Elisabeth Borne : en France rien de nouveau
Après avoir sondé toute la classe politique à la recherche d’un nouveau Premier ministre « attaché à la question sociale, environnementale et productive », Emmanuel Macron vient enfin de porter son choix sur l’heureuse élue. Elisabeth Borne, puisqu’il faut l’appeler par son nom, a occupé sous Jupiter I les fonctions de ministre des Transports, de l’Ecologie et enfin du Travail. Des secteurs dont la vitalité qui s’en dégage ne peut qu’augurer un avenir radieux pour le pays.
Le choix ne fut pas pour autant facile. Cherchant une femme « plutôt marquée à gauche » le prétendant élyséen s’est fait éconduire deux fois par d’illustres inconnues : Valérie Rabault puis Véronique Bédague. Qu’à cela ne tienne, il a fini par trouver celle qui fera battre le cœur de son second quinquennat. Si selon toute vraisemblance Elisabeth Borne est une femme, son ancrage à gauche est quant à lui moins certain, à l’instar d’Emmanuel Macron. Mais qui donc est cette mystérieuse besogneuse pourtant au premier plan de la vie politique française ?
Le parcours d’Elisabeth Borne suscite, si ce n’est l’admiration, au moins le respect. Mais certainement pas un sentiment d’espoir dans le changement. Née à Paris, elle a fait son lycée et ses classes préparatoires dans le très chic établissement de Janson-de-Sailly, avant d’intégrer l’Ecole polytechnique et enfin celle des ponts et chaussées. Après de si brillantes études dans les meilleures écoles de la République elle a poursuivi une carrière de haut fonctionnaire, refusant les fastes du privé, ce qui traduit très certainement un décalage générationnel majeur avec Emmanuel Macron, et qui sait, un semblant de sens de l’État supérieur à ce dernier. Pourtant avec, entre autre, l’ouverture à la concurrence de la SCNF et la réforme de l’assurance-chômage elle s’est constamment efforcée de (des)servir l’Etat français, traduisant ainsi un côté, il est vrai, très gauche.
Enfin que le lecteur se rassure, solidaire avec la majorité présidentielle, elle traîne bien évidemment son lot de casseroles. En effet, à l’époque, elle aurait « oublié » de mentionner six mandats auprès de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Alors présidente de la RATP, elle avait été membre de mai 2015 à mai 2017 d’un lobby de constructeurs, l’Institut de la Gestion Déléguée (IGD). Une appartenance problématique aux vues de ses différents postes, mais qui n’avait pas fait de bruit jusqu’en 2019, peut-être parce qu’un des collaborateurs de la ministre était le conjoint du numéro deux de la HATVP.
Qu’à cela ne tienne Elisabeth Borne a tenu le cap et peut désormais se targuer du titre de chef du Gouvernement. Elle a d’ailleurs dédié son premier discours dans ses nouvelles fonctions à toutes les « petites filles », les invitant à « aller au bout de (leurs) rêves ». Une excellente nouvelle car les petits garçons s’étaient sûrement sentis trop privilégiés à la nomination de Jean Castex. Si la fonction de Premier ministre conserve un certain prestige, il est difficile d’imaginer nos chères têtes blondes aspirer à devenir le fusible d’un Président mal élu.
Emmanuel Macron avait promis durant l’entre-deux-tours de la présidentielle un « renouvellement complet » de sa politique sur le plan écologique, s’étant même targué d’avoir diminué de 12% les émissions de gaz à effet de serre, oubliant de préciser la méthode révolutionnaire adoptée à cette fin, « à la chinoise », entre confinements et couvre-feux. Cet appel du pied auprès de l’électorat de Jean-Luc Mélenchon ne changera pas la donne. La nomination d’Elisabeth Borne, ancienne ministre de l’Ecologie, va juste servir à réjouir certaines féministes en mal de symboles et à déchainer les passions sur les réseaux sociaux, au sujet de la féminisation ou non du titre de Premier ministre. La souveraineté du peuple se cantonnera encore une fois à des règles orthographiques.
Il ne faut donc pas se faire d’illusion sur la politique qui va suivre. Depuis l’apparition du quinquennat et la fin de toute cohabitation, Matignon n’est que le secrétariat de l’Elysée. Les fantasmes électoraux de la gauche réunie au sein de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale, le politburo mélenchonien, ne font qu’entretenir l’illusion démocratique et empêchent une réelle réflexion sur nos institutions.
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