Et si le talent était de bêtise ?
S'attaquer au talent, voilà bien la posture du jaloux, du Jérémie.
« Vraiment de quoi aurais je l'air, j'entends déjà les commentaires, LUI est joli, comment peut il ainsi défaire ? LUI si sublime, sezig grégaire ? » - sur l'air de « il suffirait de presque rien » – S. Reggiani - https://www.youtube.com/watch?v=FqaSdy3lR7Q.
Et pourtant !
Cloclo, immortel au Panthéon de nos chanteurs populaires français, est mort « accidentellement » à 39 ans, électrocuté dans la salle de bains de son domicile parisien, le 11 mars 78, alors qu'il prenait une douche. « En redressant pour la énième fois, en maniaque du détail qu'il est, l'applique électrique murale de travers située au-dessus de sa baignoire, ses doigts restent collés au cuivre, les fils étant en partie dénudés. Ironie du sort, un électricien était venu le mardi matin précédent pour des problèmes électriques dans son appartement mais n'avait pu accéder à la salle de bain : il aurait fallu, pour l'atteindre, traverser la chambre dans laquelle dormait Claude et sa secrétaire Françoise le lui avait interdit pour ne pas le réveiller »*1. Cloclo se lève à 15h, il doit enregistrer une émission avec Drucker en fin d'après midi, alors qu'il rentre juste d'une séquence épuisante d'enregistrement en Égypte, il est même rentré tout seul, en pleine nuit, au volant d'un avion de tourisme, capricieusement affrété pour lui.
Maniaque, obsédé du détail – il ne supporte pas que quelque chose soit de travers ou dans son travers, que ça ne se passe pas « comme il l'a dans la tête », n'est ce pas « se confiner à rester borné, à s'enferrer dans sa logique », donc être bête ? (cf : La bêtise généralisée en Occident, entrave majeure à une société pour tous- http://cjoint.com/?DLqgioHpM2F ). Et pourtant, que de chansons de Claude François traînent encore dans nos têtes, nous « des sixties » ?
Et la liste serait longue des « artistes » connus pour « quelqu'un qui développe et soutient, avec une très forte opiniâtreté, un système d'idées, à partir de ses obsessions ». Des copistes d'enluminure à Andy Warhol – tenant de l'art commercial, de Montand à Johnny qui n'a pas bougé d'un pouce en 50 ans de carrière, de Prost à tout sportif de haut niveau. Ils ont, ils ont eu tous besoin de cette ténacité indéfectible pour réussir.
Mais est ce de l'art ?
Au 1er abord oui : « L’art est une activité humaine, le produit de cette activité ou l'idée que l'on s'en fait, s'adressant délibérément aux sens, aux émotions, aux intuitions et à l'intellect »*1. Cette forme d'art a excellé dans toutes les civilisations, en tant que témoin du temps. Mais si on attend de lui, transgression, ouverture des âmes humaines vers un futur encore en friche, élan intime pour se transformer soi, sa vie. Non.
Attention, ce billet n'est pas l'ouvrage d'un spécialiste de l'art, loin s'en faut. Son sujet, c'est de pointer ce qui relève de la bêtise dans notre société, une bêtise qui, en l'occurrence, peut se revêtir des plus beaux atours, une bêtise qui n'aurait besoin que de rencontrer la bêtise des autres pour être encenser. Longtemps, je me suis demandé comment un Jean Luc Delarue - Ça se discute, la 1ére télé réalité en France (2007), pouvait coller aussi bien avec ses invités, à son parterre. Comment il pouvait anticiper, accompagner « à la culotte », les témoignages personnels. Et même les accoucher au delà de ce que la décence de la vie privée semblait autoriser. Et bien c'était possible, et son « génie » était à cet endroit, car toute sa pensée était organisée à l'ancre de la pensée conventionnelle, il s'y baignait « comme un bienheureux », dans toute cette encre .
J'ai pu écrire dans le texte cité plus haut*2, « qu'une personne qui s'attache massivement, aux conventions, perd ou occulte sa dimension intime, dimension indispensable pour établir des relations vraies et authentiques avec les autres et avec soi-même ». De là à penser que ça a participé de sa mort à 48 ans . . . mais quel talent !
Ami-es d'Agoravox, cultivons en ce sein, une propension à nous surprendre les uns les autres, à nous écarter des sentiers rebattus de l'actualité dans lesquels on veut nous confiner . . . au service des puissants. Conjuguons nos talents pour faire d'Agoravox, un instrument accordé d'émancipation, un outil de plaisir et de partage.
Allez ! Ne soyons pas bêtes
*1 : sources Wikipedia
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