Enfance martyre et religiosité en Afrique : le terrorisme occulté
ENFANCE MARTYRE ET RELIGIOSITE EN AFRIQUE
Ou le terrorisme occulté
Notice d’alerte, octobre 2021
1. A une date non déterminée, un enfant d’environ 12 ans, victime de maltraitance, répond, en langue pulaar, aux questions d’un adulte, choqué par la violence de la molestation. Sur la vidéo, le mineur apparaît, le dos et le ventre parsemés de traces de flagellation, jusqu’au sang. Il impute la responsabilité de son malheur, au maître coranique, lequel aurait agi, à la demande du père. Dans l’audio d’explication, l’auteur des gestes de tortures allègue sa volonté d’éduquer, le petit, au prétexte que ce dernier découcherait. De surcroît, précise-t-il, il ne cesserait jamais la correction tant que l’enfant n’aurait appris le Coran. Ici, se mêlent deux arguments d’impératif variable, en l’occurrence la prévention de la délinquance et le prosélytisme. Bien entendu, aucune des raisons invoquées ne mentionne le respect des droits humains.
A la fin de l’année 2018, un autre garçonnet de 6 ans racontait, en dialecte Hassaniya, son calvaire après que ses parents l’ont placé chez un maître coranique ; celui-ci lui lacérait l’échine, à coups de fil électrique. La scène se déroule à Nouakchott, capitale de la Mauritanie. Dans ce pays, des agences et programmes du système des Nations unies et d’ailleurs versaient des incitations financières aux praticiens de l’enseignement confessionnel islamique en vue de de les éloigner de l’usage des coups et blessures sur leurs élèves. A l’épreuve du bilan, le résultat n’emporte l’adhésion.
L’année suivante, dans une école coranique de Tengadoum au sud de la Mauritanie, un jeune prépubère endure l’acharnement de l’instituteur-adjoint ; la peau, déchirée par endroits, portait nombre d’hématomes et d’ecchymoses, quelques jours après l’agression. Sa famille préfère étouffer l’affaire et le père s’abstient de porter plainte. Les autorités de gendarmerie et de justice s’inclinent devant l’arrangement amiable. Des dizaines de drames similaires s’achèvent en silence, comme le rappellent les rares témoignages que véhicule le compte Instagram du Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef).
2. Quant au lieu du premier incident, les sources délimitent la commission des actes précités, à une localité du cercle de Nioro du Sahel, en territoire malien, près de la frontière avec la Mauritanie. Or, après recoupements, il s’avère que ce genre de supplice se banalise à l’intérieur de l’espace subsaharien, jusqu’au Golfe de Guinée et l’Est du Continent. Beaucoup de familles, sans doute par naïveté, habitude ou ignorance, confient leur progéniture rebelle, aux soins d’enseignants artisanaux, en charge d’inculquer, à la jeunesse, les rudiments du rite, d’Arabe et de moralité islamique. Souvent, le lot juvénile comprend des drogués, des voleurs à la tire, des apprentis-braqueurs et autres coupeurs de route mais aussi des cas de désobéissance filiale. Les images et audio joints attestent d’une barbarie d’autant moins critiquable que sa justification s’adosse au sacré.
3. Au prétexte de l’éducation à la vertu, des mineurs, quelquefois pré-adolescents, se retrouvent enchainés, battus, affamés, livrés à la mendicité ; les fillettes s’exposent au mariage avant terme ; elles subissent la pédophilie conjugale et sa part de viol, sous couvert de dévotion et de supériorité du masculin. En Mauritanie et au Sénégal voisin, plusieurs sources rapportent la fréquence de rapports sexuels que les enseignants et leurs disciples imposent aux garçons pensionnaires de leurs classes ; néanmoins, à cause de sa charge émotive et symbolique, cet aspect du traumatisme bénéficie de l’omerta la plus implacable. Face à la gravité du crime, des pans de la société se liguent, aux fins de décourager la vigilance des associations de défense de la dignité humaine. Le lien entre foi et violation de l’intégrité corporelle pose un problème dès lors qu’il entoure, d’un cordon d’immunité, la nuisance d’individus lucides, aux dépens d’êtres en devenir et sans défense. Peu en reviennent indemnes, pour le restant de leur vie. Certains s’abîment dans la délinquance, la frustration et le ressentiment. Pourtant, en Islam -sunnite et chiite - le droit (fiqh) s’adresse uniquement aux personnes douées de discernement et ne prévoit de peine, de prescription de culte ou de contrainte vestimentaire, à l’encontre des croyants n’ayant pas entamé leur mue nubile.
4. Du point de vue de l’orthodoxie musulmane, les parents sont tenus de prendre soin de leurs descendance infantile et d’en assurer la sûreté. L’obligation exclut de les supplicier, de les obliger à prier, apprendre ou s’habiller selon les codes imposables aux plus âgés. Là, les services sociaux, les départements ministériels et le corps de la magistrature désertent leur vocation, en particulier le devoir de protéger. Face au zèle islamiste dont les pans peu instruits de la société adoptent de plus en plus les formes extrêmes, beaucoup de gouvernements, d’acteurs du développement et de partenaires de l’Afrique ont déserté le terrain de la riposte civile pour se concentrer sur l’achat d’armes, le renseignement militaire et la formation des forces de sécurité.
5. Il importe de le souligner, le phénomène, quoique peu nouveau, gagne du terrain. Aujourd’hui, de telles pratiques relèvent d’une radicalisation graduelle de l’opinion, notamment dans les zones rurales où le salafisme s’enracine, à la faveur d’une démographie désormais hors de contrôle. Medersa, Daraa ou Mahadhra, le monolinguisme et l’exclusivité de l’enseignement coranique impliquent, dans la plupart des cas, la déscolarisation de milliers de futurs majeurs, sur fond de surnatalité et de migration climatique ; pire, loin d’être compétitive en comparaison de l’école moderne, la fabrique de chômage et des métiers de la parole accélère son extension, au rythme de la pauvreté ; elle crée des situations de détresse et d’insécurité que les politiques publiques ignorent encore.
6. En Mauritanie, Tunisie, Mali, Niger, Tchad, Soudan, Burkina Faso, les autorités négligent le défi et minimisent les atteintes à la cohésion sociale. Au Sénégal, le Parquet tentait – succès mitigé – d’initier des procès et de provoquer des sanctions exemplaires mais une partie de la population s’y opposait, y compris par l’intransigeance fanatique, voire à l’intérieur du prétoire. Au Nigeria, autour du Lac Tchad, sur le littoral Swahili, la même désolation avance et se vulgarise, sous le label de la piété. Jusque-là, pas un des Etats concernés n’a entrepris de légiférer ad hoc ni de sensibiliser les citoyens contre les brutalités infligées à l’enfance, avec la complicité de la famille. La signature et la ratification des conventions internationales en la matière semblent davantage répondre à des besoins d’affichage, d’image et d’attractivité, lors des revues de l’Examen périodique universel (Epu), à Genève.
Mauritanie7, Mauritanie8, Sénégal1, Sénégal2, Mauritanie9, Mauritanie10, Niger, Mauritanie12
7. Cependant, la médiatisation croissante des brutalités envers les enfants et les femmes témoigne, d’abord, d’un continuum de négligence, de déni et de peur, de la part des institutions gardiennes d’un minimum de paix dans le monde. Les auteurs de coups et blessures volontaires et d’abus sexuels sur mineurs échappent, en général, aux rigueurs de la loi, s’il y en a. Les tragédies exposées ici constituent une illustration de l’extrémisme violent parmi les civils et ne sauraient revêtir la qualification de « faits divers ». L’idéologie productrice du jihadisme est toujours à l’œuvre lorsqu’elle violente les enfants et opprime les femmes. Aussi, la présente alarme s’adresse aux entités ci-dessous :
Agence américaine pour le développement international (Usaid), Alliance militaire islamique pour combattre le terrorisme (Cimct), Akhlaquna Qatar, Amnesty international (Ai), Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (Acat),Banque mondiale (Bm), Bureau de lutte contre le terrorisme (Onuct), Bureau des Nations unies pour l’Afrique de l’Ouest (Unowa), Coalition pour le Sahel (Cps), Conseil des Droits de l’Homme de l’Onu (Cdh), Communauté économique des états de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), Commission des droits de l’Homme et des peuples de l’Union africaine (Cdhp), Commission de l’Union européenne (Ue), Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (Fidh), Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef), Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (Hcdh), Organisation de la conférence islamique (Oci), Organisation mondiale contre la torture (Omct) Organisation du monde islamique pour l'éducation, les sciences et la culture (Isesco), Organisation internationale de la francophonie (Oif), Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan), Représentations de l’Union européenne en Afrique de l’Ouest et du Nord (Ue), Sawab Center Emirats arabes unis, Save The Children, Human right watch (Hrw), Secrétariat du dialogue entre l’Organisation des Etats d’Afrique, des caraïbes et du pacifique (Ocp) Secrétariat exécutif du G5 Sahel.
Qui sommes-nous ?
Lanceurs d’alerte associés (Laa) est la dénomination d’un réseau de vigilance citoyenne en République islamique de Mauritanie. Les membres documentent, suivent et publient des notes relatives aux dysfonctionnements multidimensionnels de la gouvernance. A ce titre, ils dénoncent certes mais formulent des propositions et recommandations, contre l’impunité et l’extrémisme et pour la redevabilité des dirigeants, auprès des électeurs. Les correspondants de Laa, quelles que soient leurs préférences et idées, agissent en volontaires, toujours à titre gracieux. Ils placent l’intégrité du corps, la sacralité de la vie et la préservation des écosystèmes naturels, au centre de leur credo.
Nos coordonnées : Courrier, Twitter, Facebook, Blog, Youtube
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON