EDF & Europe « Des prix les plus bas possibles » +20%
Le 25 juin dernier, le Conseil européen a adopté à l’unanimité le paquet de mesures législatives concernant le marché intérieur de l’énergie, approuvant tous les amendements adoptés par le Parlement européen en deuxième lecture. Tous les textes concernant l’énergie se trouvent ainsi entérinés.
Dans son communiqué, le Conseil précise "La nouvelle législation vise également à mieux protéger les consommateurs d’énergie et à les faire bénéficier des prix les plus bas possibles en matière d’énergie". Ça ne s’invente pas.
C’est au nom de cette législation que la France a été contrainte de privatiser EDF-GDF, qui a été éclaté en sociétés anonymes EDF, RTE et GDF. Ce service public était pourtant envié de tous les pays du monde et les Français y étaient attachés, à juste titre. Encore une fois, c’est au nom de la construction européenne qu’il était soudain indispensable de détruire ce qui fonctionnait.
Héritant de ces entreprises exceptionnelles (GDF et EDF sont classées respectivement 2e et 4e entreprises mondiales du secteur), et dans l’esprit de José Manual Barroso qui déclarait à la tribune de l’Assemblée nationale que "les Français n’avait pas a avoir peur de la mondialisation", Les directions d’EDF et de GDF ont cessé de raisonner en "service public" pour devenir de vraie entreprises libérales, agissant dans un système ouvert. Ainsi EDF a investi en Angleterre en Belgique et au USA.
Pour quels résultats ?
1. En Angleterre
EDF avait acquis la totalité de British Energy pour 15 milliards d’euros à l’automne dernier tandis que tous les experts valorisait l’entreprise entre 3 et 5milliards d’euros maximum... Le conseil et des actionnaires minoritaires étant hostiles à cette entrée, EDF a dû recéder 20% du capital pour 2,5 milliards, soit un rabais de 16,6% et une perte immédiate d’1/2 milliard d’euros. L’aventure libérale britannique d’EDF commence par coûter très cher... aux Français.
2. En Belgique
EDF devait racheté 50% du capital de Segebel détenu par GDF, entité qui possède 51% de SPE, pour 515 millions d’euros. (GDF et SUEZ étant contraint de vendre par la Commission qui, additionnant les parts de marché des deux groupes, considérait qu’il y avait entrave à la concurrence...) Mais le britannique Centrica a décidé d’exercer son droit de préemption et se retrouve ainsi avec 51% de SPE. Mieux, il se paie aussi pour 105 millions d’euros les centrales nucléaires contrôlées par la compagnie Electrabel, filiale de Suez. (dans le cadre de l’accord "Pax Electrica 2"). Les Anglais font les bonnes affaires et se servent avec une indéniable rouerie des contraintes européennes, tandis que les Français sont les dindons de la farce.
3. Aux États-Unis
EDF avait annoncé à la mi-décembre 2008 l’acquisition pour 4,5 milliards de dollars d’environ la moitié des activités nucléaires de Constellation Energy, alors convoité par l’investisseur milliardaire Warren Buffett. En réalité, avec la crise, Constellation ne valait pratiquement plus rien et l’action avait même perdu 60% de sa valeur en une semaine en septembre 2008. Mais le milliardaire Waren Buffet s’était soudain découvert une passion pour le nucléaire et avait fait courir une rumeur du rachat de la totalité du groupe. Dans la foulée, les fins investisseurs d’EDF, avaient surenchéri - avec l’argent public français - et le milliardaire s’était effacé, non sans avoir rendu un fier service à Constellation qu’EDF aurait eu pour une bouchée de pain sans son intervention.
Comme si cela ne suffisait pas, la Commission du Service public de l’État du Maryland a estimé que le groupe français allait acquérir "une influence substantielle" dans une filiale du groupe, Baltimore Gas & Electric (BGE), d’où la nécessité d’obtenir une autorisation. Même les nuls en géographie auront compris que l’État du Maryland ne fait pas partie de l’Union européenne. Évidemment, Constellation a fait appel de la décision, ses dirigeants ne voulant pas rater ses pigeons français pour quelque considération souverainiste de l’État du Maryland.
Conclusion
Chez EDF on sait faire de l’électricité, mais au Monopoly euro-mondialiste, soit on est franchement nul, soit on le fait exprès, ce qui serait plus grave... mais aussi beaucoup plus probable[1].
Mais ces pertes abyssales - qui ne sont pas perdues pour tout le monde - EDF a trouvé le moyen génial de les combler : il suffit d’augmenter les tarifs en France pour continuer de se rater au grand jeu de l’euro-mondialisation !
Le PDG d’EDF réclame donc une hausse de 20% et fait valoir que l’électricité en France est « 30 à 40% moins chère que dans les autres pays européens » et que sans rattrapage, le groupe, lourdement endetté, ne pourra pas financer ses nombreux investissements. La ministre de l’économie (qui aurait appris cette demande en lisant le journal, défense de rire) fait mollement semblant de s’opposer puis déclare qu’il faudrait « envisager des hausses tarifaires » pour financer les investissements d’EDF.
Quand la France sera redevenu un pays normal (Définition : un pays "normal" est un pays gouverné par des dirigeants qui défendent ses intérêts et non les leurs, ni des intérêts privés ou étrangers) il faudra que tous ceux qui sont responsables de la dilapidation du patrimoine national rendent des comptes, avec les mêmes règles de droit, la même rigueur et la même mansuétude qui s’appliquent à tous les justiciables.
Dans l’immédiat, on attend au minimum de la représentation nationale que soit créée une commission d’enquête parlementaire qui devra faire la lumière sur les investissements d’EDF à l’étranger et que soit sérieusement envisagée la nationalisation rapide d’EDF.
Jean-Yves CREVEL
[1] Cette nullité ou cette servilité à des intérêts toujours étrangers semble être la ligne directrice de la stratégie d’EDF.
Ainsi, quand le KW nucléaire coûte moins de 0.04 € et que le prix de vente moyen est de 0.06 €, EDF rachète 0.08 € le KW éolien.
Pourquoi EDF choisit de perdre 2 centimes par KW, soit une subvention annuelle de 2 milliards d’euros ?
Pourquoi EDF a interconnecté son réseau ?
La vraie raison est allemande. Les allemands ont refusé le nucléaire et ont opté pour des énergies vertes, énergies qui ont l’inconvénient majeur d’être produite en dehors des pics de consommations.
La particularité de l’électricité étant de ne pas être stockable, cette très « politiquement correct » orientation écologique allemande n’était possible qu’à la condition de disposer de la production du parc nucléaire français. On peut défigurer tous les paysages d’Europe, tant que le vent ne souffle pas l’hiver quand il gèle, il faut construire autant de centrales thermiques à énergies fossiles pour faire face aux pointes de consommation.
En gros, les allemands sont contre le nucléaire chez eux, mais ne voient aucun problème consommer l’électricité des centrales françaises. Ceci est déjà choquant. Mais que pour le masquer, on suive cette politique de multiplication d’éoliennes économiquement indéfendables en générant des pertes structurelles en croissance régulière, c’est simplement délirant.
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