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Egalité, justice et dopage

A l’heure où la suprématie étonnante de l’équipe Sky sur le Tour de France fait resurgir les suspicions de dopage autour du cyclisme, certaines questions se posent : pourquoi le dopage existe ? Et pourquoi faudrait-il absolument l’éradiquer ?

Oui, ces questions peuvent paraître idiotes. C’est le but. Le dopage naît avec l’esprit de compétition. Et que chaque compétiteur, quel que soit le sport, cherche à être le meilleur. Quel sentiment peut être pire pour un compétiteur que de revenir chez lui après sa course, après son match,  et de devoir annoncer à ses proches : « Non, je n’ai pas pu suivre », « Je suis moins bon ». Il n’y a pas de place pour les seconds, et seule la victoire est belle, alors si quelque chose peut vous permettre d’être meilleur, de monter en haut de l’affiche, cette pomme a l’air si succulente qu’elle ne demande qu’à être croquée.

Ce phénomène n’est d’ailleurs pas propre au sport. Cette volonté d’excellence, de ne pas être limité par ses propres capacités est inhérente à l’espèce humaine. C’est le cas à l’école, où la majorité des étudiants a déjà triché un jour à un examen : je n’arrive pas à retenir cette formule, pourquoi ne pas l’écrire sur un bout de papier et la glisser dans ma trousse le jour du contrôle ? Pourquoi devrais-je être bloqué dans mes études par le simple fait que ma mémoire est moins bonne que celle d’un autre ? Et surtout, en quoi est-ce juste ?

Einstein disait qu’on ne juge pas un poisson à sa capacité à grimper aux arbres : pourquoi la réussite scolaire tiendrait principalement à des caractéristiques innées, comme le fait d’avoir une bonne mémoire, d’avoir des facilités dans certaines matières, ou bien le fait d’être né dans une famille aisée, avec un accès à la culture et une ouverture d’esprit le plus souvent bien plus important que dans certains milieux populaires  ? Bien sûr, le travail a également une place importante dans la réussite scolaire, mais peut-on nier la place des critères cités dans cette même réussite ? Pourquoi ces critères seraient-ils les bons, et au nom de quoi ? La justice ? L’égalité ?

Le nouveau gouvernement n’a que ces mots à la bouche. L’égalité.  La justice. Le redressement dans la justice. Mais comment faire alors que notre société est si inégalitaire et si profondément injuste dans sa nature même ?

Mais l’inégalité et l’injustice est également présente dans le sport. Mon cœur bat à soixante pulsations à la minute. Celui de Pierre Rolland, cycliste dans l’équipe Europcar et vainqueur de l’étape de la Toussuire cette année, bat à trente-cinq pulsations par minute. Malgré tout le travail que je peux fournir, j’aurais toujours ce désavantage, ce handicap, parce que mon cœur bat naturellement plus vite qu’un autre. Pourquoi alors qu’aujourd’hui il existe des médicaments qui permettent au cœur de ne pas s’emballer, devrais-je laisser ce handicap inné ternir mes performances sportives ?

Pourquoi rejeter à ce point le dopage alors qu’il nivelle les performances ? Qu’il permet à chacun d’accéder au plus haut niveau ? N’est-ce pas la morale de notre société contemporaine, d’offrir à chacun, quel que soit ses dispositions innées, la possibilité d’arriver au plus haut niveau ? Les progrès de la médecine ont supprimé la sélection naturelle darwinienne chez l’espèce humaine. Ce n’est plus le plus fort, le plus adapté qui survit, chacun a désormais sa chance, malgré les gènes défectueux qu’il possède.

La lutte contre le dopage vient finalement de deux phénomènes. Le premier, un souci d’égalité et de justice entre tous les concurrents, est, on l’a vu, totalement hypocrite, puisque c’est au contraire le dopage qui permettrait d’obtenir une certaine égalité entre les concurrents. Le deuxième est un souci de préserver la santé des sportifs : il vient d’une sorte de tournant paternaliste de notre société qui a décidé de nous protéger contre tout, y compris contre nous-même : attention à ne pas trop boire, à ne pas fumer ni se droguer, etc. Mais qui peut vraiment blâmer ce souci-là ?

Le dopage est-il vraiment gênant ? Tant qu’il n’est pas dangereux pour les sportifs, tout ce que l’on demande c’est de voir du spectacle. Faire deux cents bornes par jour en vélo, dans les Alpes et les Pyrénées, pendant trois semaines, sans prendre aucun produit ? A attendre trop des sportifs, nous créons nous-même le dopage que nous cherchons tant à combattre.


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8 réactions à cet article    


  • Robert GIL ROBERT GIL 19 juillet 2012 08:48

    Le Tour de France n’est pas organisé par une fédération sportive, organisme à but non lucratif, mais par une société commerciale. L’organisation du Tour met largement à contribution les collectivités locales, mais il ne faut pas oublier qu’une société privée a pour seul objectif de dégager des bénéfices pour les distribuer aux actionnaires. Combien coute donc le Tour aux contribuables français ?

    Le dopage est un fléau dans le sport, mais tout le monde ferment les yeux. Comme le nuage de Tchernobil on a l’impression qu’il n’a pas passé les frontières ou alors il ne touche pas les sportifs nationaux. Et les journalistes sportifs ont l’air crédule et naïf. C’est le bal des hypocrites ..............

    http://2ccr.unblog.fr/2011/02/23/sport-business-dopage-et/


    • SPORT Protect SPORT Protect 19 juillet 2012 10:12

      Merci pour cet article certes un peu provocateur mais qui justement pose des questions que beaucoup de personnes se posent.


      Il faut savoir que la lutte antidopage a été créée en premier lieu pour protéger la santé des sportifs et non pour préserver l’équité des épreuves. N’oublions jamais cela car si la lutte antidopage n’avait pas été créée nous aurions des hécatombes chaque jour sur les terrains de sport.

      Attention, je ne suis pas en train de dire que la lutte antidopage est parfaite, loin, très loin de là !

      Quand on parle de compétition, il ne faut pas parler d’égalité mais d’équité. On doit pouvoir partir sur la ligne de départ dans les mêmes conditions ; le mythe de l’égalité est totalement utopique. Bien sûr que personne ne naît avec les mêmes dispositions et c’est justement une des particularités du sport que de permettre à chacun de s’améliorer, de compenser ses carences, etc.
      Évidemment que certaines disciplines sportives ne seront pas très adaptées à certains mais vu la multitude de sports, chacun peut trouver chaussure à son pied...

      Alors quoi faire ? 

      Mon expérience à l’écoute des sportifs depuis plus de treize années au travers du dispositif de prévention Dopage.com m’a montré que toutes les disciplines sportives sont concernées par le dopage et que la recherche de performance ne concerne pas que les sports de force ou d’endurance. Les sportifs qui pratiquent un sport de précision comme, par exemple, le tir à l’arc, peuvent être intéressés par des substances qui augmentent leur acuité visuelle et diminuent leur niveau de stress. Pour plagier la firme à la pomme, on pourrait dire qu’en matière de dopage et de recherche de performance, quel que soit votre sport, « il y a toujours un produit pour ça »…
      On constate depuis plusieurs années que les enquêtes judiciaires sont beaucoup plus efficaces que les contrôles antidopage…En effet, si “le dopage, n’est pas marqué sur le visage” le “contrôlé positif” lui sera marqué à vie !
      Il faut donc rappeler certaines vérités : la plupart des dopés ne sont jamais contrôlés positifs et la plupart des contrôlés positifs n’ont pas eu l’intention de se doper… Les premiers contournent la législation antidopage qu’ils connaissent ou que leurs “conseils médicaux” connaissent sur le bout des doigts ; et donc, ils se font rarement prendre. Les seconds, généralement d’un niveau plus faible, méconnaissent cette législation et se font prendre pour des médicaments d’usage courant (actifed, solupred, par exemple), du cannabis ou des compléments alimentaires contaminés. Le statut des produits n’étant pas indiqué sur l’emballage des produits qui peuvent contenir des substances interdites…

      Moralité, il faut accentuer la répression et notamment les enquêtes dans tous les sports, plus efficaces que les contrôles, auprès des tricheurs, ET, renforcer l’information et la protection auprès de la grande majorité des sportifs. Rappelons le, aucune discipline sportive ni aucun niveau n’étant épargné par le dopage intentionnel et non intentionnel.

      Dorian Martinez
      Fondateur de SPORT Protect


      • Radix Radix 19 juillet 2012 12:56

        Bonjour

        Vous parlez du dopage uniquement dans le tour de France, ce n’est pas là qu’il fait le plus de ravage mais chez les amateurs !
        Etant gamin j’avais un voisin passionné de vélo qui s’entraînait dur dès qu’il avait un jour de congé. Un jour il a été trouver son entraîneur pour lui dire qu’il ne comprenait pas que des courreurs de son équipe qu’il dominait facilement à l’entraînement le battait régulièrement le jour des courses ?

        Après « l’explication » il a rangé son vélo et ne l’a plus ressorti !

        Radix


        • alinea Alinea 19 juillet 2012 17:37

          Il n’y aura qu’un gus, de toutes façons sur le podium. Le dopage ne sert qu’à faire courir le cent mètres par un mec en moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire.
          Parce que le dopage accroît les capacités de chacun en proportion de ses capacité de base.
          parce que le dopage tue pour quelque chose qui ne vaut pas le coup !
          Parce que le dopage enrichit les labos, détruit les plus faibles et pourrit l’esprit de compétition !
          C’est bien de vouloir choquer, mais le surhomme, personnellement, ce n’est pas comme ça que je l’espère !!!


          • norbert gabriel norbert gabriel 19 juillet 2012 18:30

            «  » Faire deux cents bornes par jour en vélo, dans les Alpes et les Pyrénées, pendant trois semaines, sans prendre aucun produit ?« 

            il faut ajouter »à 40 km de moyenne"... Les 200 bornes par jour, je les ai faites assez régulièrement en cyclo camping quand j’avais 18-20 ans sans produit autre que la dextrose, mais on mettait 9 à 10 heures pour faire nos 200 bornes. Y compris avec le Tourmalet qui ne faisait que 2114 mètres à l’époque.
            Pour ce qui est du sport, on cherche le plus souvent des héros, pas forcément des exemples. Anquetil était un géant, mais pas un exmple. Je n’aurais peut-être pas aimé être copain avec lui, mais quel formidable champion.

            PS la dextrose, c’était une sorte de sucre à assimilation rapide.


            • Griffe 19 juillet 2012 18:33

              Vous confondez égalite avec équité. La lutte contre le dopage permet bien l’égalité, c’est à dire de donner à chacun les mêmes régles, que l’on soit petit, grand, obése maigre ... L’équité par contre c’est la volonté de niveller les performances ... 


              • bert bert 20 juillet 2012 00:00

                du thé , des croissants aux amandes et un bon vélo c’est déjà pas mal comme dopage smiley






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Auteur de l'article

Thomas Cattiaux


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