Emploi en France : Sanofi, mauvais élève d’une industrie pharmaceutique en bonne santé
L'industrie pharmaceutique est un secteur économique particulier regroupant des activités aussi variées que celles de recherche, de fabrication et de commercialisation des médicaments pour la médecine humaine ou vétérinaire. Ce secteur est l’un des plus importants au monde, en termes d’emploi et d’investissement dans la recherche.
Ceux qui jouent le jeu…
Dans le monde, ce sont des centaines de millions d’emplois qui sont concernés. Ainsi, en 2006, les 20 plus grands groupes pharmaceutiques employaient près de 1 million 300 000 personnes. Le groupe français Sanofi, à lui seul, employait en 2012 plus de 100 000 personnes dans le monde, dont 27 000 en France.
Dans notre pays, plus de 100 000 personnes travaillent dans le secteur. Si on prend en compte l’ensemble des acteurs y compris les pharmacies ou les sociétés sous-traitantes, ce nombre triple.
La région Rhône-Alpes est particulièrement révélatrice de cette vitalité économique, puisque depuis 2008, elle échappe au déclin général que certains associent à la crise.
« Si l'on excepte un léger recul en 2011, l'industrie pharmaceutique, qui compte 14.000 emplois, y est toujours en croissance »,
Des sociétés comme Boiron, leader de l’homéopathie, ont vu leurs ventes progresser. Dans l’exemple de Boiron, cela représente une progression de 7.5% en 2012 et l’emploi de 1600 personnes dans la région.
Becton Dickinson, entreprise américaine, emploie également près de 1600 personnes dans l’usine de Pont-de-Claix en Isère. Enfin, Mérieux est également une entreprise solide, qui compte en son sein 3200 salariés, avec une progression des effectifs de 2% à 3% par an.
…et ceux qui ne le jouent pas, Sanofi, Chris Viehbacher et le LEEM en tête
Pourtant, malgré un tableau pouvant sembler prometteur, certains poids lourds ne jouent pas le jeu. En tête de ceux-ci, Sanofi. 4ème groupe mondial, régulièrement premier au CAC40, avec des bénéfices de près de 8 milliards d’euros en 2012, le groupe a mis en place une série de plans sociaux visant à réduire ses effectifs. Comment est-ce possible, alors que le groupe est peut-être celui qui se porte le mieux en France ? Plus encore, les Echos le 18 avril expliquent que Sanofi joue un rôle de contre balancier face au recul de l’ensemble du CAC40, indiquant la force de frappe du groupe.
Pourtant, Sanofi a fait le choix de recruter un nouveau patron anglo-saxon, Chris Viehbacher, qui depuis sa nomination, met le cap vers plus de financiarisation au détriment du salariat. La bonne santé financière du groupe ne traduit donc pas le climat social tendu voire destructif (un salarié s’est suicidé au cyanure devant ses collègues, sans toutefois qu’on puisse relier son acte à ce climat pesant).
Le 11 avril 2013, en soutien à une délégation de salariés du groupe, Jean-Luc Mélenchon a dénoncé ce changement de cap. Vêtu d’une blouse blanche couverte d’autocollants « Sanofric, le capitalisme nuit gravement à la santé », il a déclaré :
« L’industrie pharmaceutique, c’est la sécurité sociale et l’Etat, ça intéresse tout le pays. Ce système prend des êtres moralement dégénérés pour préférer le profit maximum à l’utilité sociale et humaine »
- Jean-Luc Mélenchon manifeste
- Jean-Luc Mélenchon dénonce les positions des dirigeants de Sanofi, en soutien aux salariés.
D’après Libération, « Jean-Luc Mélenchon a opposé cette logique à celle des salariés, « qui se contentent d’une paye, et trouvent des produits qui permettent de sauver la vie à des centaines de milliers de personnes dans le monde. Ils s’intéressent à leur métier, ils rendent service aux autres grâce à leurs beaux cerveaux remplis par l’école républicaine : ils ne sont pas normaux », a-t-il ironisé, suscitant rires et applaudissements chez les quelque 200 manifestants et sympathisants. »
Le LEEM sous l'ère de Christian lajoux : entre malaise et hypocrisie
Encore plus embêtant, l’ancien dirigeant du LEEM, principal syndicat de l’industrie pharmaceutique, est Christian Lajoux, patron de Sanofi France. Pour un secteur censé être relais de croissance favorisant l’emploi, il fait particulièrement tache que son entreprise, poids lourds du secteur, nage à contre-courant, en allant vers moins de R&D, moins d’emploi, et plus de marketing financier.
Biomap nous informe :
"Le secteur de la santé résiste plutôt bien", car "malgré la crise, les gens restent malades", avait commenté le directeur général du groupe d'analyse in vitro bioMérieux, Stéphane Bancel, en présentant ses résultats.
Mais dans le même temps, ces "grosses machines à bénéfices" suppriment de nombreux emplois : "plus de 50.000 d'ici 2012" selon Emmanuel Seve, directeur d'études chez Precepta, cabinet d'étude stratégique.
Pourtant, le 25 juin 2012, le même Christian Lajoux se plaignait de la perte d’emploi du secteur avant de songer à…un plan social d’envergure concernant potentiellement 5000 à 6000 salariés de Sanofi. Le même qui participe à la sinistrose du secteur expliquait un an auparavant :
« Selon le Leem le secteur a perdu 2.600 emplois en deux ans, soit une baisse de 2,6%. Le syndicat patronal en appelle aux pouvoirs publics. »
Les analystes économiques sont pourtant unanimes depuis des années. Ce qui fait la richesse du secteur, c’est bel et bien sa capacité à innover et à être pionnier dans le domaine de la recherche. La R&D rétablirait ainsi l’équilibre, permettrait le développement de l’emploi. Des représentants du secteur ont, à de nombreuses reprises, été reçus par Jérôme Cahuzac, alors ministre du budget, afin de discuter de cette question. De quoi rendre schizophrène l’ensemble des acteurs, avec d’un côté un Etat sourd aux demandes de soutien, de l’autre un syndicat plaidant pour l’emploi, dirigé par celui qui est pourtant le principal responsable des plus importants plans sociaux.
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