Du porno à l’école ?
A peine en fonction au Bureau de l’égalité du canton suisse de Zürich, le délégué aux questions masculines lance un pavé dans la mare. J’ai failli éclater de rire. D’abord, disons-le tout net : les hommes ne sont pas des cochons et les femmes ne sont pas des pimbêches. Enfin parfois si. Mais c’est normal. Hommes et femmes n’abordent pas la sexualité sous le même angle. Et ce n’est pas que cul-turel. Non, je ne ferai pas de dessin...
Expliquer cela aux adolescents, leur dire quelles sont les modes de fonctionnements prévalents et les règles du jeu, pourquoi pas ? Si cela peut améliorer les relations entre femmes et hommes, j’abonde.
Le fond
D’un côté je me dis que si les ados regardent de toutes façons du porno, autant que ce soit dans des conditions pédagogiques. Car les images servent bien sûr à éveiller une excitation normale à cet âge, mais aussi à voir comment l’autre est fait ou faite et comment cela marche. Quand j’avais 13 ans, avec mes copains on fauchait un magazine de mode à l’une de nos soeurs et on regardait les pubs de femmes en soutien-gorge ! La curiosité pour le sexe et le corps est normale.
L’intérêt des images est de montrer les représentations de la relation sexuelle selon chaque sexe. On montrerait que les femmes ont souvent besoin de temps, de montée progressive, même si parfois elles sont aussi excitées par un coït vite fait à la hussarde à la cuisine avant que les pâtes ne débordent, ou dans un ascenseur (il faut quand-même plus que deux étages...). On montrerait aussi que les hommes ont une belle impulsivité mais qu’ils gagnent parfois à prendre leur temps. Le plaisir partagé est plus intense. On déculpabiliserait ceux qui ne tiennent pas plus de quelques minutes : les acteurs qui durent une heure se sont beaucoup entraînés ! Et ils font des pauses.
A partir des images on pourrait aussi parler de la taille des pénis, question souvent angoissante pour les jeunes mecs. Les acteurs pornos étant choisis dans les haras, ils n’ont que peu à voir avec l’humain lambda. Mais un pénis moyen peut être tout aussi efficace. D’autant que le vagin s’adapte et que la conjonction des désirs fait monter les sensations.
De l’autre côté, on demande encore à l’école d’éduquer à la place des parents. Ce qui me dérange. Et puis mettre ensemble les filles et les garçons ne serait peut-être pas une bonne idée. Il me paraît préférable que chacun connaisse les mystères de la sexualité mais qu’à deux ils aient l’impression de les découvrir. Si les deux ont fait le même cours, on peut s’attendre à ce que l’un ou l’une dise à l’autre : « Non, pas comme ça, tu as vu ». Et qu’en place d’inventer leur propre modèle, ils se moulent dans les images et soient moins eux-mêmes.
Et puis il me semble avoir lu quelque part que les hommes seraient assez sensibles à l’excitation par les images, et les femmes le seraient plus aux mots et aux situations. Ce n’est pas absolu. Et bien des femmes aiment se voir pénétrées. Il faudrait donc choisir des films où il y a un vrai érotisme, pas seulement un mouvement de piston avec des cris surajoutés. Il faudra enfin que les profs femmes et hommes sachent ne pas montrer d’émotion après le film...
La forme
Je trouve très amusant que ce soit Monsieur Egalité de Zürich, Markus Theunert, qui lance cette proposition. Lui, homme fin et sensible, psychologue de métier, montre aussi de l’audace et ne craint pas la confrontation. Un mec, quoi ! Pour faire le pendant des fémrads professionnelles qui ont décrété que l’égalité leur appartenait en propre, il faut bien un mâle qui sache marquer son territoire. (ô‿ô)
Et là il le marque fort. Surtout quand on sait que nombre d’abolitionnistes de la prostitution se recrutent chez les fémrads. Les voici devant une question qu’elles contournent habituellement : la pornographie est-elle de la prostitution ? Vont-elles se dresser contre cette proposition au nom de la représentation de la femme dans le porno ?
Et les hommes se dresseront-ils contre la représentation de l’homme dans le porno ?
Non bien sûr, les hommes n’ont rien contre le porno, au contraire. A croire que leurs femmes se sont tellement refusées à eux, ou ont mis tellement de conditions au sexe, qu’ils ont besoin d’images crues pour respirer un peu.
J’exagère, bien sûr. Enfin j’espère. Les filles ne sont pas de simples rabats-joie face à des hordes de fauves en rut. Parce que si je n’exagère pas, alors la proposition de Markus Theunert est peut-être une manière d’aider à comprendre que le désir de l’homme et celui de la femme sont pareillement importants.
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