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Espèce de vieille BIC

Cette nuit, j'ai fait un rêve. Oh non, pas un songe du genre polluant ton réveil ou tes draps, plutôt du genre un peu bizarre, interpellant. De ceux dont on cherche la signification bien après les premières volutes de café ou le passage de la lame du rasoir.

Le voici ce rêve.

J'étais un stylo BIC rouge. Enfin je crois, c’était peut-être une autre marque, mais il ressemblait tout de même furieusement à la célèbre marque jetable (y’a que la planche à voile que j’ai gardée de chez eux). Un stylo qui n'avait jamais écrit. Le genre puceau du gribouillage, abandonné des pages blanches à la naissance. Jeté dans le caniveau de l'absence d'inspiration. Toute mon enfance, je n'étais manifestement pas à ma place, j'étais le petit BIC perdu sur la table d'un dessinateur au fusain, j'étais le vieux stylo dans le mug d'un geek. J’étais orphelin de l’inspiration dont mon maître aurait dû être submergé. C’était la stylose.

 

A un moment de cet enfer onirique, je décidai de me prendre en main, ou en bouchon, enfin on s'en fout. Je n’allais pas jeter l'éponge, ni l'encre d'ailleurs. Le sang rouge coulait encore dans mon réservoir, je n'étais pas bouché (en tout cas, pas plus que le premier connard venu) et j’avais de l’énergie à revendre.

 

Par où commencer me dis-je alors ?

Déjà par m’enfuir, c’était l’évidence même. Je profitai d’un air absent de mon propriétaire (qui m’avait acheté un jour de grand désœuvrement à n’en point douter) et je sautai par la fenêtre. Je me réceptionnai sur la bille (ceux qui sont sensibles de cet endroit-là comprendront) et continuai ma route, cloquebicant.

 

Les premiers jours furent dures, le vent frais, le soleil peu amène. Je me desséchai littéralement d’ennui.

Puis un jour vint une révélation. L’histoire n’était-elle pas à écrire ? Pourquoi attendre la main qui me guiderait, alors que je pouvais être mon propre maître ?

 

L’astre du jour devint tout à coup (c)rayonnant et je me mis à ré-écrire mon histoire.

 

L’actualité devint mon terrain de jeu, j’allais remettre de l’arc-en-ciel là où le monde ne voyait que fadeur. Finie la grise mine. Pourquoi écouter ce que tout le monde me disait devoir penser alors que je pouvais être moi-même ? Je ne sais plus qui disait « n’essaye pas d’être quelqu’un d’autre, de toute manière la place est déjà prise », mais encore une fois on s’en foutait. Je renaissais d’entre les vieux stylos tous pourris.

 

Le vol Malaysian Airlines devenait l’acteur principal d’une nouvelle saison de Lost, tandis que le retour des habitants de Fukushima en leur demeure les faisait s’extasier devant la taille des tomates du jardin ; des ONG portaient plainte contre la météo pour pollution aux particules fines, les frères Bogdanoff se présentaient aux municipales de Menton, bref tout se parait d’une couleur rouge insensée : la mienne.

Parfois, l’inspiration venait à se tarir et j’étais aussi sec que des dessous de bras dans le désert saoudien, ne distillant que des informations sans intérêt, de la merde quoi (les fameuses crottes de BIC). Mais je me reprenais toujours, la vie en moi étant plus forte que tout.

 

Puis vint l’envie – comme ça – de connaître mes origines. N’étais-je que le produit standard d’une usine d’assemblage à la chaîne ? Une sorte de clone triste ? Tout ce sang rouge en moi n’était-il qu’un produit industriel ?

 

C’était impossible. Inimaginable.

Je poussai donc les portes d’un institut de recherche en paternité – non sans mal, je n’ai pas l’agilité d’un compas – pour connaître mes origines.

 

Et puis, j’attendais. Fébrile. La mine tremblante, le réservoir s’écoulant tel le goutte-à-goutte d’un mourant, je restais près du téléphone jusqu’à cette révélation : j’étais le fils caché de Paul-Le-Poulpe. Aucune erreur possible.

 

Et là, je me suis réveillé.

 

Putain, j'ai jamais fait un rêve aussi con.

 

Mais questionnant cependant. Comment choisit-on sa voie ?

Je me suis souvent dit que si j'étais un "voleur" (mais la conseillère d'éducation ne me l'a pas proposé, cette truffe), j'aurais super déchiré dans cette voie professionnelle. D’ailleurs, ce week-end je me suis fait pirater mon compte Amazon. Il y avait deux cartes bleues enregistrées sur mon compte. Le voleur a utilisé celle qui était périmé.

 

Lui a fait le mauvais choix.

 

---

 

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5 réactions à cet article    


  • Loatse Loatse 11 mars 2014 13:20

    « L’astre du jour devint tout à coup (c)rayonnant et je me mis à ré-écrire mon histoire. »
    Le vol Malaysian Airlines devenait l’acteur principal d’une nouvelle saison de Lost, tandis que le retour des habitants de Fukushima en leur demeure les faisait s’extasier devant la taille des tomates du jardin ; des ONG portaient plainte contre la météo pour pollution aux particules fines« 

    Je ne sais pas de quelle couleur était le mien, mais hier soir j’ai émis l’hypothèse devant un auditoire médusé (je comprend :) que le vol de la Malaysian Airline, s’était trouvé happé par un vortex magnétique dû à l’extension du triangle du dragon... (comme celui du golf d’aden) et que tous ces disparus n’avaient en fait que changé d’espace temps, retrouvant sans avoir conscience de cela, les leurs dans une autre dimension aussi réelle que la nôtre...

    concernant la plainte contre la pollution aux particules fines,... je crois l’avoir entendu aux actus hier soir. (on avance, on avance !)

    Reste les tomates...

    Tous à nos »stylos"... smiley


    • Fabienm 11 mars 2014 13:22

      @Loatse : imaginons que le vol n’ait jamais existé, que cela ne soit qu’une immense campagne marketing très bien orchestrée dont nous connaîtrons le dénouement dans quelques jours.
      Imaginons...

      (merci)


    • Loatse Loatse 11 mars 2014 14:18

      sans stylo magique :

      Que disparaissent des gens dont le métier consiste justement à rendre invisible, c’est étrange...

      « Freescale Semiconductor, une firme basée à Austin au coeur d’un vaste programme visant à combler les besoins de puissance RF de l’aérospatiale et de la défense des États-Unis et disposant d’une équipe de spécialistes dédiée à l’appui aux forces de défense, a confirmé hier que sur les 239 passagers sur un vol Malaysia Airlines MH370, 20 sont ses employés. Douze sont originaires de la Malaisie et huit de la Chine .


      Les produits commerciaux de Freescale couvrent divers secteurs :

       -Les Communications sur le champ de bataille
       -L’avionique
       -Les bandes radar HF par L et S
       -Le guidage des missiles
       -La guerre électronique
       -L’identification, ami ou ennemi (IFF ) »

      sources : Examiner.com/les chroniques de rorschach


      • Alpaco 11 mars 2014 17:22

        Cher Fabien,

        une fois encore un temps de retard, hé oui, hé si.
        Et toujours avec l’excellent style qui te caractérise.

        Le stylo est un moyen, utilisé avec les doigts, qui selon les philosophes et autres agrégés de savoir des performances humaines, permet grâce au pousse opposable, de tenir un crayon, un marteau dans une main, un clou dans l’autre : le travail serait né ainsi.
        Des aptitudes de nos mains sous le conseil de notre esprit.

        Un jeune écrivain écrivait des phrases drôlement incroyables mais pas très drôles car elles ne parlaient de rient.

        Moralité : à quoi ça sert de raconter une fable sans morale ?

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