Et maintenant on fait quoi Angela ?
La victoire du non en Grèce sonne comme une terrible défaite pour la chancelière allemande
Le non, OXI, l’a donc emporté lors du référendum grec. Plus de 60% des Grecs ont exprimé leur refus de la politique d’austérité imposée depuis près de 5 ans par la Troïka. Avant le référendum, le FMI avait déjà commencé à se désolidariser de la BCE et de la Commission Européenne en exigeant une restructuration, voire un effacement, de la dette grecque. Barack Obama s’est joint à cette demande du FMI, à la surprise générale. Les institutions européennes se retrouvent donc seules à exiger obstinément des mesures d’austérité pour la part du gouvernement Grec.
Angela Merkel apparait donc comme la grande perdante de ce que certains appellent désormais l’OXI Day. Le non franc et massif que les Grecs ont exprimé aujourd’hui s’exprime avant tout à l’Allemagne, à Angela Merkel et à Wolfgang Schäuble, ministre des finances allemand et tenant d’une ligne dure à l’égard de la Grèce. « Un non à l’hégémonie allemande » titrait Der Spiegel peu après l’annonce des premiers résultats partiels. Alors quelles conséquences en Allemagne du non grec ?
Merkel a perdu la partie de poker
Jeudi matin, Tsipras a fait parvenir deux lettres aux dirigeants européens pour leur faire part de sa volonté de trouver un accord avant la tenue du référendum. A cette demande exprimée par le gouvernement grec, Angela Merkel n’a opposé que le mépris et la fermeté affirmant devant le Parlement allemand « qu’aucune négociation ne [pouvait] avoir lieu avant le référendum » et ajoutant que « les problèmes grecs sont surtout un problème pour le peuple grec ». En somme elle a sciemment parié sur une victoire du oui au référendum. Est-ce un hasard si Martin Schulz appelait dès jeudi à remplacer le gouvernement Syriza par un gouvernement de technocrates dès lundi ?
Angela Merkel, en concert avec Jean-Claude Juncker, a donc fait campagne pour une victoire du oui. Cette campagne menée par tous les grands médias européens reposait principalement sur une campagne de terreur : votez oui ou sombrez dans le chaos disait-on aux Grecs. Cette campagne du chaos s’appuyait principalement sur le contrôle des capitaux mis en place par Alexis Tsipras lundi dernier. Finalement à toute cette campagne fondée sur la peur, frisant la propagande par moment quand Jean-Claude Juncker appelait les Grecs à « voter oui quelle que soit la question », les Grecs ont opposé une fin de non-recevoir et ont réaffirmé la liberté du peuple face aux puissances des médias et de l’argent. Angela Merkel a voulu jouer au poker en pariant sur une victoire du oui pour éjecter Tsipras et son gouvernement anti-austérité. Elle a perdu et Tsipras a gagné. La voilà dans une position bien inconfortable.
Merkel forcée à la politique du pire par son parti ?
Les négociations sont désormais censées reprendre pour parvenir à un accord. Tsipras, fort du OXI exprimé par son peuple, souhaite évidemment arriver à un infléchissement de la politique d’austérité réclamée par la Troïka. Angela Merkel a, pour sa part, une nouvelle fois rappelé que pour l’Allemagne, il ne « peut pas y avoir de solidarité sans effort ». Wolfgang Schäuble est bien entendu sur la même ligne, voire sur une ligne encore plus sévère à l’égard de la Grèce. La réalité, c’est que Merkel est prisonnière de son parti et que même si elle voulait faire des concessions à Tsipras elle ne le pourrait pas.
Je m’explique : en Allemagne, toute décision économique ou ayant trait à la souveraineté du pays doit être validée par le Parlement. Et c’est la principale pierre d’achoppement pour la chancelière allemande. La majorité des députés de son parti, la CDU, est en effet farouchement hostile à tout nouveau plan d’aide pour la Grèce ou tout rééchelonnement de la dette grecque. Angela Merkel se retrouve donc dans une situation délicate par rapport à ses partenaires européens puisque l’économie grecque vit sous perfusion. Mise sous pression par la presse conservatrice très puissante en Allemagne et les députés de son propre parti (environ un tiers des députés CDU), Merkel pourrait bien jouer la politique du pire et comme César pendant les combats de gladiateurs baisser le pouce et exiger que la BCE mette fin au plan d’aide d’urgence aux banques grecques. Cette perspective équivaut tout simplement à éjecter de facto la Grèce de la zone euro. La réunion de travail avec François Hollande lundi soir revêt alors d’une importance capitale.
Se rasseoir à la table des négociations ou signifier la sortie à la Grèce, voilà la négociation que va devoir mener la chancelière allemande avec les propres membres de son parti mais une chose semble sure, un « Grexit » précipiterait une période de très fortes turbulences pour l’UE.
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