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Éducation nationale - Une autre exception française : des classes surchargées

Le cri de colère d'une collègue enseignante.

Le ministre se vante que seule la France en Europe laisse en ce moment ses écoles ouvertes, mais il se vante moins d'une autre réalité : seule la France en Europe a des classes aussi chargées. Et pourtant, le maintien de l'ouverture des écoles nécessite de passer à des « demi-jauges ». C'est reconnaître qu'habituellement, cette jauge n'est pas acceptable.

Jean-Michel Blanquer se gargarise des CP à 12 élèves, sa fierté, mais il passe sous silence qu'ensuite, du primaire au lycée, les classes ont les effectifs les plus lourds d'Europe. Au lycée, 35 élèves par classe ! Parfois 40, dans les « bons » lycées ! 40 élèves par classe, cela fleure bon l'école primaire à l'ancienne, celle de Truffaut avec blouses et coups de règles sur les doigts. Cela provoque surtout la stupeur de la part de nos collègues européens lors d'échanges scolaires : les petits Suisses par exemple n'en reviennent pas de ce qu'est une classe normale en France ! Et les Français n'en sont eux-mêmes pas revenus, lorsqu'en début d'année scolaire, ils ont vu des vidéos prises dans les collèges et lycées : on connaissait le métro aux heures de pointe, on connaissait moins la cohue des entrées dans les écoles, les bousculades dans les couloirs, la cantine aux heures de pointe. Tant de monde, de bruit, de chaos, partout, tout le temps !

C'est cela la réalité du système scolaire actuel, alors, face à l'épidémie, il a fallu passer aux demi-groupes, au lycée seulement, pas ailleurs (pourquoi ?). À cette occasion, le ministre nous a permis une expérimentation in vivo des plus réjouissantes. Les mêmes groupes d’élèves divisés par deux changent du tout au tout. Dans un climat apaisé et serein, la concentration devient une donnée quasi naturelle, le travail moins pénible, pour eux, comme pour les professeurs, le suivi individuel réel et pas une directive jamais appliquée car jamais applicable. Le plaisir d'enseigner renaît ! Nous étions si nombreux à l'avoir oublié !

Un pays soucieux de sa jeunesse en tirerait une leçon exemplaire en anticipant la rentrée prochaine pour, dès maintenant, penser à soulager les effectifs, à recruter massivement. Mais il n'en est rien, la vaccination des enseignants, si elle a lieu d'ici septembre, permettra surtout de retrouver les mêmes conditions d'enseignement : des classes bourrées au maximum. Car, comme dans le milieu hospitalier, la crise sanitaire est juste un mauvais moment à passer : on croise les doigts, et on continue à fermer des lits, et au lycée, on continue à supprimer des postes, le recrutement de titulaires baisse, et on n'hésite pas à faire appel au Bon Coin pour trouver un remplaçant pour quelque temps.

Durant la tempête, Blanquer tient son cap. Gestionnaire néo-libéral, il poursuit sa mission. Sa réforme, destructrice des filières et d'un bac national, a pour principal objectif de supprimer des postes. Et ça marche du tonnerre !! Les proviseurs doivent gérer la pénurie. Alors, cette année, on supprime quoi ? Le japonais ou le latin ? Les TP de physique-chimie ou de biologie ? Des demi-groupes en maths ou en anglais ?

Après avoir « tenu » face au virus, il nous faudra de nouveau à la rentrée juste songer à tenir nos classes.

Cessons enfin d'être exceptionnels ! Reconstruisons modestement une école à taille humaine. Comme le pensait Protagoras, « l'homme est la mesure de toute chose ». Chiche ? 

V., professeur de philosophie

 

Note de Jordi Grau : Même en ce qui concerne les classes de CP, Jean-Michel Blanquer n'a pas de quoi être si fier, car sa mesure ne concerne que les écoles classées "REP+" (label permettant à une partie des établissements défavorisés de recevoir une aide supplémentaire).


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14 réactions à cet article    


  • amiaplacidus amiaplacidus 27 mars 2021 16:52

    Gageons qu’il y a une corrélation positive entre les classes surchargées et les piètres résultats français dans le classement Pisa.


    • Abou Antoun Abou Antoun 27 mars 2021 18:38

      Le surchargement à supposer qu’il existe n’est pas la cause véritable.

      Lorsque je relis quelques documents de ma période scolaire (années 50-60) je vois au collège et au lycée des effectifs de 40-45 et l’enseignement (public) était de qualité.

      Nous n’avions pas de locaux non plus (préfabriqués érigés dans les cours de récré). Il ne faut pas chercher des raisons matérielles. C’est bien plus grave.


      • waymel bernard waymel bernard 27 mars 2021 21:08

        Bien qu’agrégé, j’ai eu à terminer ma carrière à la tête d’un lycée professionnel, une vengeance de l’administration. J’ai découvert des classes de 36 élèves absolument ingérables. Oui mais, me disaient les inspecteurs hors-sol, il y a pas mal de dédoublements et ça permet aux enseignants de souffler un peu. Et si l’on avait constitué des classes de 25 élèves sans dédoublement qui n’auraient pas globalement coûté plus cher n’aurait-on pas permis aux professeurs d’enseigner dans des conditions correctes pendant toute la durée de leur service ? 25 élèves par classe, ce sont les effectifs que j’ai pu constater lors de différentes rencontres avec des chefs d’établissement de Hongrie, Bulgarie ou Roumanie. Des classes studieuses. Mais il est vrai que ces pays ne sont pas submergés par l’immigration extra-européenne. qui tire le système éducatif vers le bas.


        •  C BARRATIER C BARRATIER 28 mars 2021 19:59

          @waymel bernard
          « Bien qu’agrégé » ?Pourquoi serait ce une vengeance de l’administration de vous mettre à la tête d’un lycée professionnel ? Quel est le rapport entre un diplôme d’agrégé et le profesionnalisme d’un proviseur ??Si les lycées professionnels sont plus difficiles à gérer car trop d’élèves y sont « orientés » par force, il leur faut les meilleurs proviseurs ! Je serais tenté de vous complimenter !


        • Beauceron Vers Saint-Gétorix 29 mars 2021 09:46

          @C BARRATIER
          J’ai été détaché un an en lycée pro à Dreux : le jeune proviseur porteur de projets venait de partir, il était remplacé par une baudruche qui dormait dans son bureau, harcelait les jeunes profs, était incapable de remplir un dossier et s’est même permis un arrêt-maladie au moment d’être inspectée par l’IPR-EVS ! Aujourd’hui elle est toujours « personnel de direction » mais rétrogradée comme adjointe dans un collège de campagne où elle doit passer ses journées à cueillir les fraises...


        • BA 27 mars 2021 23:18

          Lycée de Drancy : 54 lycéens sont contaminés par le coronavirus, 20 parents d’élèves sont morts.


          Drancy : décrivant une «  situation alarmante » face au Covid, des enseignants demandent à Macron la fermeture de leur lycée.


          Ils ont écrit une lettre au président de la République et au ministre de l’Éducation nationale, réclamant une fermeture immédiate. Une vingtaine de lycéens ont perdu un de leurs parents depuis le début de la crise.


          « Nous réclamons la fermeture urgente et temporaire de l’établissement, avec un basculement total en enseignement à distance pour assurer la continuité pédagogique ». Ainsi débute la longue lettre envoyée le vendredi 26 mars au président de la République par les enseignants du lycée Eugène Delacroix de Drancy, en Seine-Saint-Denis, rapporte France Bleu. L’équipe pédagogique y signale notamment une « situation sanitaire alarmante » au sein de l’établissement depuis la rentrée du 1er mars.


          Depuis plusieurs semaines, les enseignants du lycée Delacroix ont mis en place un rituel : à 10 heures, midi et 14 heures, tous se réunissent en salle des profs pour faire le point sur la situation sanitaire. « Nous voulons alerter sur le drame que vivent certaines familles et sur l’ambiance très anxiogène qui règne dans notre lycée depuis quelques semaines », rapporte au Figaro Fabrice Morel, enseignant au lycée Delacroix et délégué du SNES-FSU 93.


          Dans la salle, un grand tableau est accroché au mur, pour marquer les absences. « Je n’ai jamais vu ce tableau aussi rempli, on n’a même plus la place pour écrire le nom de tous les enseignants absents. On voit constamment le nombre d’élèves et de collègues absents augmenter drastiquement », confie le professeur.


          « Nous, les enseignants, nous sommes inquiets, mais les élèves et les parents aussi. Il y a une vraie angoisse partagée », témoigne Fabrice Morel, qui constate que les lycées en Seine-Saint-Denis constituent de véritables « clusters ». « Il y a une densité de population très forte au lycée Delacroix avec des élèves qui viennent de populations peu favorisées. Ici, le risque de contamination est accru par rapport aux autres établissements, puisque les parents ont des métiers où ils sont exposés : les premières lignes, ce sont les parents de nos élèves », raconte ce professeur de lycée, qui confie avoir une élève dont la mère cumule trois métiers en une journée. L’enseignant en est convaincu, il existe « une vraie comorbidité entre ces métiers à risque, où les parents sont en contact avec de nombreuses personnes, et la circulation du virus au sein des établissements du 93 ».


          Au lycée Delacroix, ce sont quotidiennement 2000 élèves qui se croisent dans les couloirs, et environ 70 professeurs par jour. Mais, depuis lundi 22 mars, plus d’une trentaine d’entre eux ont exercé leur droit de retrait. En cause : le nombre croissant de cas de contamination. En témoigne la vingtaine d’élèves dont au moins un parent est décédé du Covid-19 depuis le début de la pandémie.


          « Nous sommes au pied du mur », déplore Blandine Paulet, co-secrétaire du SNES-FSU 93, « c’est pourquoi nous demandons une fermeture ponctuelle pour reprendre ensuite le travail avec moins d’élèves et d’enseignants, pour éviter que l’épidémie ne se propage aussi rapidement ».


          Hier soir, Fabrice Morel a écouté attentivement les déclarations du ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer : « sachant que les classes à présent fermeront dès le premier cas positif, cela signifie que lundi, j’ai deux classes de seconde que je ne verrai plus pendant 15 jours et 3 groupes en première et terminale qui ne seront plus présents », explique le professeur, qui, comme la plupart de ses collègues, se dit sceptique face aux mesures.


          « Longtemps on a entendu dire que le virus ne circulait pas dans les établissements scolaires, ce qui est faux. Les enseignants veulent arrêter de mentir », commente Blandine Paulet.


          « Non, nous ne sommes pas protégés par un protocole sanitaire renforcé. Non, la distanciation sociale n’est pas respectée dans les classes où nous nous retrouvons parfois avec 35 élèves. Non, réaliser un brassage des élèves n’est pas possible. Non, il n’y a pas de véritable nettoyage des locaux puisque cela nécessite du personnel supplémentaire que nous n’avons jamais vu venir. Enfin, la notion de demi-jauge est très floue et appliquée de manière très disparate. C’est pourquoi nous souhaitons, en exerçant notre droit de retrait, que le ministre prenne ses responsabilités et que des décisions soient prises de manière claire et surtout contraignante », poursuit-elle, soulignant que les enseignants « tiennent à leur santé et la santé de leurs proches ».


          D’après le bilan hebdomadaire publié vendredi 26 mars par le rectorat cité par France Bleu, 3696 élèves sont actuellement contaminés au sein de l’académie de Créteil et, parmi le personnel enseignant, 857 personnes sont positives au Covid-19.


          https://www.lefigaro.fr/actualite-france/drancy-decrivant-une-situtation-alarmante-face-au-covid-des-enseignants-demandent-a-macron-la-fermeture-de-leur-lycee-20210327


          • chantecler chantecler 28 mars 2021 07:54

            @BA
            Et comment auraient il pu échapper au moindre contage avec le virus qui est si contagieux , et banane ?
            Mettre tout le monde à l’abri est une vue de l’esprit .
            Et avec tous les recombinants et variants, dans 25 ans on y sera encore .
            La seule solution est de pouvoir traiter ceux qui font la maladie et de limiter la casse .


          • troletbuse troletbuse 7 avril 2021 23:46

            @BA
            20 parents d’élèves sont morts.

            Une fake-news que vous répetez comme un perroquet.
            D’ailleurs si c’était vrai, on en parlerait encore. Donnez vos sources
            Ils ont du aller chercher les grands et grands-grands parents de toutes les familles de tous les élèves du lycée.


          • troletbuse troletbuse 7 avril 2021 23:47

            @troletbuse
            Ils ont même fait les cimetières  smiley


          • le cathare 28 mars 2021 17:12

            on paye les impôts et taxes les plus élevés de la planète et on a les fonctionnaires , police , éducation nationale, infirmières et médecins les plus mal payés de l’OCDE

             des classes surchargées ,, manque de personnel hospitalier,,,,manque de policiers pour reprendre les territoires perdus,,,mais ou passe le pognon ??? dans …l’immigration

            on ne s’en remettra jamais, il est trop tard


            •  C BARRATIER C BARRATIER 28 mars 2021 20:05

              @le cathare
              S’agissant de l’Education nationale, nous sommes aussi le pays où les élèves ont le moins d’heures de classe dans l’année. Si les cours servent à quelque chose, ce que je pense, alors le pouvoir organise le retard des élèves par rapport à tous les autres pays. Dans le primaire, on fait pire, en concentrant la semaine sur 4 jours, alors qu’après 3 h de cours les élèves commencent à être saturés.Vacances ? Journées sans classe dans la semaine : toujours plus !


            • Beauceron Vers Saint-Gétorix 29 mars 2021 09:42

              @C BARRATIER
              Le grand tabou est la prise en charge des élèves « difficiles » et perturbateurs, de plus en plus nombreux en primaire, ce qui pourrit le « climat scolaire ». Les enseignants ne sont ni pédopsychiatres ni assistantes sociales. 
              Quant aux rythmes scolaires français, ils sont la conséquence du travail des femmes (ce n’est pas un jugement de valeur) et du refus de prendre en charge le temps libre des enfants par les collectivités.


            • JulietFox 29 mars 2021 12:27

              @C BARRATIER
              Un peuple instruit est difficile diriger._


            • Francis, agnotologue Francis, agnotologue 29 mars 2021 12:33

              @JulietFox
               
              ’’Un peuple instruit est difficile diriger. ’’
               
              « Aux yeux d’un commerçant, un consommateur averti en vaut la moitié d’un. » Albert Brie (écrivain et humoriste québécois)

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Jordi Grau

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