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Accueil du site > Tribune Libre > Et si l’avenir s’inspirait aussi du passé ?

Et si l’avenir s’inspirait aussi du passé ?

L’humanité est ancienne, de deux à six millions d’années. Pourtant, son évolution ne s’est mise à accélérer de façon pratiquement exponentielle que depuis les cinq cents dernières années. A ce titre, la (re)découverte des Amériques a marqué le début d’une phase d’expansion humaine sans précédent, et donc le véritable début de la mondialisation.

Et si l’avenir était le retour vers le passé ?

A première vue, ce type de question renvoie à une conception du monde plutôt réactionnaire et misanthrope.

Pourtant, la modernité, le progrès, signifient-ils que les modes de vie du passé sont "mauvais", tandis que le progrès technique serait l’unique et ultime salut de l’humanité ?

En l’occurrence, il y a "progrès" et "progrès". Notre civilisation fonde ses espoirs de bonheur universel sur les développements de la science, le bien-être matériel pour tous, la longévité, la sécurité, une vie de loisirs et d’amusement, d’échanges intercontinentaux et de progression sociale individuelle... De mon point de vue, cela part d’une conception erronée de l’épi-phénomène "vie" en général.

Dans le système de valeurs en cours, la vie est idéalisée comme une sorte de paradis "figé", où les différentes espèces se côtoieraient harmonieusement, dans une coexistence pacifique, en tolérant, toutefois, l’idée d’une chaîne alimentaire. Or, il me semble que dans la réalité, la vie, dont l’espèce humaine n’est qu’un simple représentant parmi d’autres, est plutôt dynamique. A l’échelle géologique, les équilibres naturels sont précaires, et plutôt temporaires, les alliances entre espèces (symbiose, mutualisme, commensalisme, parasitisme) se font et se défont au fur et à mesure des opportunités. La plupart du temps, les espèces sont interdépendantes les unes des autres, avec des phases d’expansion et de recul cycliques.

Parfois, des systèmes d’interdépendance très complexes se mettent en place. L’exemple typique est l’écosystème forestier, où chaque élément partie prenante a un rôle à jouer pour la pérennité du tout, dans une sorte d’"équilibre" apparent. En fait, le système est à la merci de la déchéance de l’un des protagonistes. Une modification climatique, une pollution, une maladie, et tout le système peut s’effondrer d’un coup. En effet, toutes ses composantes sont liées les unes aux autres par la chaîne trophique, en particulier, mais pas seulement, elles le sont aussi par des modèles de coopération inter- et extra-spécifiques.

L’espèce humaine, par ses options de développement, agit en quelque sorte comme un agent pathogène du système terre. Et c’est patent ! Ce serait présomptueux de dire que l’homme est capable d’anéantir toute vie, dont celle créée par d’autres instances avant sa propre apparition en particulier. En revanche, l’homme est capable de suffisamment altérer le "système" vie pour risquer de disparaître lui-même, et laisser la place à des espèces s’adaptant plus vite (insectes, virus, bactéries...) Ces espèces, beaucoup plus souples, avec des cycles de mutation beaucoup plus rapides (de quelques jours ou mois), seront en mesure de s’adapter plus efficacement à de nouveaux environnements créés par les hommes et leurs activités. Attendons de voir l’avènement et la mutation annoncés de la "grippe aviaire" pour comprendre notre douleur, le HIV ayant été déjà un premier signal.

Une forme de progrès aujourd’hui serait aussi d’admettre que le cheminement actuel pris par l’humanité n’est pas viable. Car si le progrès est fondé sur une conception économique consistant à produire toujours plus et à considérer que la biosphère n’est qu’un réservoir de ressources au service d’une perpétuelle croissance, alors je pressens l’effondrement de ce modèle, en seulement quelques décennies. Je ne suis pas en mesure d’étayer ce pressentiment par des données rationnelles, issues d’études scientifiques. J’écoute mes instincts, et j’observe des signes, par exemple : changement climatique, disparition des espèces, surpopulation, faim, maladies, effet dévastateurs des catastrophes à cause de la densité des populations, expansion humaine sur des zones dangereuses, promiscuité générant des guerres, accélération des voyages transnationaux...

Alors, quelle alternative ?
Une option parmi d’autres, qu’il reste à identifier, serait de tenter une marche en arrière contrôlée des civilisations, gérée et concertée avec, à la clef, un consensus de toutes les nations du monde. Laisser se réduire naturellement la part de l’espèce humaine dans le sérail des espèces, accepter une diminution des besoins des civilisations et des individus, n’utiliser que ce que la nature a le temps de recycler et réassimiler spontanément, adapter les modes de vie en tenant compte de la raréfaction ou de la dangerosité des ressources utilisées... Pour cela, le véritable progrès pourrait venir de la science, de l’ingénierie, de la médecine, de la philosophie, de la diplomatie, de la politique, de l’éducation, du législatif, de la coopération internationale (la mondialisation inversée en quelque sorte). Mais aussi, du passé !

S’inspirer des bonnes pratiques des peuples dits "primitifs", qui tirent respectueusement tous leurs moyens de subsistance de la nature ; qui ont des rapports avec la biosphère permettant un renouvellement des ressources, sans phénomène d’hypersaturation ; qui ont une tradition de père en fils et de mère en fille ; qui communiquent entre les générations. Bref, qui ont un système de valeurs simple et pérenne, fondé sur une valeur et son anti-valeur : tout ce qui promeut la vie et la favorise est "bon", tout ce qui écarte la vie et la détruit est "mauvais". Bien sûr, il ne s’agit pas d’une morale à appliquer radicalement partout ou à suivre au pied de la lettre, il faut l’adapter à nos différentes civilisations. En quelque sorte, les dix commandements revisités, fondements de la plupart des civilisations humaines. Une espèce de plus petit dénominateur commun.

Voilà donc une nouvelle vision du "progrès", en revenant partiellement à des habitudes datant de la pré-révolution industrielle, tout en conservant le meilleur du monde moderne : c’est-à-dire ce qui ne nuit pas à l’épiphénomène vie. Ce type de plan "Back to the future" pourrait prendre plusieurs décennies, le temps que le monde devienne suffisamment multipolair,e et quelques siècles, pour en sentir les premiers effets. Savoir si la biosphère attendra que l’espèce humaine apprenne !


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2 réactions à cet article    


  • Alexandre Santos (---.---.183.195) 27 octobre 2005 11:19

    “son évolution ne s’est mise à accélérer de façon pratiquement exponentielle que depuis les cinq cents dernières années”

    Vous devriez préciser ce que vous entendez par « évolution ». Si c’est biologique, c’est faux, si c’est démographique, c’est tout à fait correct. Si on parle de culture, c’est sujet à débat.


    • HKac HK 27 octobre 2005 11:28

      Bonjour, Je faisais référence à un contexte plutôt démographique, économique et aussi conceptuelle (la manière d’envisager le monde par une civilisation qui a développé des moyens de conquête qu’ils soient commerciaux ou guerriers). N’oublions pas que cette « évolution » n’a pas été positive pour tout le monde. Elle a donné lieu à des spoliations et à l’esclavage.

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