Au temps des dictatures, on assassinait les personnalités gênantes. En République, on constitue des « dossiers ». Constituer un dossier consiste à trouver des failles, dans la vie privée ou la gestion. Les dossiers permettent d’exercer une pression, de faire chanter, peuvent provoquer une démission. Dominique Strauss-Kahn est-il victime d’une opération de déstabilisation au moment même où il appelle à une gouvernance internationale économique et à la disparition des paradis fiscaux ? Possible. Peut-on à cet égard parler de complot ? Rien n’est moins sûr. Car, en arrivant au FMI, DSK était précédé d’une réputation sulfureuse. Certes celle-ci ne franchissait pas certains cercles médiatico-politiques. Mais Dominique Strauss-Kahn aurait dû se méfier. Au FMI, on l’attendait au coin du bois.
Dans
Témoignage exclusif : la troisième affaire Strauss-Kahn, article publié aujourd’hui en une d’Agoravox, Olivier Bailly termine son article sur une citation de
Jean Quatremer : «
Le seul vrai problème de Strauss-Kahn est son rapport aux femmes.
Trop pressant, il frôle souvent le harcèlement. Un travers connu des médias, mais dont personne ne parle (on est en France). Or, le FMI est une institution internationale où les mœurs sont anglo-saxonnes. Un geste déplacé, une allusion trop précise et c’est la curée médiatique. »
Le seul vrai problème des hommes, c’est que justement ce sont des hommes, avec leurs faiblesses. On ne peut en vouloir à DSK d’aimer les femmes. On ne peut pas vraiment lui reprocher d’avoir favorisé ses conquêtes. Il le nie et nous n’avons pas de raison de ne pas le croire. Mais l’affaire évoquée par Olivier Bailly est plus grave. Il s’agirait d’une agression. On peut se demander pourquoi Tristane Banon n’a pas porté plainte. La réponse est toute trouvée : «
Une proportion élevée de viols ne sont jamais comptabilisés dans les statistiques puisque non juridiquement reconnus dans le pays du crime, et aussi très souvent parce qu’il est difficile pour les victimes de porter l’accusation » (source
Wikipedia).
La suspicion portée contre DSK est grave. Grave en tant que telle, et grave parce que, accumulée à ce qu’on appelle désormais l’affaire DSK, elle peut causer des dommages qui ne lui nuiront pas seulement.
Cette affaire,
Le Monde y revient en rappelant que «
l’enquête a été réclamée par Shakour Shaalan, qui représente l’Egypte et d’autres pays arabes au conseil d’administration du FMI, sous les conseils de représentants de la Russie et des Etats-Unis, indique encore le quotidien new-yorkais. »
La Russie et les Etats-Unis sont les pays qui profitent actuellement le plus du système des
paradis fiscaux dans lesquels des milliers de milliards de dollars échappent aux impôts et donc à la redistribution. La redistribution des richesses, c’est le rôle du FMI et de son directeur général : Dominique Strauss-Kahn.
Le 15 octobre sur Europe 1,
DSK explique qu’«
Il faut pourchasser et faire disparaître les paradis fiscaux ! » et qu’«
il faut absolument refonder le système ».
Quelques jours après, comme par hasard, le monde entier découvre que DSK est un chaud lapin. Opportunément, alors que ce secret de polichinelle ne franchissait pas certains cercles proches du pouvoir, cette réputation de chaud lapin devient un objet médiatique de premier plan. En France, bien sûr, on se gausse de cette histoire très gauloise. Opportunément ? Oui, car pourquoi ne pas imaginer que la vie intime de DSK soit instrumentalisée par les pays qui ont tout à perdre de la disparition du système financier actuel ?
Certes, comme dit la sagesse (?) populaire on ne prête qu’aux riches et il était sans doute facile d’atteindre Dominique Strauss-Kahn au tournant, alors que ses frasques s’étalent maintenant largement sur la place publique. Mais en accréditant la thèse que DSK serait victime de lui-même et de ses débordements sensuels, ne devons-nous pas non plus porter attention à une autre thèse, sous-jacente, et beaucoup plus intéressante : la « faiblesse » de DSK n’a t-elle pas facilité une opération de déstabilisation de bien plus grande envergure ?
Comme a dit
Nicolas Sarkozy à DSK avant son départ pour le FMI : «
Méfie-toi des Etats-Unis ; là-bas, les comportements personnels sont regardés à la loupe. »