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Accueil du site > Tribune Libre > Du Chiffre ! [De L’Indignation Et Du Nouvel Ordre Mondial]

Du Chiffre ! [De L’Indignation Et Du Nouvel Ordre Mondial]

[1ère Partie] … A l’ancienne ! Voilà comment j’ai été élevé : à l’ancienne. Travaille, mon petit. Travaille ! ... Ah, j’en ai entendu, ça oui, que ça me tomberait pas tout cuit dans l’auge. Qu’il fallait trimarder. Et pas qu’un peu. Au mérite qu’on serait reconnu, au mérite et rien d’autre … A les entendre, le travail, le labeur, c’était la panacée, le sésame, mais gaffe ! Pas du littéraire, ah non ! Du matheux ! Assurance pour la vie … J’avais pas le choix, comme qui dirait. Mais qu’importe … Le travail ! C’est de ça dont je voulais vous entretenir. Il est barré. Y’a plus. Défiguré. On s’est fait mettre sévère. Pis : on n’a rien dit.

Que je passe pour réac, j’en ai cure. Je n’écris ni pour l’audience, ni pour me faire plaisir. La subjectivité, je veux bien, mais la vulgarité, je m’y refuse …
Or donc, y'a lurette, le travail, il avait un sens, même si c’était chagrin, ce qu’il a toujours été, peu ou prou. Mais on savait pour quoi, comment et . Affirmatif ! Même à Boulogne-Billancourt, chez Renault. Y’avait de l’humain, nom de Dieu, un minimum ! On prenait compte, quoi qu’on dise ... Mais aujourd’hui, pauvret, t’es rien. Un numéro. Un matricule. Comme à l’armée. De la chair à canon du Nouvel Ordre Mondial. Une variable ajustable
… Quelqu’un sait-y pour quoi il taffe, de nos jours ? Et pour qui ?
Répondre tout de go pour le Grand Capital, les actionnaires, ça n’est pas suffisant. Et pis c’est pas nouveau.
Las, faut que j’entre dans le vif …

On ne travaille plus, on « fait » du chiffre ! Partout ! Dans tous les secteurs. Public comme Privé ... Oui, Public itou ! renseignez-vous, des hôpitaux à la police en passant par l’Education Nationale ; non-sens absolu, dérive, saloperie … Je pourrais contremultiplier les exemples précis et concrets, mais à quoi bon .. Vous les trouverez vous-mêmes… Penchez-vous donc sur votre condition de laborieux, votre propre expérience, vous verrez, c’est l’évidence.
Et alors, me direz-vous ? Où qu’il est le problème ? N’est-ce pas ...
Mais c’est LE problème, justement … Quand il s’agissait de travailler, bon an mal an, on vous reconnaissait une compétence, un savoir-faire, mais dès lors qu’il s’agit de « faire » du chiffre, de l’audience (car c’est bien ce que l’on nous demande, au fond) y’a plus de compétences, plus de savoir-faire qu’entrent en ligne de compte. Abolis ! Y’a plus que de la roublardise, de la biaiserie, de la tricherie en veux-tu, en voilà, voire de l’escroquerie à la Tapie, à la Séguéla, à la Messier. Des consultants, des conseillers, des commerciaux, partout. Payés rubis sur l’ongle … Bref, c’est la prime à l’incompétence, le fameux Principe de Peter. En plein dedans, nous sommes. Et depuis lustres.

Ceusses qui, aujourd’hui, sont « récompensés » pour grande majorité, sont des imposteurs.
Pour pas dire : des voleurs.

Comment pouvons-nous défendre un pouvoir d’achat, un salaire, des conditions de travail, une compétence, un savoir-faire, revendiquer quoi que ce soit, si nous sommes réduits à produire du chiffre ? Tant d’automobiles, tant de procès-verbaux, tant d’auditeurs, tant de bacheliers. C’est impossible ! Car c’est le chiffre qui commande. Toujours. Nous en sommes dépendants, totalement esclaves. C’est l’arbitraire-roi.
Vous pourrez arguer que vous avez sué sang et eau, justifier, démontrer, que tout, vous avez tout fait comme il était prévu, ordonné, planifié, vous serez perdants. Il est là, LE problème ... Bon sang, mais c’est pourtant (et, encore une fois) l’évidence ! …
Le mérite, celui qu’on nous vend et vante, c’est de l’attrape-couillons ! Car dans une affaire où SEUL le chiffre compte, le mérite véritable n’a plus sa place …

Ne nous étonnons point qu’on cause désormais d’un salarié, quel qu’il soit, comme d’une « variable d’ajustement » car c’est réellement ce qu’il est devenu, et ainsi qu’on le considère. Or donc, plus comme un humain. Juste un matricule.
Où avez-vous vu qu’un matricule était « récompensé » au « mérite » ?
Qui avons-nous cru pour que cela devienne possible ?
Quelle indignation, M. Hessel, est désormais envisageable, puisque nous avons accepté de n’être plus des salariés, mais des matricules ? Une variable …
Ce qui, de fait, rend obsolète ou risible tout syndicat, de la CGT à FO, en passant par SUD (oui, même eux) et la CFDT. Du folklore, voilà ce que c’est, le syndicalisme de maintenant. Que peuvent-ils donc défendre en ces conditions, sinon gérer, comme de vulgaires comptables ? C’est bien ce qu’ils sont, non, au demeurant : des comptables ? .. Voyez l’histoire des retraites, c’est parlant. Prenez un cégétiste de l’an mil neuf cent dix, mais aujourd’hui, on le traiterait de « terroriste ». Sûr ! ..

Il faut comprendre cette chose simple : dès lors qu’il n’y a plus que des matricules, producteurs de chiffres, il n’y a plus de travail. Ni de droit du travail. C’est là, le grand ouvrage patiemment élaboré par le Nouvel Ordre Mondial : supprimer le salarié. Le réduire à une variable. Un numéro. De la chair à camemberts PowerPoint. De la matière à statistiques. Ainsi, plus d’obstacle à la marchandisation à outrance, à la robotisation, plus de résistance, plus rien. Que du rentable ... J’avoue, c’est du grand art ! … Nous n’existons plus QUE quantifiés dans et par les instituts de sondages. Des chiffres bruts. Tant de ceci, tant de cela ... Va pleurer des droits, de la considération, du salaire dans cette configuration saloparde ! Allez donc crier aux injustices, on ne vous entendra point. Ni Aubry, ni Mélenchon, ni personne. Faut-il être embrigadé du cerveau pour ne pas le comprendre … Au moins, le tunisien, lui, il l’a pigée, l’entourloupe. Mais pour combien de temps ? Qui le vendra comme on nous a vendus (avec, nous concernant, notre lâche consentement) ? …

De fait, chacun saisira, aisément, que le premier camelot promettant de « réhabiliter le travail » sera élu. Et d’ailleurs, il l’a été à 53,06% des suffrages exprimés ! Mais sur méprise … Le salarié, qu’avait-il entendu ? Qu’enfin, le travail, le vrai, celui reconnaissant compétences, savoir-faire, je dirais même honnêteté, serait avec ce matamore, de retour. Et, cerise sur le gâteau, il lui était de surcroît annoncé que s’il « travaillait plus, il gagnerait plus » ! ... Comment vouliez-vous qu’il refusât cette « offre » ? Sauf que ..
… Il n’était nullement question de réhabiliter « compétences », « savoir-faire », ni même « honnêteté », mais …. de (continuer à) « faire » du chiffre. Plus encore qu’avant. Toujours plus. Et d’en être « récompensé » … Foutaises ! C’est impossible ! Seuls les roublards, les avides, les tricheurs, dans ce schéma, sont vainqueurs. Pis : ils nous sont désignés comme des modèles de « réussite ». Des exemples à suivre … En réalité, ils préservent le haut de la pyramide. Ils sont les arbres cachant la forêt. Celle d’injustices. Ecarts obscènes de salaires. Avantages fiscaux démentiels. Prospérité assuré. Des Servier, récompensés, médaillés. Sur le dos des matricules que nous sommes.

Le seul programme politique acceptable, demain, viendra de celui qui affirmera clairement qu’il mettra fin à cette abjection, ce non-sens, cette dictature du chiffre.
J’ai beau chercher, éplucher, écouter, lire, je ne vois toujours pas cet homme ET ce programme. Ils n’existent pas.
M'assurer du contraire, serait mentir. Ou pire encore.

.../...


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16 réactions à cet article    


  • ravachol 27 janvier 2011 10:23

    On c’est« fait mettre severe » ? un euphemisme,j’ai l’impression d’avoir eu le fondement massacre
    facon« big bang »


    • Francis, agnotologue JL 27 janvier 2011 11:07

      Excellent, sur la forme, sur le fond.

      Comment ne pas citer ici (Jean-Pierre Berlan) :

      « Sérieusement, vous croyez vraiment que Peugeot produit des voitures, Michelin des pneumatiques et Aventis des médicaments ? Bien sûr que non ! Ils produisent des profits« . »

      Même le public dites vous !? En imposant la culture du résultat dans la police, en 8 ans Sarkozy a multiplié par 4 le nombre de gardes à vue. Avec la »réforme" de ladite garde à vue qui prévoit la présence d’un avocat pendant toute sa durée, par combien a-t-il multiplié le chiffre d’affaire de la profession de ses collègues ? On aimerait bien le savoir !


      • drlapiano 27 janvier 2011 16:47

        Quand je lis un tel torrent d’absurdité deux mots montent en moi « pauvre type » ( et c’est pour rester poli) ... et il c’est trouvé 15 c... sur 16 (à l’heure ou j’écris) pour mettre un plus à ça !
        Effarant.


        • PhilVite PhilVite 27 janvier 2011 17:22

          Ou un con sur 16 pour mettre un moins à ça. Tout dépend de quel côté de la connerie on se place...


        • ravachol 27 janvier 2011 19:23

          dans votre cas,je pense que vous avez besoin d’un rapport dominant a domine,
          Je vous assure pourtant que vou pouvez vivre libre et sans maitre.....


        • djanel Le viking- djanel Le viking- 27 janvier 2011 21:40

          drlapiano si toi pas con essaie donc d’écrire comme ça.


        • Francis, agnotologue JL 28 janvier 2011 08:43

          Si l’on en croit celui qui dit que c’est un plaisir de d’être pris pour un imbécile par un idiot, drlapiano a ici rendu heureux 15 gourmets !

           smiley


        • fhefhe fhefhe 27 janvier 2011 19:00

          Tout est numérisé....afin de mieux chiffrer la tempêrature sociale !!!!!! 

          Combien ???
          Combien ???

          ô combien de 0 après l’unité pour être socialement respecté ?
          ô combien de 0 avant l’unité pour être soigné par une molécule ?

          La plus belle invention n’est pas la Roue mais le chiffre 0 . Sans lui pas de langage basique ...binaire , pas de % , pas de relativité ETC...

          LE ZERO a été crée pour REMPLIR le VIDE entre les autres chiffres .








           


          • ddacoudre ddacoudre 27 janvier 2011 23:56

            bonjour philippe
            tout est dit, mais peu l’entendront, un jour j’ai écrit un article « nous ne survivrons pas à une société qui ne réduit l’existence humaine qu’à une valeur comptable »http://www.agoravox.fr/ecrire/?exec=articles&id_article=63736.
            cordialement.



            • kemilein 28 janvier 2011 00:34

              ddacoudre
              tout n’est pas dit, loin de la. loin s’en faut.
              c’est un article sur le chiffre, le nombre, la numérologie prédictive du profit éminent a court terme sans conséquence et considération sur les effet produits et induits.

              oui m’sieur, bonhomme serge (dont je viens de lire un autre de ses beaux textes), oublit aussi et surtout de dire que le travail c’est mort.. oui oui.
              l’avenir (qui existe deja pour nombre de secteur) est l’automatisation (donc plus de main d’oeuvre > donc plus de salariat).
              la question est : doit-on, donc, laisser la production au secteur privé ? ou l’abolir au profit de la collectivité, de la chose-publique-commune et de l’intérêt général ?

              -soit vous choisissez de laisser l’homme asservi au travail (torture) (tel qu’il est aujourd’hui)

              -soit vous choisissez que l’homme devenant inutile pour la production, n’a donc plus salaire > donc plus de consommation (meme dans un cadre écologique, utopique) > donc il meurt littéralement

              -soit alors vous allez vers la solution la plus évidente et pragmatique > la production devient au service de l’homme et de l’intérêt général, le début du communisme. Suppression de la propriété privé.


              • kemilein 28 janvier 2011 00:35

                youps c’est m’sieur Sage et non Serge... chacun ses tares hein :)



                • Yérémiah Yérémiah 28 janvier 2011 02:24

                  « Les politiques ne manquent jamais une occasion de faire l’éloge de la créativité, de la volonté, du talent qui déplace les montagnes, du dynamisme... Ils omettent de préciser que le seul dynamisme qui les fascine réellement, c’est celui du renard dans le poulailler. Et que les poules, il les leur faut aussi apathiques et neurasthéniques que possible. » Mona Chollet


                  • jaja jaja 28 janvier 2011 09:18

                    « Même à Boulogne-Billancourt, chez Renault. Y’avait de l’humain, nom de Dieu, un minimum ! On prenait compte, quoi qu’on dise ... »

                    Pour avoir travaillé sur les chaînes de Renault dans les années 1970 je peux vous dire que l’humain de la part du management... manque de respect permanent envers les OS et pour les récalcitrants opposés au « chiffre » (les cadences) la répression, voire la milice...
                    Milice qui d’ailleurs assassina Pierre Overney abattu comme un chien devant l’usine pendant une distribution de tracts qui a mal tourné...
                    Bref l’humain chez Renault....

                    Ce qui a changé c’est que cette culture du chiffre touche aujourd’hui des couches sociales qui n’y étaient pas habituées à ce point... Rien d’autre !


                    • Miss Fischer-Brown 30 janvier 2011 15:38
                      Philippe, votre écriture est agréable à lire. Ceci étant dit, je dirais que, en prenant connaissance de l’Histoire de l’humanité et en l’analysant, les travailleurs ont toujours servis à faire du chiffre pour enrichir leurs riches patrons et propriétaires. La seule alternative que je vois pour arrêter ce processus de servage est dans la création d’entreprises coopératives géraient par l’ensemble de ceux et de celles qui y travaillent. Mais je reste ouverte à toutes autres idées d’alternative qui respecteraient le partage des bénéfices issus du travail à tous et, bien entendu, la solidarité des travailleurs entre eux, en cas de maladie, d’accident. 
                      Si vous ne l’avez pas encore lu, je recommande le livre de Monique et Michel Pinchon, Le président des riches, enquête sur l’oligarchie dans la France de Nicolas Sarkozy. 

                      Les liens de sang entre les entreprises du cac40

                      Au plaisir de vous relire.

                      petite chanson :

                      Le soleil s’est posé là-haut, 
                      Léger comme un matin de Pâques. 
                      Moi, je suis couché sur le dos, 
                      Dans mon hamac. 

                      Ça dure depuis des années, 
                      C’est dans mon signe du Zodiaque. 
                      Peut-être même que je suis né 
                      Dans mon hamac. 

                      Parfois je voudrais travailler, 
                      Mais y’a ma flemme qui contr’attaque 
                      En me glissant un oreiller 
                      Dans mon hamac. Oui, c’est ça, mon vieux. 

                      D’ailleurs, à voir les autres faire, 
                      Je sens bien que ça les détraque. 
                      Moi, j’ai une santé de fer 
                      Dans mon hamac. 

                      Je n’ai pas froid, je n’ai pas chaud, 
                      Je n’ai pas faim, je n’ai pas soif. 
                      Le vent tendrement me décoiffe 
                      Et vient me caresser la peau. 

                      Oui, mais l’argent, faut pourtant l’ trouver, 
                      Mais j’ai plus d’un tour dans mon sac : 
                      Je m’fais payer pour le brevet 
                      De mon hamac. 

                      C’est un hamac étudié pour, 
                      Suspendu comme une Cadillac, 
                      Presque une maison, un nid d’amour 
                      Que mon hamac. 

                      Aussi lorsqu’il y a dans l’air 
                      Un doux parfum aphrodisiaque, 
                      On peut voir les feuilles à l’envers 
                      Dans mon hamac. 


                      Mais s’il y a de la place pour un, 
                      Quand on est deux, ça change et crac. 
                      Tout compte fait on est aussi bien 
                      Sur l’herbe !




                      • Un Franc Pek 31 janvier 2011 01:42

                        mais chers amis, ne l’aviez vous point deviné, tous cela porte un nom : Le fruit de la démocratie, soit, sous le prétexte hautement respectable des droits de l"homme, le droit de voter pour des gens qui vont renforcer l’état de droit et par conscéquent celui de se faire mettre sevère !

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