Fukushima, révolutions, Crise : 2011, la fin d’un monde
Considéré il y a quelques années encore comme la troisième puissance économique du monde, le Japon incarne ces derniers temps, par bien des aspects, la fin d’un modèle de développement autant que celle d’un système politique. Vieillissement de la population, dette publique massive, effacement du politique devant des lobbys (celui du BTP depuis la reconstruction post-Hiroshima), le Japon pèse ainsi deux fois moins qu’il y a dix ans. L’intervention fataliste récente de l’Empereur aura pris une force symbolique plus signifiante que jamais. Celle de l’impuissance de l’Homme, apprentis sorcier dans bien des domaines, jusque celui de sa survie. Le fameux nouveau type de Centrale nucléaire « EPR » nous est néanmoins vendu comme remède miracle, tel un tube de colle « super résistant ». La coque des centrales sera désormais doublée en épaisseur. Les 58 centrales actuellement en service en France, ne disposant que d’une seule coque, nous assurent par la même que nous aurions été menés en bateau s’agissant de la fiabilité. Ce mensonge en recouvre bien d’autres. L’actualité parle pour l’Histoire.
Quoi qu’il en soit, la Bourse se frotte déjà les mains (encore sans gants de protection) sur le squelette de Fukushima,voire, du Japon. Le lobby nippon du BTP pareillement, une nouvelle surface de reconstruction assurée est toujours bonne à prendre. L’Etat japonais mise sur le rapatriement des capitaux investis à l’extérieur parallèlement à un désengagement participant de dettes occidentales. Bref, le modèle occidental en vigueur pense y trouver son compte. Une bonne catastrophe ou une guerre seraient toujours porteuses pour les affaires. En outre, la peur du nucléaire, en partie fantasmée, en partie justifiée, saura assagir durablement les peuples. La « révolution » en secteur pétrolifère pourra ainsi être limitée au grand Maghreb ou Moyen Orient. L’intervention en Libye, planifiée par les Etats-Unis, réalisée en première ligne par la France réduite à pays téléguidé exécutant (De Gaulle reviens !), cette guerre non avouée n’aurait qu’un but Humanitaire. Les Droits de l’Homme restent flamboyants. L’aviation pourra avoir de nouvelles commandes. Et libre à l’Arabie Saoudite de faire ce que bon lui semble. L’Histoire retiendra que des « révolutions » peuvent sortir du chapeau d’Internet. Le pétrole sera bientôt garanti pour longtemps. L’avenir saura gérer au mieux les déchets radioactifs pendant des siècles. Ceux qui se sacrifient pour tenter de rétablir le système de refroidissement d’une Centrale se dénomment « les liquidateurs ». A travers cette appellation, l’Homme annoncerait-il le suicide de son avenir ?
Les bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki ont eu lieu les 6 et 9 Aout 1945, pareillement à l'initiative des Etats-Unis, après que les dirigeants japonais eurent décidé d'ignorer l’ultimatum de Potsdam. Le musée du mémorial pour la paix d'Hiroshima avance le chiffre de 140 000 morts, pour la seule ville d’Hiroshima D'après le maire d’Hiroshima lors d'un discours en 2005, le total des morts s’élèverait en fait à 237 062 personnes[]. Ce nombre est à prendre avec précautions. Ce serait officieusement infiniment plus. Comme ces jours-ci pour la centrale nucléaire de Fukushima, un véritable tabou persiste s’agissant du « coût » humain. Sauf à penser qu’il s’agit d’un déni. Presque 66 ans après la fin de la seconde guerre mondiale, la folie de l’Homme se trouve donc confrontée au retour de l’Histoire, à travers la colère de la Nature environnementale. Au niveau de la « nature » plus humaine, rien ne semble avoir véritablement évolué dans un sens meilleur. L’attitude des uns et des autres face aux « révolutions » recouvrant tout un large Maghreb, notamment dans la « gestion » de l’intervention de la coalition, tout cela en atteste. Nous y reviendrons.
Toujours est-il qu’à partir de 1947, une augmentation des leucémies a été constatée parmi les survivants irradiés. Un record fut atteint en 1951. Ensuite, cela a baissé[] jusque disparaître en 1985. Telle est l’information officielle. Sur 49 204 survivants irradiés suivis de 1950 à 2000, il a été observé 940 cas de leucémies mortelles conséquences directes des irradiations[]. Au niveau du Cancer, les études font état à partir de la fin des années 1950 d’une augmentation progressive des cas, en particulier ceux du poumon, du tube digestif et du sein. Sur 44 635 survivants irradiés accompagnés de 1958 à 1998, on retiendra 8480 cas de cancers mortels liés aux irradiation[]s. Des effets médicaux autres que les cancers ont été durablement relevés, notamment la survenue de cataractes et de stérilité, ainsi qu’une fréquence accrue des maladies pulmonaires en général et des troubles cardiaques ou digestifs. Aussi une diminution de la durée de vie, dans bien des cas.
Quelque soit l'ampleur finale de l'accident nucléaire en cours à la centrale japonaise de Fukushima, ses conséquences marquent déjà l’Europe, mais hélas seulement, au niveau du choix de l’énergie nucléaire. Cette symbolique, et réalité, du retour du Japon au travers du nucléaire n’interpelle pas grand monde face à l’Histoire, en lien avec le soulèvement annoncé comme « révolutionnaire » du berceau de notre Civilisation. Nous y avons au mieux toléré, au pire soutenu, le maintien au pouvoir des pires tortionnaires. N’en parlons plus. Rideau. Dans la scénarisation du JT du soir seul “Le débat qui semblait s’amenuiser au même rythme que le souvenir de Tchernobyl ressurgit de façon brutale » comme le constate le Figaro. Selon l’ampleur émotionnelle citoyenne perceptible par Médiamétrie, le choix des sujets s’ordonne ainsi dans le menu des « informations », dont nous ressentons intuitivement l’aspect « incomplet » relatif à cette double actualité tragique. Comme sur d’autres plans. Gardons que « dans aucune région du monde, l’énergie nucléaire n'est aussi importante qu'en Europe“ comme le souligne die Weit. Alors qu'en moyenne, dans le monde, le nucléaire satisfait 15 % des besoins en électricité, les 144 centrales européennes produisent 35% de l'électricité consommée. Quelque 71 % des citoyens de l’UE résident dans un pays qui compte des réacteurs sur son territoire. Jadis le Japon fût le cadre de l’usage dramatiquement Historique, unique à cette échelle, du nucléaire militaire. Ces jours-ci, l’Homme y est donc rappelé à l’ordre, par une Nature qu’il ne cessa de piller et détruire.
Ainsi, écrit Le Figaro, "les opposants au nucléaire ont repris de la vigueur dans toute l’Europe. En Allemagne, où le gouvernement conservateur-libéral d’Angela Merkel avait fait voter à l’automne 2009 l’allongement de la durée de vie des 17 réacteurs nucléaires du pays (...).En Autriche, pays traditionnellement hostile à l’énergie nucléaire, le ministre de l’Environnement, Nikolaus Berlakovich, a plaidé pour un ‘stress test’ des centrales européennes (...). En Grande-Bretagne, où le gouvernement de Cameron a relancé son programme de construction de centrales et retenu en octobre huit nouveaux sites, le ministre de l’Energie, Chris Huhne, s'est déclaré favorable à une enquête ‘pour tirer les leçons nécessaires’ de l’événement, alors que se décide en juin le recours à la technologie EPR d’Areva et EDF”.
L'hebdomadaire allemand estime que la doctrine du risque zéro doit être revue : “Certes, le Japon est une zone sismique, ce qui augmente le risque et constitue une différence entre le Japon, et l’Allemagne ou la France. Mais le Japon fait également partie des industries les plus développées où des ingénieurs bien formés et pointilleux construisent les voitures les plus modernes et les plus fiables au monde. A l’époque de la catastrophe de Tchernobyl, l’industrie nucléaire allemande pouvait faire avaler à elle-même et aux citoyens qu’en Europe de l’Est, il y avait de réacteurs démodés et des ingénieurs incapables et négligeant. On voit maintenant combien cette perception était présomptueuse. […] Il suffit d'un enchaînement de hasards malheureux pour voir des Fukushima partout“.
Le choc est tel que nous en serions à “la fin de l’ère nucléaire » n’hésite pas à titrer Der Spiegel. Pour peu que l’on observe « l’actualité » dans sa globalité, il n’est pas exclu que la fin en cour recouvre une plus grande ampleur. Le cas échéant, le soupçon de paranoïa et de délire millénariste, l’interdiction de la « pensée du complot » (on apprend en école de journalisme à la contrer !), tout cela saura couper court à toute tentative d’analyser le déroulement du « Printemps Arabe » et de la tragédie nucléaire d’une toute autre façon. La pensée unique doit le rester. Le JT du soir délivre la vérité officielle, la seule qui soit autorisée. Qu’on se le dise.
A Hiroshima et Nagasaki, l’Homme aura osé le pire absolu, à travers le nucléaire, précisément au Japon. En cette année 2011, ces données se trouvent à nouveau réunies au menu du malheur cultivé par l’Homme depuis la nuit des temps. En outre, la liberté des hommes permet désormais de détruire la planète un nombre de fois sans cesse croissant (à croire qu’une fois ne suffit plus !). L’Homme est enfin « Dieu » au royaume du nucléaire. La Libye produit 175 millions de tonnes de pétrole chaque année, une intervention Humanitaire s’imposait. Comme pour la deuxième guerre mondiale, les Etats-Unis seraient les sauveurs armés seulement de « Droits de l’Homme ». Le calendrier Maya et tous les prophètes des supermarchés nous promettaient la fin du monde en 2012. Il se pourrait bien que 2011 relève de la fin d’un monde. Demain verrait naître la mondialisation du meilleur de l’Homme. L’idéal serait enfin aux manettes. Les poules auraient des dents,sous la pluie qui mouille.
A travers le Japon, un rappel à l’ordre de l’Histoire, le dernier peut être. Le fameux système « EPR » ne serait donc qu’une paire des lunettes à double foyer, portées par l’Homme refusant de voir la réalité, telle qu’elle est. Logique de lobbys depuis la seconde guerre mondiale, renoncement du politique face à l’affairisme, corruption, gouvernements provisoires qui se succèdent, le Japon incarne un système économique, politique et sociétal finissant. La révolution à faire, in extremis, serait celle des consciences. Le dire relèvera de la « pensée du complot ».
Paul Valéry « le mélange du vrai et du faux, est plus faux encore, que le faux ».
Guillaume Boucard
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