Enjeux de la bioéthique
Il convient en préambule de préciser que les lignes qui suivent ne sont que l’expression de l’opinion d’un profane, un total ignorant en matière scientifique et médicale. A ce titre, certains diraient que le pauvre prolo que je suis ferait mieux de retourner à des préoccupations basiques telles que s’inquiéter de finir le mois et de laisser les questions relatives à l’éthique aux “grandes personnes”, à ceux qui savent.
Partant du principe que les avis c’est comme les trous du cul, tout le monde en a un, il est certain que mon avis, outre le fait que je ne puisse le prétendre éclairé, ne peut revendiquer quelconque légitimité, mais dans la mesure où il est question d’éthique, c’est-à-dire ce qui porte sur le jugement moral à l’égard de certaines questions, concepts – et intutile de rappeler que la morale est une notion dont la définition aux contours souvent flous est fluctuante parce qu’évoultive – et ne pouvant considérer que quelqu’un puisse détenir une définition absolue et indiscutable de cette morale, je me prends à imaginer que cet avis ne serait malgré tout pas nécessairement illégitime.
Si certaines recherches scientifiques médicales tendent directement ou indirectement à nous diriger vers un développement des méthodes de clonage, eugénisme et transhumanisme, tels des objectifs se trouvant en haut de l’échelle que l’on veut (ou que l’on se croit devoir) gravir pour l’humanité, alors, ne nous y trompons pas, les questions d’éthique relatives à la PMA et GPA en sont certains des barreaux, et ce sous le fameux couvert du “pourquoi ne le ferait-on pas, puisque que la technique, la science le permet”.
La question n’est pas de juger ou freiner les progrès de la science, ni de porter un jugement moral (je ne me considère pas en droit de le faire) sur ceux qui soutiennent le projet de la PMA au nom de toutes ces femmes souffrant sincèrement de ne pouvoir avoir un enfant.
Sans vouloir suivre ceux qui considèreraient que la réflexion sur la bio-éthique, et la question de l’eugénisme qui peut lui-être associé et les fantasmes ou interrogations que cela suscite, amènera inévitablement à franchir le point Godwin, la question reste bien malgré tout de savoir ce qu’est, à terme, notre projet d’humanité si, pas à pas, on commence à modifier dans l’inconscient collectif la notion même de “donner la vie”.
Suivant un débat, malheureusement trop court et sans doute trop peu contradictoire, dans l’émission “28 minutes” sur Arte diffusé le 28/07 sur cette question de bio-éthique, je dois avouer avoir été plus que circonspect à l’écoute du discours des intervenants – qui indiquaient que la bio-éthique suivait des principes strictes et quasi intangibles, tout en admettant que cette éthique se nourrissait des évolutions médicales et sociétales – dans la mesure où, contrairement à ce qui était dit donc, et sur la base d’un syllogisme basique (même en connaissant les limtes de cette méthode), cela signifie bien que cette éthique sera amenée à évoluer. D’ailleurs les lois elles-mêmes changent.
Ce qui n’était pas jugé acceptable hier, l’est aujourd’hui, donc on peut supposer que, évolution des moeurs faisant, ce qui ne l’est pas aujourd’hui le sera demain.
Une des preuves de ce phénomène est notamment le droit à l’avortement, à propos duquel Monsieur ONFRAY rappelait dans une interview que les personnes qui, un siècle auparavant, pratiquait des avortements clandestins risquaient la peine de mort là où aujourd’hui nous appelons docteurs ceux qui se chargent d’une telle opération par ailleurs remboursé par la sécurité sociale.
C’est donc bien qu’avec le temps, l’évolution des sociétés, nous avons pu en arriver à considérer comme tout à fait normal – et en effet personne ne songerait aujourd’hui à remettre en cause ce droit à l’avortement qui est désormais un acquis – ce qui était jugé moralement innacceptable autrefois.
Entendons-nous bien, il ne s’agit pas de dire qu’il faudrait remettre en cause ce droit à l’avortement. Après tout, du simple fait d’être un homme, on pourrait me rétorquer que je ne peux appréhender tout ce que revêt cette question pour laquelle je ne peux donc me sentir concerné.
Je ne m’attache pas à juger la pratique ni ceux qui y ont recours, mais à m’interesser à ce que, philosophiquement, cela a amené comme changement dans notre perception du contrôle de notre corps.
Et au risque de passer pour un sombre con réactionnaire, je ne peux m’empécher de penser – et ai l’impression de devoir m’en excuser par avance – que le droit à l’avortement, dans la perception du corps et notre liberté à en disposer, a, "insidieusement", été une étape à une forme “d’insouciance” (mon manque de vocabulaire ne m’a pas permis de trouver un terme que j’ai pu juger plus adapté).
Si je peux entendre ceux qui mettront en avant le bénéficie que ce droit à l’avortement peut avoir dans les cas de grossesse issus de viols par exemple, j’avoue que j’aimerais bien savoir ce que, statisquement, représente effectivement le nombre d’IVG consécutives à un viol sur la somme totale d’avortements pratiqués chaque année. Suis-je insensé de penser que ceux-ci ne représentent qu’une minorité et que la majorité des IVG sont pratiqués au motif principal de grossesse simplement non désirés parce que accidentelles ? De ce questionnement, considérant tous les moyens de contraception existant ou, à défaut d’utiliser de tels moyens, le fait qu’il suffirait simplement de “faire attention” – et mêmes si je sais que ces solutions ne garantissent pas une fiabilité totale (mais là encore je crois savoir que, statisquement parlant, le nombre de cas concernés par une défaillance de ces moyens est infime), est-ce déraisonnable d’imaginer que les cas de grossesses interrompus procèdent de cette part d’insouciance qui, dans un coin de la tête, nous fait dire que, dans tous les cas, si je me retrouve enceinte, je pourrais toujours avorter.
Encore une fois, je ne juge pas le recours à l’IVG mais m’interroge sur ce que, psychologiquement, philosophiquement, le fait de disposer d’une telle option aujourd’hui moralement (et donc peut être même culturellement) acceptée a pu modifier dans notre perception du contrôle du biologique.
Si l’on admet que le droit à l’avortement a pu être une étape dans ce changement de perception (peut-être le premier ou un des premiers barreaux de l’échelle précédemment évoquée), alors on devra admettre que les questionnements éthiques relatives à la PMA et GPA vont également amener nécessairement des changements dans cette même perception sur ce qui est admis, permis, dans le contrôle du vivant, changements qui eux-mêmes, dès lors que, avec le temps et les évolutions sociétales ils auront été intégrés parce qu’acceptés, rendront possible, acceptable de s’interroger sur ce que sera la prochaine étape, toutjours au nom du “pourquoi ne pas le faire puisque la science le permet”.
Qui sait, peut-être qu’avec le temps, dans 100 ans, le Dr Frankenstein sera finalement vu comme un visionnaire (question : pourquoi les récits fantastiques d’anticipation ou de science-fiction abordant le thème de la société humaine du futur sont-ils quasiment tous toujours pessimistes ?).
De là, de quoi s’interroger sur ce que peut produire une société, un système dans lequel est passé comme tout à fait banal une expression telle que “gagner sa vie”.
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