Elections américaines : les démocrates parti de la guerre
Et si l’enjeu des élections américaines à venir était rien moins que la troisième et dernière guerre mondiale ?
La Russie a été invitée dans la campagne présidentielle par le parti Démocrate, à l’occasion de la publication par Wikileaks de près de vingt mille e-mails envoyés entre membres du parti et qui font apparaître, des manipulations en faveur d’Hilary Clinton et contre le deuxième candidat à l’investiture du parti, Bernard Sanders.
Il est donc urgent du côté des soutiens d’Hillary Clinton de trouver un responsable. Il y a bien le parti républicain, mais il risquerait de « retourner le compliment ». Difficile d’accuser les soutiens de Bernard Sanders qui, pourtant, auraient aussi de bonnes raisons de passer les messages à Wikileaks, car maintenant qu’Hillary Clinton a gagné l’investiture, il faut veiller à l’unité du parti derrière sa candidate.
Reste l’inusable bouc émissaire, le méchant Vladimir Poutine. Ainsi, contre toute vraisemblance, on accuse la Russie d’être derrière le piratage et d’avoir donné les messages à Wikileaks. Cela permet de faire d’une pierre deux coups, un on éloigne les questions du parti Démocrate et deux, on déconsidère l’adversaire Donald Trump dont on fait une « taupe » du Kremlin.
Rapidement, Julian Assange explique, dans un entretien à la chaîne CNBC, que cette démarche est probablement une manœuvre de diversion vu qu'aucune preuve ne vient étayer ces accusations. De son côté, un site Israélien proche des services de renseignement de ce pays (Debka Files) explique que d’une part, le système de guerre électronique russe est une sorte de « trou noir ». On n’a presqu’aucun renseignement à son sujet, mais une chose paraît certaine c’est que si les Russes étaient impliqués, on ne trouverait pas de mentions comme "Fancy Bear," ou “Cozy Bear” comme l’on dit les principaux vieux médias américains, repris par des vieux médias français. D’autre part, l’annonce par la société « Crowd Strike » qui travaille pour la campagne démocrate et qu’elle a trouvé l’origine du piratage en deux heures est hautement fantaisiste. Ce genre d’enquête qui nécessite des super-ordinateurs et une collaboration étroite avec les fournisseurs d’accès prend habituellement des mois, quand elle aboutit.
Il n’est donc pas question de trouver la vérité mais d’utiliser tous les moyens possibles pour décrédibiliser un adversaire. Existe-t-il un moyen plus puissant aujourd’hui que de faire croire que Donald Trump est une taupe du Kremlin ? Après avoir utilisé ce genre d’argument, après avoir comparé Vladimir Poutine à Hitler, comment pourra-t-on une fois élue, si cela devait arriver, établir des relations normales entre grandes puissances ?
Un spécialiste américain des relations américano-russes et ancien spécialiste de l’Urss, le professeur Stephen Cohen enseignant à Princeton et à l’Université de New York s’inquiète de plus en plus du tour pris par la politique étrangère américaine. Interviewé sur CNN par Michael Smerconish il expliquait : « Nous sommes très proches d’une confrontation nucléaire avec la Russie dans le genre de la crise des missiles de Cuba, mais cette fois le long de la frontière russe ou en Syrie. Cela nécessite de façon urgente un débat sur le sujet, d’autant que nous sommes en année électorale. (…) Cette présentation dangereuse de Donald Trump comme un agent russe qui vient principalement du camp démocrate, doit cesser immédiatement. » Et il poursuit en expliquant qu’à l’époque de la guerre froide, une époque qu’il est assez vieux pour avoir connue, on discutait de ces sujets aux Etats-Unis, on ne se contentait pas d’accusations sans aucune preuve comme aujourd’hui.
L’affaire de e-mails démocrates a relancé la diabolisation de Donald Trump. C’est devenu une habitude en politique et dans les médias. On ne cherche pas à discuter les arguments de l’autre partie, on cherche à la déconsidérer, au besoin par des attaques personnelles, et on ne s’embarrasse pas de preuves.
La dernière tentative de déstabilisation du camp Républicain en date est à trouver dans le numéro de ce jour du New York Times à propos de Paul Manafort, le conseiller de campagne de Donald Trump. Je ne reprendrai pas l’ensemble de l’article, ce n’est pas le sujet du moment et je vous conseille d’aller le lire pour vous faire votre opinion. Il commence comme ceci « Peu de consultants politiques ont eu un client qui échouait aussi spectaculairement que celui de Paul Manafort en Ukraine à l’hiver 2014 ». Pas besoin d’en dire plus, surtout ne pas préciser qu’alors, la campagne du client était terminée, qu’elle s’était soldée sur sa victoire et que ce n’est que quelques mois plus tard qu’il a été victime d’un changement de régime largement organisé par les Etats-Unis. Après une entame comme celle-là, l’incompétence du sieur Manafort est établie. Sans preuves, bien sûr, mais qui s’en souciera. Il ne reste plus qu’à expliquer que le client en question était un « homme de Poutine » et la boucle est bouclée. Le conseiller de Donald Trump est un incapable, un « homme de Poutine », donc Donald Trump lui-même est un incapable, et un « homme de Poutine ». Le niveau zéro de la réflexion politique.
Henri Kissinger expliquait l’année dernière que la diabolisation du président russe ne pouvait tenir lieu de politique et qu’elle n’était que la marque d’une absence de politique.
Ce qui a de quoi effrayer est que cette absence de politique pourrait être « gérée » par le parti démocrate qui est devenu en quelques années le parti de la guerre et un allié des néocons, aussi étonnant que cela puisse paraître à ceux qui se souviennent des positions de ce parti au début des années soixante dix.
La candidate désignée à l’élection présidentielle de novembre, Hilary Clinton, est foncièrement belliciste. Elle l’a prouvé à maintes reprises dans un passé récent. Avec elle, comme le fait remarquer le journaliste américain Robert Parry, le parti Démocrate est maintenant le parti de la guerre le plus agressif, ce qui contraste énormément avec ses positions antérieures. Les Démocrates ont toujours été réticents à commencer des guerres extérieures quand ils n’y ont pas été résolument opposés comme dans le cas du Vietnam. Ils ont ainsi achevé en 2016 un virage à 180 degrés par rapport à leurs positions de 1968.
Alors qu’elle n’était encore que sénateur de New York, Hilary Clinton a soutenu avec enthousiasme la guerre en Irak, ne retenant ses ardeurs qu’à l’approche des élections présidentielles de 2008 où elle se trouverait face à un candidat, Barack Obama qui lui, s’était opposé à cette guerre. En 2009, elle a soutenu la décision du président d’augmenter le contingent américain en Afghanistan pour lutter contre une nouvelle offensive des Talibans (le fameux « surge » de Barack Obama) qui n’a, en fait, pas eu d’autre résultat que la mort d’un millier de soldats américains supplémentaires et de beaucoup plus d’Afghans.
En 2010, elle est parvenue à saboter la première tentative d’accord entre les Etats-Unis et l’Iran sur le nucléaire. Cette tentative, qui était pilotée à l’initiative du président américain, par les présidents Brésilien et Turc, portait sur la remise par l’Iran d’une grande partie de son uranium faiblement enrichi.
C’est elle également qui était à la manœuvre pour convaincre Barack Obama de demander à l’ONU l’établissement d’une zone d’interdiction aérienne au dessus de la Lybie, afin de protéger les « populations civiles innocentes ». Une fois la résolution obtenue grâce à l’abstention de la Chine et de la Russie (qui devait rapidement regretter sa position), la protection des populations est devenu une opération de changement de régime qui a plongé le pays dans le chaos que l’on sait. Le lendemain de la mort de Khadafi, Hillary Clinton déclarait sur une chaîne de télévision américaine : « nous sommes venus, nous avons vu, il est mort » en battant des mains de joie.
Non seulement Hillary Clinton n’a pas reconnu ses torts en Lybie, mais elle a rapidement prévu d’organiser un changement de régime en Syrie, un autre « rêve » des néocons depuis 1990.
Elle a quitté son poste de secrétaire d’état au début du deuxième mandat de Barack Obama en 2013. Quelques mois plus tard éclatait l’affaire du bombardement au sarin en Syrie, bombardement immédiatement mis sur le compte des forces gouvernementales. Malgré la pression internationale, le président temporisait quelques jours et on apprenait de source américaine qu’en fait de bombardement il n’y avait eu qu’une roquette tirée, roquette de fabrication artisanale et dont le rayon d’action indiquait que seuls des groupes terroristes auraient pu la tirer. Il s’agissait d’attirer les Etats-Unis dans la guerre aux côtés des terroristes. Peu de personnes doutent à Washington qu’Hillary Clinton aurait pesé de tout son poids pour une intervention directe si elle avait encore été secrétaire d’état. L’intervention de la Russie de Poutine qui a permis la destruction des armes chimiques du régime Assad n’a certainement pas arrangé les relations difficiles entre Hillary Clinton et la Russie et, en particulier, son ministre des affaires étrangères Serguei Lavrov.
Pendant la campagne des primaires et une des rares fois où le sujet des relations internationales a été évoqué, Hillary Clinton a déclaré qu’en tant que présidente, elle ordonnerait une invasion de la Syrie, mais bien sûr, toujours dans le but de protéger les civils exterminés par leur président ! Quelle serait la réaction de la Russie ? Mais également celle de l’Iran, sans chercher encore à spéculer sur la réaction d’Israël qui n’a pas besoin d’une nouvelle Lybie à sa porte et qui a reçu des garanties de la Russie.
Et que ferait Hillary Clinton en Ukraine ? Poursuivrait-elle la politique de Victoria Nuland et des néocons qui veulent que les Etats-Unis livrent des armes au président Poroshenko ? Nul doute que ces armes seraient immédiatement utilisées par l’armée ukrainienne pour anéantir les indépendantistes du sud est du pays et « délivrer » la Crimée. L’étape suivante sur la liste des rêves fous des néocons dont Hillary Clinton a épousé les thèses serait un changement de régime à Moscou. Résisterait-elle au plaisir pervers de montrer comme elle saurait être forte face à Vladimir Poutine ?
On peut se poser la question et on est d’autant plus tenté de le faire quand on considère qui sont les principaux financiers de la campagne Démocrate. Je me pencherai en détail sur cette question dans un chapitre consacré au financement des campagnes politiques aux Etats-Unis. Remarquons simplement que les entreprises du complexe militaro-industriel sont largement représentées dans la liste des donateurs. Si elle était élue, Hillary Clinton aurait-elle la force politique de résister à leurs demandes ?
Ce sont ces mêmes financiers qui reprochent depuis longtemps déjà à Barack Obama sa « faiblesse » dans le domaine de la politique extérieure, en particulier face à la Chine et à la Russie. On peut raisonnablement penser qu’Hillary Clinton serait beaucoup moins bien placée pour résister à ce genre de reproches.
D’autant que, pour le moment au moins, il y a peu de voix qui s’élèvent pour prôner une approche plus diplomatique des grands problèmes du moment. Que ce soit le secrétaire général de l’Otan, son commandant suprême, tous rêvent d’en découdre avec la Russie.
La seule voix d’importance politique nationale américaine qui se soit élevée contre les positions des démocrates et du complexe militaro industriel est celle de Donald Trump. Je ne soutiens pas le candidat Républicain, pas plus, d’ailleurs que je ne soutiens la candidate démocrate, mais je ne peux que constater où se trouve la réaction responsable d’un homme d’état qui pourrait se trouver à la tête de la plus grande puissance économique et militaire de la planète. Etant donné les enjeux, il y a lieu de bien réfléchir.
Qu’a dit Donald Trump ? Qu’il voulait penser d’abord aux intérêts des Etats-Unis. Je mentionnerai au passage, que cela correspond à la position de cinquante sept pour cent de la population américaine selon un sondage « PEW » d’avril 2016. Il a dit également qu’il voulait en finir avec la guerre froide et coopérer avec la Russie dans différents domaines. Au lieu de susciter un vrai débat dans les vieux médias américains et européens, ses propos déclenchent une campagne de dénigrement digne du « McCarthisme ». Donald Trump a également dit qu’il aimerait savoir, soixante ans après sa création, quelles étaient les missions de l’Otan. Important sujet de réflexion quand on sait que le « Pacte de Varsovie » a, lui, disparu au début des années 90. Va-t-on en parler ? Non on explique que Donald Trump veut détruire l’Otan. Qui est à la manœuvre dans cette vaste opération de désinformation, le pari Démocrate et sa candidate Hillary Clinton. Cette dernière a déclaré il y a deux jours que Donald Trump avait fait "allégeance absolue aux objectifs de la politique étrangère russe".
Tout cela ne vous inquiète pas ?
Robert Parry, article cité
ibid.
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