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Festival de Deauville : Jacquelyn Frohlich, itinéraire d’une réalisatrice américaine

Jacquelyn Frohlich en interview

Jacquelyn Frohlich vient de présenter en compétition au Festival du film américain de Deauville son film « Wayward » .

« Une toute jeune fille, en conflit permanent avec sa mère, est en route avec cette dernière de l'Idaho à Los Angeles, où elles vont s'installer. En chemin elles prennent en stop une jeune femme. La jeune fille s'attache rapidement à l'inconnue et développe une relation particulière avec elle, brouillant les frontières entre fugue et enlèvement, victime du syndrome de Stockholm ? Représentative de ces jeunes enfants négligés,sans chaleur humaine dans leur entourage, avec l'impression que personne ne s'occupe d'eux.

Jacquelyn Frohlich répond à nos questions sur son film, mais surtout sur elle-même, sa vie, son itinéraire, son travail, ses réalisations.

AR : Le public français ne vous connait pas. Une mini biographie s'impose :

Jacquelyn Frohlich : Je suis née à Bogota en Colombie. Comme vous avez pu le remarquer mon nom a une consonance allemande. La famille de mon père a fui l'Allemagne pendant l'Holocauste. La Colombie était un des rares pays à accueillir les juifs. Voilà la raison pour laquelle la famille a atterri là-bas.Je pense que j'ai la chance d'avoir vécu avec mes origines juives, avec ma famille juive dans un pays comme la Colombie. Pour moi, une expérience magique qui a beaucoup influencé mon travail.

AR:Partie aux USA pour des études universitaires, vous avez obtenu une maitrise en écriture. En quoi vos études ont-elles joué un rôle dans votre carrière artistique ?

JF : J'ai souhaité m'orienter d'abord vers un travail de romancière et j'ai compris dans cet apprentissage combien les personnages sont essentiels. Je suis absolument fasciné par les personnages qui sont à la marge, entre 2. Parce que nous sommes tous un mélange de bon et de mauvais. Mon travail, pour l'essentiel se focalise sur cette ambigüité.

AR : Expliquez- nous le passage de la littérature, le roman, à l'oeuvre cinématograhique.

JF : Le cinéma c'est mon choix de prédilection. Et quand on écrit un scénario, on est isolé dans un petit espace, à l'opposé de quelque chose de plus sociable. J'ai préféré m'isoler à l'issue de mon divorce.

AR : Vous avez commencé par des courts métrages.

JF : J'ai commencé par des films courts et c'est ma recommandation à titre d'exercice, pour tous ceux qui veulent faire des films. Tout le monde avec un Iphone peut faire un film. Et il faut pratiquer . En pratiquant la technique elle-même, c'est ce qui fait que l'on devient cinéaste. Tous mes courts métrages ont pour thème la connexion entre les gens. Connexions dans une même famille, mais aussi comment on se situe dans le monde.

AR : L'an dernier au même festival de Deauville où vous êtes en compétition, Vivian Kerr dont « Scrap » était le premier long métrage, m'avait fait part des difficultés à trouver les financements nécessaires.

JF : Au départ on m'a proposé beaucoup pour le financement.Mais j'ai préféré m'orienter vers un budget extrêmement raisonnable. Afin que je puisse préserver mon indépendance. On a sollicité des fonds auprès d'amis, auprès de ma famille et j'ai pris cette solution.

AR : Qu'avez-vous voulu montrer avec « Wayward » votre premier long métrage ?

JF : Je pense que l'univers de l'enfance est bien sûr beaucoup traité. François Truffaut avec notamment « Les 400 coups » m'a beaucoup influencé dans mon parcours et je le considère comme un modèle pour mon travail. Je trouve que les enfants ne sont pas toujours traités de manière honnête. Le thème de l'enfant seul est un thème universel. Il est important de consacrer des films aux enfants et de leur donner la parole.

AR : Vous avez indiqué que le premier scénario du film avait été écrit par rapport au regard de la mère de l'enfant.

JF : La première version du scénario ne marchait pas. J'ai été finalement convaincue que si je voulais être cinéaste, il fallait explorer les tréfonds de ma personnalité. J'ai préféré faire marche arrière et développer la situation à travers le prisme de cette adolescente.

AR : Caméra au poing, action en temps réel, personnages suivis pas à pas, impression de reportage, tout est fait pour que le spectateur soit interpellé

JF : Je voulais appréhender les attentes du spectateur, les conduire. Je voulais que les spectateurs soient transportés et qu'ils aient un point de vue éclairé par la position de la caméra sur la jeune fille. Nous avons souhaité que la caméra soit toujours là pour montrer le point de vue de l'enfant.

AR : Justement la direction d'acteur est-elle difficile avec une très jeune comédienne qui nous apparaît toujours très émouvante et convaincante.

JF : Chloé Guidry est déjà apparue sur l'écran mais c'était avec mon film son premier grand rôle. Cela a été extrêmement facile parce que les acteurs sont intuitifs . Chez un enfant l'apport de l'imaginaire est plus fort que chez un adulte.

AR : Vu de France le nouveau cinéma américain semble faire aux femmes une place de choix, réalisatrices, scénaristes, productrices, monteuses, compositrices...

JF : C'est excitant de voir autant de femmes à l'heure actuelle dans le cinéma. Mais ce que les spectateurs ne mesurent pas, c'est qu'aux USA on a à peu près 3% de femmes qui réalisent des films. C'est important qu'il y ait ce changement .Par exemple l'adolescente mérite qu'on exprime son point de vue parce que c'est une femme. Tous les points de vue sont nécessaires.

AR :Vous avez plusieurs fois exprimé votre goût pour le cinéma français. Votre « étoile du berger » comme vous dites souvent.

JF : Le cinéma américain a peur des moments de silence à l'écran. Alors que le cinéma français lui fait de la place. Le cinéma américain ne fait pas trop confiance au public, pour le suivre dans les méandres des personnages et des histoires. Il y a un respect des spectateurs pour les oeuvres qui n'est pas le même aux USA qu'en France

AR : Quels titres français aimez-vous ?

JF Bien sûr « Les 400 coups » de François Truffaut », les films de Claire Denis tous ses films et...tout Truffaut. Les films se transforment en nous par la manière dont on se les approprie, comme la nourriture. C'est peut-être la raison pour laquelle les français...(rires)

AR : La grève des scénaristes contre l'Intelligence Artificielle a gagné aussi les acteurs.

JF : L'I.A. fait très peur ; On a besoin de clarification.Des lignes doivent être tracées, à ne pas dépasser. Des règles sont nécessaires. Mon sentiment c'est qu'on ne peut pas remplacer l'âme humaine. Le danger c'est que la création meurt.

AR : En effet l'IA peut rechercher ce qui plait le plus au spectateur et lui fournir sans plus indéfiniment.

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Jacquelyn Frohlich
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Chloé Guidry

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