Entre dénigrement élitaire et ressentiment victimaire : la mise à mort de la culture française
Ces quarante dernières années, les Français ont été amenés à croire que leur culture les avait conduits à imposer à un monde innocent leur supériorité barbare. Du passé, les élites leur ont instamment demandé de ne retenir que les meurtres de masse de la seconde guerre mondiale, la collaboration vichyste et les « méfaits » de la colonisation. Elles ont même très largement sous-entendu que la culture européenne devait intrinsèquement conduire à cette barbarie. Elles ont donc éduqué les jeunes français dans la honte de ce qu’ils sont et dans l’oubli de ce qu’ils ont été, fabriquant une légende noire comme substitut non seulement au récit national, mais encore à la richesse toute paradoxale de leur histoire. Cette légende noire a ensuite été assénée à des centaines de milliers d’enfants au nom des « valeurs de la République ». En miroir, ces mêmes élites ont glorifié l’étranger, d’où qu’il venait, parce que dans leur doxa masochiste, un étranger ne pouvait être que foncièrement meilleur qu’un Européen. Elles ont donc organisé l’immigration de masse, l’imposant d’autant plus facilement au peuple français qu’elles oeuvrèrent sciemment à son abaissement moral et historique. Dans leurs cerveaux malades, le monde comptait d’un côté les salauds d’Européens et, de l’autre, les victimes non européennes. Pour les premiers, le mépris et la culpabilisation ; pour les secondes, l’innocence et la compassion.
Le résultat, nous l’avons aujourd’hui sous nos yeux : les Etats étrangers se moquent de nous et se jouent de notre masochisme. La Turquie réislamise Sainte-Sophie en prétendant n’avoir aucune leçon à recevoir de pays « islamophobes ». N’est-il pas d’ailleurs un peu « islamophobe » de critiquer la transformation de Sainte-Sophie en Mosquée ? La même Turquie qui ne se gêne pas pour inscrire son action, en Libye, dans le sillage de feu l’Empire ottoman. L’Algérie, quant à elle, exige des excuses de la part de la France à cause de la guerre coloniale et, si elle le fait, c’est parce qu’elle pense réellement que la France pourrait tout à fait s’excuser par la voix d’un des derniers avatars de la France abâtardie (le macronisme). Sur le plan intérieur, parmi les populations immigrées, certains ne voient pas la nécessité de s’assimiler à une culture préexistante, quand d’autres la rejettent ouvertement. Et au nom de quoi proclament-ils un tel rejet ? Au nom, bien-sûr, du supposé fascisme rampant du peuple d’origine. La dénonciation d’un privilège blanc structurel n’étant que la formulation victimaire du dénigrement des populations d’origine par les élites dirigeantes françaises.
Ainsi les élites progressistes ont-elles fabriqué et entretenu un discours de dénigrement des « héritiers » du passé européen. Elles ont, dans le même temps, entravé la transmission de ce passé aux populations nouvellement arrivées (invitées à cultiver leur propre « mémoire » historique) tout en facilitant leur installation en masse sur le territoire. Ce programme était dangereusement fou, quand on y pense, car tout à fait propre à instaurer les germes d’une future guerre civile. C’est qu’elle ont peut-être cru que les victimes resteraient bien sages. Peut-être parce qu’au fond, elles les voyaient un peu comme le bon sauvage de Rousseau. Hélas, nul ne fabrique du ressentiment impunément. Vient d’abord le jour où la victime revendique ses droits avec l’ivresse de celui qui se sait du côté de la justice. Le carburant du ressentiment alimente alors une frénésie revendicative : la victime étant toujours dans son bon droit, ce n’est jamais assez, et chaque conquête en appelle une autre. Puis vient le temps où la victime se sent alors le droit de revendiquer sa supériorité. Elle avait déjà la supériorité morale, elle veut désormais la supériorité tout court. Habitués à baisser la tête, les prétendus « oppresseurs » sont alors prêts à être durablement rabaissés : soit qu’ils applaudissent une domination qu’ils estiment mériter, soit qu’ils aient perdu jusqu’à « l’instinct » de se défendre devant qui les méprise et les agresse (par exemple, quand on déboulonne ou quand on tague leurs statues au grand jour).
Quand le cauchemar sera passé, que la boucle aura été bouclée, nous retrouverons alors l’élémentaire vérité que nos élites gouvernantes se seront évertuées à nier : l’humanité est un vaste océan de barbarie sur lequel, parfois, et comme par miracle, surgissent des îlots de civilisation. Et dans cet océan où se succèdent les peuples, aucun d’eux n’est vraiment innocent ni complètement coupable. Les Français ont certes colonisé une bonne partie de l’Afrique, apportant au passage à ce continent les progrès de la modernité européenne. Mais avant eux, les Arabo-musulmans mirent fin, et pour toujours, à l’Egypte grecque et chrétienne, occupèrent la péninsule ibérique pendant de nombreux siècles et ne furent arrêtés qu’à grand peine, à Poitiers, au 8ème siècle. Inutile de préciser que ces conquêtes furent violentes et que nul ne s’en excuse aujourd’hui. Plus tard, les Turcs tentèrent à plusieurs reprises de conquérir Vienne et Budapest, rêvant de faire tomber l’Europe chrétienne. Avant eux, Rome brûla Carthage avant que les peuples germaniques ne pillâssent Rome à leur tour. Dans la ronde tragique de l’Histoire, une seule loi règne, froide et austère, aussi éternelle qu’implacable : celle des rapports de force. Et, comme le disaient jadis les Romains, le malheur est d’abord et toujours celui du vaincu.
En conséquence de cette loi, continuer à dénigrer ce que nous sommes ne conduira qu’à la folklorisation de la culture française. Autrement dit, au train où vont les choses, cette dernière finira par n’être, chez elle, qu’une culture parmi d’autres. Une culture de moins en moins majoritaire et d’autant plus affaiblie qu’en vertu de son ancien statut central, elle continuera d’être brocardée par les autres cultures, les seules qui jouiront du droit chatouilleux de se faire entendre et se faire respecter (ce qui semble presque déjà être le cas). Et s’il m’importe que cette culture française ne devienne pas un folklore chez elle, ce n’est pas seulement parce qu’elle m’a largement forgée. Mais parce que parmi les îlots de civilisation qui brillent au-dessus de cet océan trop barbare qu’est l’humanité, elle resplendit d’un éclat qu’aucune âme sincère ne saurait lui nier. Cette culture, comme les autres, a pratiqué l’esclavage, mais dans le même temps et contrairement à tant d’autres si fières d’elles-mêmes, elle l’a également aboli. Cette culture qui a produit tant de joyaux dans le domaine des arts et de la pensée ; qui contribua activement aux progrès des sciences et des techniques ; qui accoucha d’une relation si riche et si féconde entre les hommes et les femmes ; qui inventa, avec les Anglo-saxons, la démocratie libérale grâce à laquelle tous ses ennemis de la « diversité » peuvent impunément lui faire la guerre aujourd’hui.
Végéter à l’état de folklore ou rayonner d’un éclat nouveau : telle est l’alternative contemporaine de notre culture française. Et comme toujours, c’est sa force vitale interne qui décidera de son sort. A nous de la lui insuffler, en commençant par lui redonner l’orgueil que tant d’inconséquents lui ont arraché. Étant précisé que cet orgueil est la condition même du caractère inclusif de notre culture et qu’à tout prendre, une culture dominante mais inclusive vaut mieux pour tout le monde qu’une « diversité » dont la connotation positive ne saurait effacer ce à quoi elle conduit réellement : à la balkanisation pure et simple de notre société.
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