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Accueil du site > Tribune Libre > Entre commerce et culture, que reste-t-il de la musique ?

Entre commerce et culture, que reste-t-il de la musique ?

Depuis quelques années, la musique semble avoir changé de raison d’être. Même si les plus grands festivals honorent toujours leur réputation et que les plus grands stades accueillent toujours d’extraordinaires concerts, les ventes d’albums physiques sont dans le rouge et celles des albums virtuels ne leur sont que faiblement supérieures. 

 Le nombre de musiciens n’a pourtant pas diminué, le nombre d’amoureux de la musique non plus si l’on en croit l’intense activité qui inonde les réseaux peer-to-peer.
 
En comparant les classements des meilleures ventes de morceaux avec celui des meilleures ventes d’albums, par exemple sur l’iTunes Store, on s’aperçoit que les genres musicaux diffèrent. 

Les morceaux qui occupent les premières places sont souvent des tubes destinés à envahir un été ou à être passés en boîte de nuit. À l’inverse, les albums qui ont les faveurs du public sont plus souvent… des albums tout simplement. C’est à dire plusieurs morceaux composés autour d’un fil directeur, qui peuvent faire appel à différents styles, mais qui in fine, dégagent une ambiance qui permet d’attacher à l’album, l’épithète conceptuel. C’est ce qui fait principalement défaut à la musique actuelle. Il serait facile de prendre la musique classique comme exemple : qui oserait seulement insinuer que les mouvements d’une symphonie n’ont absolument rien en commun, ou même que les différentes parties d’une sonate peuvent être écoutées dans le désordre sans perdre un chouïa d’ aspect artistique ?
 
Ce n’est pas le genre qui est en cause mais bien le type de musique.
 
 Même si les morceaux qui occupent la tête du classement sont souvent classés comme House, Rap, Dance ou Electronique, tous n’ont pas la même qualité. Il est vrai que les morceaux appartenant à ces genres musicaux sont plus enclin à être vendus sous forme de single, certains d’entre eux sont d’ailleurs excellents. Mais bien souvent les autres ne sont que des actions commerciales. C’est ce qu’on peut appeler le type. Le genre correspond aux rythmiques, aux accords ou encore aux instruments utilisés, tandis qu’ici quand on parle de type c’est pour différencier des objectifs. Et ils en existent deux principaux : 
  •    L’objectif artistique : le seul qui devrait exister, cela veut dire s’exprimer, créer, en définitive simplement être artiste. C’est ce qui permet de produire de la sensation, parfois avec tellement de talent qu’elle donne l’impression d’être palpable.
  •    L’objectif commercial : un ou une artiste plus ou moins talentueux (se) est porté sur le devant de la scène grâce à une image minutieusement étudiée qui touche un public restreint. 
Le génie du plan commercial, c’est l’image. 

Bien qu’une « chanteuse » aux formes avantageuses et à l’apparence un peu rebelle ait peu de chance de convaincre les plus de 25 ans, elle est écoutée par une grande majorité des moins de 25 ans qui s’identifie à elle ou l’idolâtre. 
En somme, la musique n’importe presque plus, l’objectif est de vendre et pour cela une focalisation sur une audience particulière est mise en place. Au lieu de lancer un artiste avec un style défini on lance un individu avec un public prédéfini.
Et ipso facto tout ce qui concerne l’art, la culture et la musique est complètement mis de côté. Les morceaux d’un album ne sont plus liés mais gravitent autour d’un tube, le résultat est forcément médiocre. 

Ces faits ont deux conséquences directes sur les autres artistes :
Comme ces autoproclamés artistes sont largement subventionnés, parce qu’ils vendent bien, ils inondent le marché, voire la sature, et bloquent partiellement les artistes d’autres genres.
Ensuite ils dégradent l’image des artistes s’exprimant dans les mêmes genres qu’eux.

Où est passée l’époque fabuleuse où un bon groupe avait une aura, un concept, une influence, où les albums ne laissaient pas indifférent et avaient un sens.
Au risque de devenir trop nostalgique, revenons au temps présent pour constater que les artistes qui s’accordent le privilège ou s’imposent le devoir de suivre cette voie se font de plus en plus rares ou ont peu de succès (bien injustement).
Nous pourrions nous dire que c’est simplement la musique qui a changé. Mais est-ce que nous pouvons sciemment qualifier de musique un titre de quelques minutes composé à partir d’un ordinateur, très répétitif, qui n’offre réellement qu’une mélodie, une ligne de basse et un rythme, certes bien tenu, mais très peu varié. Les prouesses instrumentales se font très rares et n’ont d’ailleurs pas leur place dans ce genre de morceaux.

Le genre, c’est ce qui pourrait tout expliquer.

 Il faut remettre les choses à leur place. il est d’une part évident que les boîtes de nuits ne pourront jamais créer l’hystérie avec des sonates de Beethoven ou des morceaux qui demandent une écoute empreinte de concentration. D’autre part, des artistes tout aussi talentueux et s’exprimant dans des genres plus compatibles ne trouvent pas non plus leur place en boîte de nuit à cause d’un manque de médiatisation.

Cependant l’art (nous l’avions presque oublié mais la musique est un art) que le philosophe allemand Arthur Schopenhauer décrivait comme « la plus haute forme d’intelligibilité offerte à l’homme », cette magnificence sonore sans laquelle Friedrich Nietzche disait de la vie « qu’elle serait une erreur », ne doit jamais et à aucun prix, disparaître. La musique, c’est le langage de l’âme, l’expression des sentiments. Pour rien au monde nous ne devons oublier ça, ou pire encore, le perdre.

Au final, deux choses apparaissent clairement. Il y a la musique d’un côté. Musique qui tant bien que mal reste un besoin pour la plupart des hommes, un soutien, une joie ou quoi que ce soit d’autre. De l’autre côté, il y a une entreprise qui met en vente à un rythme incroyablement rapide, des « produits miracles » qui se vendent tout seuls et disparaissent en quelques mois pour laisser la place aux suivants.
 
V.Moreau
 

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6 réactions à cet article    



    • zvalief 22 octobre 2010 19:31

      le problème c’est qu’aujourd’hui, il n’y a plus beaucoup de vrais chanteurs ; pour moi un vrai chanteur est quelqu’un qui rend mieux en live qu’en studio ; et pas beaucoup d’originalité, franchement qu’en j’essaye d’écouter de la musique d’aujourd’hui j’ai l’impression que c’est tout la même chose. une autre preuve (je pense) du manque d’intêret pour la musique d’aujourd’hui, c’est quand je vois mon petit frère et tout les garçons et filles de sa génération (entre 15 et 18 ans) autour de lui, ils écoutent pratiquement que des chansons des années 80.


      • fredleborgne fredleborgne 22 octobre 2010 19:48

        Très bon article qui explique les baisses de vente mieux que les théories liées au piratage.
        De plus, les majors ne savent pas vendre des classiques amortis à bas prix, mais font de coûteuses rééditions (coûteuses pour l’acheteur) afin de ne pas créer de grosses différences entre le prix des « nouveautés » et celui des tubes du passé, qui permettraient de comprendre que l’argent ne va ni aux artistes, ni aux coûts de fabrication mais dans la marge spéculative des majors..
        Je ne sais plus lequel avait dit qu’il fallait corriger ce manque de qualité des nouveauté, mais rien n’a été fait. De plus, la musique ne se porte pas si mal si on en croit cet article
        http://www.numerama.com/magazine/11254-pascal-negre-invite-d-un-chat-01net-mercedi-19h-maj.html
        La musique de cette « culture marchande » repose d’ailleurs sur un oxymore pas évident pour les adeptes de la « rareté », d’où son échec à terme puisque ces gens sont incapables de comprendre que la société a changé, et que les mega bénéfices engrangés par le disque, les cassettes et les CD, c’est terminé. Ils en ont bien profité, quand la source se tarit, pourquoi devrait-on les plaindre ?


        • slipenfer 23 octobre 2010 11:50

          Les musiciens jouent,les platines répètent,ou sont passé les bars enfumées ou
          se produisaient nos zicos ?
          les petits orchestres on été remplacés par des jukebox et les batteurs
          par des boites a rythme.
          les gros concerts c’est pour le fric.


          • cuiller 24 octobre 2010 21:36

            Il ne sert à rien de s’acharner comme ça ! Le CD est mort ou va bientot mourir, soit . Les majors tentent désespérément de maximiser leur profit le plus rapidement possible, tant la fin semble proche , OK . D’où la simplicité des singles commerciaux, d’où l’importance donnée au marketing (où à l’image comme vous dites). Soit. 
            La ou je ne suis plus d’accord avec vous, c’est qu’il y a plétore d’artistes qui ne vivent qu’ avec « l’objectif artistique » en tête ! Et le fait que les rémunérations dues aux ventes d’albums baissent de plus en plus fait que le nombre d’artistes ( au sens pur du terme) tend à augmenter mécaniquement ! en effet, quel autre interet peut on avoir à faire de la musique si on sait que notre rémunération diminuera ?
            A ce propos, je pense qu’un bon indicateur est de voir le nombre de myspaces musicaux qui se créent chaque jours !
            J’appartiens à une génération qui considère la musique comme un art gratuit, et c’est tant mieux. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à faire un tour sur myspace et trouver de très jeunes groupes arrivants à faire de leur musique la synthèse de leurs influences multiples, auxquelles ils n’auraient jamais pu avoir accès si la musique avait été payante, ou en beaucoup plus de temps. 


            • Antoine 28 octobre 2010 22:28

               Il est pour le moins curieux de mélanger culture et musique dans cet article. Qui a une culture musicale dans ce pays : 0,01 % de la population ? et encore je suis probalement beaucoup trop optimiste. Qui connait les opéras de Prokofiev, Janacek, Penderecki, Eörvös, etc..Choisissez un autre mot que culture !

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