France inter : La loi des 5 W, et la mort de John Le Carré
Comment construit-on un journal audio ? Parler de la mort de Gérard Houillet, qui fut jadis l’entraîneur des bleus, est-elle l’information qui doit faire l’ouverture d’un journal ? C’est pourtant ainsi que le journaliste d’inter a ouvert son journal à 13 heures, ce 14 Décembre. La disparition d'Anne sylvestre, à 86 ans avait donné le premier titre de l’info, prenant la moitié du journal le premier Décembre.
Sans remettre en cause l’immense qualité de la créatrice des « fabulettes », et le trou sidérant qu’elle va laisser dans la création Française, une telle OPA sur l’information dans un journal de la radio publique, émettant à la mi journée était-elle raisonnable, au vu de la richesse de l’information…
Survenue le même jour que le décés de Gerard Houillet, la disparition annoncée de John Le Carré, auteur Anglais internationalement reconnu ne pouvait peser lourd. Aucun commentaire ! Exit l’auteur de « L’espion qui venait du froid » et de tant de chefs d’œuvres, écrits depuis un demi siècle.
C’est ainsi, le journal général d’inter de 13 h. Le même rata pour tout le monde ! Si ça vous plaît pas, et que vous voulez manger à la carte, faut aller sur la toile. Ou lire le journal. Car même dans les gazettes régionales, ces informations apparaissent. John le Carré. https://bit.ly/37kjaKV « Des livres lumineux sur un monde de mensonges » titre aujourd’hui par exemple « Le Figaro ».
« Il n’aura pas connu l’avènement de ce Brexit qu’il honnissait tant. John le Carré s’est retiré du monde avant de voir ses rivages de Cornouailles s’éloigner de l’Europe continentale. Dans son dernier livre, il avait mené une charge brutale contre le divorce du royaume avec l’Union européenne. Un acte « totalement irrationnel » selon lui. L’écrivain britannique était ainsi, l’âge n’avait pas lissé son caractère ni raboté ses passions, au contraire. Devant une course du monde qu’il ne goûtait guère, sa colère n’avait fait qu’enfler. « Avec le grand âge, je suis devenu plus radical que je ne l’ai jamais été », avait-il lui-même reconnu. »
John Le Carré aurait mérité une place dans le staff de l’équipe de Gerard Houillet. Ce british était un sacré bon technicien, avec une vraie science sur toutes les stratégies de jeu, reconnu sur tous les terrains de jeu du monde, autant à l’ouest qu’à l’est. Spécialiste aussi de l’Angleterre véreuse, tricotant des intrigues sur ces types au dessus de tous soupçons, qui passèrent jadis de l’ouest à l’est, et parfois inversement. Mais John Le Carré a su très bien surmonter la dissolution de l’état soviétique, qui aurait pu couper son inspiration…
Bref, un type bien utile à interviewer, même post mortem, à cette époque de Brexit atteint de hoquet, avec son Bojo chaque jour au réveil, répétant le même bulletin météo, comme dans le scénario d’« Un jour sans fin »
Je me suis demandé comment ils fabriquaient leur journal à inter, moi qui ne suit qu’un naïf ne connaissant rien au métier, et de l’impératif de boucler l’affaire à temps. J’ai bien quelques clichés en tête, datant terriblement, avec des rédacteurs autoritaires manageant leur équipe en les engueulant, comme dans un ces films de Capra, de Hawks ou des frères Coën. En cherchant de ci de là je me suis fait mon idée, avec le matériel de récupération que j’ai pu trouver dans le tout venant. J’ai laissé forcément des traces, et certains sites me promettaient déjà une formation de journaliste en quatre mois, par vidéo conférences payantes.
C’est dingue comment on est pisté très vite, malgré le masque covid réglementaire. Encore plus vite que dans un roman de John Le Carré, qui vous apprenait qu’on est jamais trop prudent. J’avais déjà des contacts…
Je vais vous faire mon rapport de vive voix.
Il y a des protocoles incontournables dans la vie d’un journal. Le matin il y a une réunion de rédaction, afin de dégrossir les sujets. J’ai plus ou moins mis à jour ce qu’on peut appeler le timing primitif ( Le journal - 24 heures dans une rédaction) https://bit.ly/3qUK6bS
Extrait :
-La première chose à faire est de relire les notes que vous avez prises pendant la conférence de rédaction. Cela vous permettra de vérifier que vous avez bien compris ce qui a été décidé pendant cette réunion. Grâce à cette relecture, vous pourrez vérifier également quels sont les éléments ou informations qui vous manquent ou qui sont incomplets.
-Inscrivez sur une liste les tâches à accomplir jusqu’au journal. Vous devez écrire ces éléments dans un ordre logique. Il s’agit ici de faire une sorte de « check list » de votre journal, sur le modèle de celle utilisée par l’équipage d’un avion avant le décollage. Vous pourrez barrer la liste au fur et à mesure de l’accomplissement des différentes tâches.
-Lisez la note de liaison rédigée par votre confrère, présentateur de l’édition précédente. De la même façon lisez le script de son journal. Si vous n’avez pas pu écouter l’édition précédente en direct, procurez-vous une copie et écoutez-la.
-Lisez les lancements des reportages qui sont déjà en boîte. Les reporters doivent laisser leurs reportages avec des éléments de lancement en précisant l’angle choisi.
-Ecoutez attentivement les sons qui sont disponibles. Notez les débuts et les fins de chaque son pour vous aider à rédiger les lancements. Notez la durée de chaque son.
-Communiquez avec les reporters. Faites-vous préciser les choses qui vous interpellent à la lecture des lancements et à l’écoute des sons. Renseignez-vous pour savoir qui est sur le terrain et quand ils vont rentrer. Téléphonez aux correspondants des autres rédactions pour vérifier que vous avez bien tous les éléments.
-Enfin pensez au rythme et à l’équilibre du journal. Avant de commencer à rédiger, ayez une idée précise de la forme finale de votre journal. Pour cela, posez-vous quelques questions : Est-ce que vous avez assez d’informations en bref ? Est-ce que vous n’avez que des papiers-plus-son ? Avez-vous des informations pour chaque grande région du pays ? N’avez-vous pas trop de sujets politiques et rien sur la vie quotidienne ?
Je suis sorti un peu déçu à la lecture de cette liste d’obligations et de devoirs, me rappelant à la fois l’école et le catéchisme. Et tenant aussi de la liste de courses.
Avec ça en tête, on pouvait sans doute briller à un entretien de sélection à radio France, mais pas au « secret intelligence service ». Allez savoir si avec tous les bouquins de John Le Carré que j’ai lus, je pourrais pas donner le change. Toutes les compétences sont appréciées. Enfin, ça dépendait qui on avait en face, de l’autre coté du bureau d’embauche.
J’avais imaginé je ne sais pourquoi, qu’un souci d’éthique, et de représentation des événements les plus importants du jour présidaient aux choix des sujets pour les journalistes d’un journal.
Mais le réel est dur, et mon oreille en coin du 13 heures, m’a rappelé davantage l’art du boutiquier, ou du fleuriste, tâchant de composer une vitrine alléchante, pas trop rébarbative, faisant varier les couleurs, et ne fâchant personne par sa crudité, ou une faute de mauvais goût. Tiens, ça me rappel un bon titre de Le Carré : "La constance du jardinier", une balade mortifère au pays de big pharma. C'est tout à fait d'actualité.
En cherchant encore un peu sur le net, j’ai trouvé quelque chose qui fait sens. Une sorte de mantra qui est à l'information, ce que 3,14 est au cercle. C’est simple ! Il faut répondre aux 5 W (de l’anglais : « What Who Where When Why, ou en français : Quoi Qui 0ù Quand Pourquoi ? »
Cela constitue la règle fondamentale, incontournable, impérative du journalisme. Il ne peut pas y avoir de compromis sur les quatre premiers W, nous dit on. L’auditeur a besoin de repères : Où ça s’est passé, quand, qui est concerné, qu’est-ce qui s’est passé ! »
Ca, c’est du débriefing ! C’était assez facile à comprendre et à se rappeler. Applicable d’ailleurs à beaucoup de situations. Je me suis demandé si Gerard Houiller en avait pas fait profit auprès des bleus ? Il faut tout de même savoir ce qu’on fait quand on traverse le terrain avec une balle au pied. Où est le but, et à qui on va envoyer la balle, quand, et pour quel usage ?
Je ne sais pas qui avait inventé la recette. Mais elle me semblait en concordance parfaite avec le monde de John Le Carré. Et plus loin dans le temps avec celui de notre cher Sherlock Holmes.
("Hé Bien ! C’est formidable. Au début, j'ai cru que vous étiez intelligent, mais je m'aperçois que ça n'était pas si malin, au fond !" - Mr. Wilson dans La Ligue des rouquins), où Holmes expose un vrai raisonnement, logique, rationnel, basé sur l’observation, la déduction, et la synthèse, et qui ne laisse aucune place à l'intuition.
What-Who-Where-When-Why….. « Elementary my dear Watson ! » Encore mieux en Anglais qu’en Français. D’un seul coup je comprenais pourquoi c’était des journalistes de langue anglaise qu’avaient fait tomber Nixon. Cette série de clés anglaise à prise W était impressionnante, propre à déboulonner n’importe quelle affaire.
Un doute m’est venu. Et si l’enquêteur utilisait cet arsenal pour authentifier l’auteur d’une crotte de chien, oubliant le cadavre criblé de balles qui est allongé sur le trottoir d’en face ?
Cela n’a pas été le cas toutefois pour cette courageuse journaliste Mexicaine, Regina Martinez, qui est morte d’avoir voulu faire son métier.
Depuis, vingt-cinq médias internationaux ont enquêté sur la violence meurtrière dont sont victimes les journalistes au Mexique. . https://bit.ly/2IT3nJI
Ce genre de personnes se remettant sur l’enquête vous fait retrouver la foi en la gente humaine, après que les assassins vous l’ai fait perdre.
Sur inter, j’ai tout de même trouvé le journal de 13 heures bien décevant, (écoutable en pod cast https://bit.ly/2IPSqsn ). Il me semblait tenir au mieux de la composition artistique, au pire relevé d’un exercice de manipulation.
Le silence est en soit une forme de complicité, aurait pu dire Sherlock Holmes !
Au fond il suffit simplement de faire son métier, c’est à dire ce que les autres exigent de vous :
« En soi, la pratique du mensonge n’a rien d’éprouvant. C’est une question d’habitude professionnelle, une ressource que la plupart des gens peuvent acquérir."
« L’espion qui venait du froid, de John Le Carré-1973 »
https://bit.ly/2LqlAPx John Le Carré, les autres et moi – JDD
Le chroniqueur d’inter s’est attardé sur les tests de recherche du covid pratiqué au Havre, la ville d’Edouard Philippe. Puis s’est appesanti sur le résultats d’un sondage fait sur un millier des « 16-26 ans » concluant à un accroissement formidable de la confiance des jeunes envers les élus et personnels politiques, (du local au national dans le même lot)... Beaucoup, peut-être encouragés par les résultats des marcheurs-néophytes en politique, se verraient pourquoi pas faire une carrière…
Macron à un projet de référendum dans les cartons. Pour cela il compte rebondir sur les propositions de la conférence citoyens, prenant ce qui l’arrange, rejetant le reste dans le tri sélectif. Même s’il faut pas l’emmerder avec les gros SUV fabriqués en France, il ne sera pas dit qu’il sera un acteur incontournable de l’écologie. On n’en saura pas plus avant le prochain numéro. Après le credo habituel sur le monde de la culture discriminé par le covid, le journaliste a proposé de faire un voyage d’une semaine dans la tête d’un CRS. Non je me trompe. Il s’agissait de celle d’un garde forestier.
Bon, je passe sur le menu frotin, le masque miraculeux trouvé par les israéliens. Trump, le cramponné enfermé dans les chiottes de la maison blanche devient un maronnier. Mais pas un mot sur les manifs du week-end, contestant la loi « de sécurité globale » les arrestations arbitraires. « Inutile d’en parler coco ! » Des nouvelles qui préoccupent tout de même les autres pays, avec des vidéos qui font si taches qu’on veut les interdire, plutôt que s’attaquer aux causes. .Le haut commissariat aux droits de l'homme de l'ONU a fait part de ses sérieuses préocupations au sujet de ce texte controversé, et qui déclenche une telle fureur ! Les libertés fonfamentales remontant à plus d'un siècle sont en danger !
Ce n'est pas non plus en écoutant le 13 heures d'inter qu'on pourra apprendre, contrairement à l'importance que les journaux ont accordé à cette information, que l'écrivain Italien Corrado Augias, a rendu sa légion d'honneur. Il estime que le président Macron n'aurait pas dû concéder cette médaille à un chef d'état, c'est à dire le président Egyptien Sissi, qui s'est objectivement rendu complice d'atroces criminels.
Il n'y a pas que le covid pour imposer des masques. https://bit.ly/3oPn0l6  ;  ;
Peut-être est il plus judicieux de tirer des bords sur nos chers morts ? Cela met tout le monde au garde à vous, et occupe l’espace médiatique. A un jour près Giscard a failli se télescoper à la page des obsèques avec Anne Sylvestre. On en aurait fait une fabulette, parlant de la rencontre de Blanche-Neige et du chasseur.
Pas sûr que c’aurait été jugé de bon goût ! L’humour est bien plus difficile à manipuler actuellement que la langue de bois.
Mais enfin ils sont morts à un jour d’écart, comme il convient. Les nécros étaient prêtes dans les boites. Une célébrité par jour ! Peut-être est là un quota à ne pas dépasser ? Pour la mort des anonymes dont les circonstances sont fâcheuses, au point de rendre l’événement remarquable, c’est un autre problème.
Mais il semble que certains jugent inutiles d’en parler.
Je pense par exemple à ce silence assourdissant entourant l’homicide de ce jeune Anglais de 24 ans, mort chez lui, près de Cajarc, dans le Lot, pauvre victime d’un chasseur sévissant en bande organisée, lors d'une battue aux sangliers….
Ce drame a pourtant fait la une non seulement des journaux régionaux, mais a bénéficié aussi d’une grande couverture médiatique de la plupart des grands titres. https://bit.ly/3qZ8ARa
Il est possible que l’info ait été diffusé sur inter et les chaînes publiques, mais en catamini, en tous cas pas dans les grands titres. Comme dans toutes les affaires liées à un sujet sensible, ce triste accident fait sens, car situé à la rencontre du partiiculier, de l'événementiel, et des lobbys agissant. .
L’événementiel, c’était ce confinement, dont certains politiques ont permis aux chasseurs de s’exonérer des règles, et de se balader avec un fusil dans la campagne, l’arme létale faisant abstraction ou remplacement de toute autorisation de sortie.
On comprend que le tableau de chasse soit si fâcheux, au terme de cette battue aux sangliers, que certains journalistes n’ont même pas eu besoin de conseils pour s’autocensurer, et préférer parler d’autre chose. Dans cette affaire, poser la règle des 5 W, What-Who-Where-When-Why revient à poser cinq chefs d'accusation.
On comprendra la timidité à la traiter et ce comment des informations faisant sens s'avèrent explosives. Là où un journal comme « Le canard enchaîné » se met à cancaner, d’autres rentrent vite au poulailler.
Un jeune homme est mort. Cela a été un drame pour ce qui restait de sa famille, mais d’un village, voir d’une région. Il faisait l’unanimité par sa gentillesse et sa générosité, toujours prêt à donner un coup de main aux autres. Bien que nés de parents Anglais, Morgan Keane était né dans la région. Il appartenait à cette communauté Franco Anglaise, déjà secoué par le Brexit.
Morgan Kean avait toute la vie devant lui. Il aurait pu devenir écrivain. Un nouveau John Le Carré.
Il y a des gens qu’on a connus que par les journaux, ou par les livres qui restent longtemps vivants en nous.
Ils surnagent du tri sélectif des jours.
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