Dès que vous mentionnez droits de l’homme, concernant l’Afrique, les esprits les plus illuminés des civilisations occidentales échappent difficilement à l’idéologie et aux préjugés sectaires. Mais le plus grave, c’est que les philosophes ou penseurs européens, véhiculent une certaine idée, de la pratique du droit, qui ma foi est toute contraire à l’idéologie de progrès chez les africains.
L’Egypte Foyer du Modernisme
Si les uns et les autres veulent galvauder l’histoire du peuple africain en matière d’organisation de la cité, de sa structuration, de son fonctionnement, alors il convient pour comprendre notre histoire, de faire un bond dans la société antique, celle qui est à l’ origine, de la pensée cognitive structurée. Les puissances occidentales, à travers leurs lobbies, tendent à propager, une absence de codification du droit dans l’Afrique précoloniale. Et pourtant, nul n’ignore l’organisation des sociétés Ashanti, les royaumes d’Abomey, qui était stratifiée. C’est à dessein, parce que c’est un vieux combat historique, qui s’agite depuis l’aube des temps, que de ne pas reconnaître aux africains un droit à leur histoire, un droit à leur civilisation, un droit à leur culture, sans être sujets aux jugements et aux procès. Willem Amo philosophe de la Gold Coast (actuel Ghana), fut banni de ses pairs européens, pour avoir dit être le précurseur de la pensée historique africaine. Jusqu’à présent on n’a pas reconnu aux philosophes et penseurs noirs, la paternité d’être les précurseurs de la modernité et de la société évolutionniste. Hegel en son temps écrivait : « l’esprit égyptien s’est révélé comme enclos dans les caractères particuliers, comme amené en ceux-ci bestialement, mais aussi s’y mouvant dans une agitation sans fin ».
Quand bien même, on ne serait pas passionné d’histoire, il nous revient par rapport à la marginalisation tous azimuts de l’Afrique, dans la civilité moderne, que si elle l’est aujourd’hui, ce n’est pas faute d’avoir pensé autrefois. Nul ne serait aveugle devant l’architecture des pyramides, des palais royaux, des mathématiques, la philosophie que Pythagore, Euclide, Platon et d’autres grecs avaient passé des années à apprendre en Egypte.
En suivant les pensées de Hegel, et d’autres grands penseurs, l’Afrique est mise au ban de la communauté internationale, parce qu’il ne semble pas être un peuple historique. Ainsi, on se demanderait avec Meinrad Hebga si le peuple égyptien, dont les pharaons étaient de race noire, au témoignage d’Hérodote, ne fut point un peuple historique(1).
Ecrire les droits des peuples noirs
Dans le domaine des droits humains, des libertés, dont le monde entier célèbre la déclaration universelle, ces jours, l’imposture et l’hibernation ne sont pas moins dévastatrices. Parce que pour la plupart d’intellectuels, critiques, politiques occidentaux, être africain est synonyme de primitif, vu que l’expression des libertés fondamentales, chez les noirs d’Afrique, se manifeste par la violence et la brutalité. Si la violence semble traduire l’expression d’une accession à l’indépendance, toutes les parties belligérantes sont alors au même niveau. Puisque face à la violence des peuples insurgés, la réponse s’est faite par la violence.
Vivre, prouver qu’on a des droits, suppose dans cet unilatéralisme mondial, s’affirmer derrière un masque occidental. Que veut dire aujourd’hui pour un occidental droit de l’homme ? C’est l’affirmation aux peuples primitifs d’Afrique la marque à suivre, le modèle unique, vers la norme suprême du beau, le modèle européen : la science hellène !
Une attention jetée sur la manière dont sont traités les problèmes des droits tant civique que politique en Afrique, démontre à n’en plus douter, que le modèle importé de liberté, est celui que l’Afrique doit chanter, y compris avec ses intellectuels.
Ce qui fort malheureusement, dans notre société était la chasse gardée de l’intelligentsia, à savoir les libertés, est aujourd’hui un champ de ruines ; parce que les détenteurs des savoirs, qui croyaient être les héritiers naturels du monde politique, sont passés à côtés de leurs missions : celle de donner une orientation concertée . Il ne s’agit pas dans le cas espèce de penser que seule la dimension morale suffit à faire d’un homme politique, un véritable gardien des droits humains ; Il s’agit plutôt, à mon avis, de redonner à la pensée politique, comme à l’époque des pharaons, toute sa dimension métaphysique.
Cheick Anta Diop, dénonce et cela est d’actualité, cette manière de vouloir penser le monde, et de penser à la place du monde. Il faut qu’un droit, s’il est valable, soit le même pour tous. Il n’appartient plus aux africains, après tant d’années d’impostures et de falsification de l’histoire des libertés, de rester sous le joug de l’exploitation esclavagiste et colonialiste.
Aimé Mathurin Moussy
(1) Meinrad Hebga in Découvrez l’art Nègre ! Couleurs et Toiles Nicolas Bissek