Etat d’urgence : les premiers dérapages
Alors que l’état d’urgence a été voté pour trois mois en raison des attentats du 13 novembre, des militants écologistes viennent d’être assignés à résidence dans le cadre de la COP21. Les Français, anesthésiés par les discours néoconservateurs du chef de l’Etat et de son Premier ministre, éblouis par les cérémonies pavoisées de drapeaux tricolores, dopé par la violence marseillaise (qu’un sang impur abreuve nos sillons), galvanisé par les bombes larguées sur l’ennemi, ne semblent pas voir s’installer l’arbitraire qui se glisse et s’installe insidieusement dans notre pays.
Pour la première fois en France, sous la Ve République, des Musulmans semblent avoir été assignés à résidence sur de simples dénonciations, comme au « bon vieux temps » de l’Occupation. Plus inquiétant encore, ce sont des militants écologistes et gauchistes qui ont été assignés à résidence, sous couvert de la loi établissant l’état d’urgence et votée par le Parlement dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.
Ainsi, les premiers dérapages auxquels on n’osait croire ont bien eu lieu, sous un gouvernement dit « de gauche ». Dans son discours en hommage aux victimes des attentats, le président de la République a même averti que la France dérogerait aux obligations de la Convention des droits de l’Homme. Ainsi, au-delà des bonnes intentions relayées par des médias béats et quelques bobos parisiens brandissant des slogans de Bisounours, c’est avec une main de fer que le couple Hollande-Valls tient désormais le pays.
Ce qui était à craindre de Nicolas Sarkozy s’est concrétisé avec son successeur, celui-là même qui était censé incarner la rupture (« Moi président... »). Un coup d’Etat a bien eu lieu, le deuxième en moins de dix ans. Désormais, sous couvert de lutte contre le terrorisme, et dans la droite ligne du Patriot Act néo-conservateur américain, la liberté de manifester est entravée, la population surveillée, les droits fondamentaux « dérogés ».
Face à la montée de l’arbitraire, au cynisme froid d’un président et de son Premier ministre qui pavoisent après les attentats qu’ils n’ont rien fait pour empêcher, à un chef de la Diplomatie doctrinaire qui les a indirectement encouragés, à une propagande qui ne se cache plus, à l’indigence de ministres incompétents, à l’irrésistible montée du chômage et de la détresse sociale, aux invectives d’un patronat (MEDEF) toujours plus agressif, à une oligarchie toujours plus avide, à une justice toujours plus inique, à des médias toujours plus soumis, le peuple français restera-t-il sans réagir ?
Dans son roman satirique 99 francs, dénonçant le monde des communicants et autres publicitaires, Frédéric Beigbeder citait un de leurs principes de base : « Ne prenez pas les gens pour des cons mais n’oubliez jamais qu’ils ne sont ». Vu la remontée de François Hollande et de Manuel Valls dans les sondages, on pourrait croire à l'efficacité de ce principe, mais ce serait oublier qu'il n'est valable que sur le court terme. De fait, s'il ne change pas de stratégie, l'Exécutif se condamne à nager entre les vagues, toujours plus grosses, tel un "capitaine de pédalo" pris dans une tempête...
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