pays dans le chaos, telle est la démarche empruntée depuis plusieurs mois par Ismaïl Omar Guelleh.
« Moi président »
Cet aphorisme désormais bien célèbre en France prête à sourire tant le chef de l’Etat n’a de chef que le nom. A Djibouti, cela fait déjà beaucoup moins rire car ce que veut le président Guelleh, le président Guelleh a. Un changement constitutionnel pour pouvoir se présenter une troisième fois à la présidence en 2011 ? Pas de problème ! Tel un monarque, celui qui promettait de sortir le pays de la misère arrache tout ce qu’il veut (mais pour lui seulement). Cinq ans plus tard il recommence.
Cette fois-ci il s’agit de se faire élire pour un quatrième mandat. La chose n’est pas simple car le peuple est, sinon hostile, au moins circonspect quant à une telle démarche qui sent la démocratie de parade. S’étant donné les coudées franches d’un point de vue constitutionnel, la question est uniquement politique. Comment faire avaler une couleuvre de plus à des Djiboutiens qui n’aspirent qu’à la paix sociale et la démocratie ? Facile ! On laisse entendre qu’on ne se représentera pas, le système mis en place fait semblant de redouter le vide et une exclamation « populaire » propulse Omar Guelleh à la tête de son Parti pour les prochaines élections qui auront lieu le 8 avril prochain.
Mais que fait l’opposition ?
L’opposition ne se fait pas beaucoup entendre malgré une situation chaotique. Un manque d’intérêt pour la chose publique et la démocratie comme du côté de l’exécutif ? Que nenni ! L’opposition est tout simplement réduite au silence sous un déferlement de violence qui ne passe même plus inaperçu à l’étranger. Tout est fait pour tuer dans l’œuf une réponse politique non violente qui cherche juste à freiner un tant soit peu une marche forcée vers la dictature. Dernier épisode macabre de la folie qui s’est emparée du pouvoir, l’assassinat d’au moins 27 opposants qui s’étaient réunis dans un quartier populaire de la capitale le 27 décembre 2015. Parce qu’il y avait eu des violences organisées par le pouvoir la semaine précédente, les policiers ont cru bon tirer sur une petite foule pacifique dont le seul crime est de ne pas penser comme le président Guelleh. Les balles sont aveugles et ont tué une fillette de six ans et quelques rares membres de l’opposition au Parlement. Le profil des blessés et des tués ne fait pas penser à une armée de révolutionnaires prête à en découdre dans les rues…
Aucune figure de l’opposition n’émerge dans ces conditions et quand bien même un personnage assez charismatique se présenterait, sa candidature serait coulée par les juges aux ordres, les bourrages d’urnes ou d’autres moyens plus expéditifs. La lente, mais ferme mise au pas de Djibouti est extrêmement inquiétante d’autant plus que les puissances occidentales qui ont une vraie influence dans la région détournent les yeux. Lorsqu’un Paul Kagamé use de moyens peu recommandables (mais moins violents) pour briguer un quatrième mandat au Rwanda, la communauté internationale réagit – certes – mollement. Omar Guelleh endosse les habits de dictateur, pas d’écho autre que celui des associations de défense des droits de l’Homme. A Djibouti, le calvaire a un visage et un nom connu de tous. A quand un sursaut pour le reléguer dans les oubliettes du passé ?
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