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Élections et construction de l’État en Libye

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Les récentes élections en Irak n’ont pas encore réussi à amener le pays au seuil de la sécurité et de la stabilité. En Libye aussi, on doute de la suite des événements après les élections présidentielles et législatives du 24 décembre. Cela amène certains chercheurs à remettre en question l’efficacité des élections et leur rôle dans la construction de l’État après les conflits.

Certes, le processus électoral est une manifestation de la démocratie, qui représente un système de valeurs intégrées, dont l’ensemble se retrouve dans l’urne. Les élections sont la récolte d’un développement culturel et de valeurs des sociétés. Leur succès ne se limite pas aux aspects procéduraux et réglementaires, piliers essentiels de la transparence.

Mais ceux-ci ne sont pas la seule garantie dont on peut déduire l’efficacité du processus électoral. Voter ou faire voter est, à mon sens, le dernier rouage d’un processus culturel fondamental qui peut prendre du temps pour les sociétés avant de porter les fruits escomptés.

Dans les sociétés qui souffrent de fragmentation politique et de polarisation sectaire, ou dans lesquelles l’idée d’un État n’a pas encore mûri au point de pouvoir dépasser d’autres allégeances telles que les sectes, les partis ou les tribus, il ne peut garantir une élection transparente et légitime.

Dans les sociétés qui ont longtemps souffert de la tyrannie et de la dictature, les élections ne peuvent porter leurs fruits qu’après une certaine transition, afin d’éliminer l’héritage de ces souffrances, qui laisse des comportements et des pratiques contraires aux normes requises pour un véritable processus électoral.

Au-delà de la théorie, le rejet des résultats des élections en Irak par les forces politiques sectaires est manifeste, pour la simple raison que le peuple irakien a décidé de remodeler la scène politique à son image.

En Libye, on n’en est pas loin, car les observateurs craignent que la prolifération des armes et des mercenaires n’affecte le processus électoral, ce qui pourrait, selon eux, plonger le pays dans de nouvelles divisions, des troubles et le chaos.

Il est de notoriété publique que tout processus électoral sérieux nécessite une forte présence de l’État, au sens constitutionnel et politique habituel du terme.

En d’autres termes, il devrait y avoir des lois dissuasives qui garantissent l’intégrité des élections, empêchent la corruption et les violations des procédures et offrent les garanties nécessaires de transparence dans tous les mécanismes de surveillance sous toutes leurs formes.

Il peut donc être théoriquement juste d’organiser des élections avant que les fondements de l’État ne soient stables et servent de base à la construction de la nation.

Cependant, de manière réaliste, cela ne peut être réalisé que s’il existe un environnement alternatif pour le rôle de l’État, comme la supervision de l’ensemble du processus électoral par une/des instance(s) internationale(s) neutre(s).

Cela suppose que l’intégrité et la transparence soient assurées dans une certaine mesure, ce qui ne peut être garanti ni totalement ni de manière absolue, compte tenu de l’influence des particularités tribales et régionales sur la transparence et l’intégrité des résultats électoraux.

Le processus électoral est particulièrement dangereux lorsqu’il se déroule, comme en Libye, au lendemain d’un conflit. Les garanties sont difficiles à fournir compte tenu de l’instabilité de la situation sécuritaire et du fait que les électeurs ne peuvent pas voter dans un environnement sûr.

En outre, les élections ne sont pas libres en raison de la présence de mercenaires étrangers de terroristes dans de nombreuses régions et villes libyennes. Cela signifie-t-il que les élections en Libye ou ailleurs sont inutiles  ?

La réponse est certainement non, car les élections restent l’un des moins mauvais moyens de déterminer qui gouverne en Libye et de mettre fin aux conflits dans ce pays arabe. Il n’est pas logique que l’avenir de la Libye continue à dépendre de l’élimination de la présence de mercenaires, de terroristes et du chaos des armes.

L’une des principales garanties de la construction d’un État dans de telles conditions est la présence d’armées nationales qui assurent la sécurité et la stabilité et veillent à ce que la situation ne dérive pas vers un chaos absolu et difficilement contrôlable. Les armées nationales se sont révélées être le pilier du maintien de l’entité étatique dans tous les conflits internes.

Un regard sur ce qui se passe autour de nous montre que le chaos est souvent lié à l’absence d’une armée nationale capable d’assurer la sécurité et la stabilité. Dans ce contexte, il est important que l’armée soit la force la plus efficace sur le terrain. Le chaos au Liban, par exemple, a donné naissance à une milice qui dépasse par son armement et capacités l’armée nationale libanaise.

Les processus électoraux restent l’une des étapes les plus importantes de la construction d’une nation. Mais il n’est pas, à mon avis, l’étape la plus importante s’il n’y a pas d’institutions de l’État de droit ou de culture politique, ni de conditions garantissant l’accès à des résultats électoraux qui reflètent réellement la volonté des sociétés.


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