Ce été, en Grèce je suis tombé sur un livre publié intitulé l’Urne d’élection publié en 1995. Un texte étonnant qui prévoyait avec plus de quinze années d'avance l'exacte situation que vit la Grèce en ce moment.
L’auteur de l'Urne d'éléction est un simple moine du mont Athos, le frère Christodoulos. Le livre est consacré à la vie d’un autre moine du mont Athos, le géronte Païsios, qui venais de décéder en 1994 et ré-édité en 2012 par le journal Démocratia. Le géronte Païsios est fameux en Grèce car il a affirmé avoir eu des visions prophétiques au cours de sa vie. Mais ce n’est pas cet aspect du livre qui a motivé sa réédition. Ce sont les quelques pages (417 à 421) consacrée par Christodoulos à l’UE et les bases de données numériques implémentés par Shengen et d’autres directives européennes.
Avant de lire il faut se replacer dans le contexte de l’époque :
A part quelques spécialistes personne n’a entendu parler d’Internet.
Mitterrand termine sont second mandat.
L’Union Européenne n’existe que depuis deux ans. (Traité de Maastricht)
L’euro n’existera pas avant cinq ans.
La Grèce n’organisera les JO que dans neuf années.
La crise de la dette grecque n’explosera que dans quatorze ans.
C’est en se remettant dans ce contexte qu’on peut comprendre tout l’intérêt du texte.
La traduction est de votre serviteur :
Méthodes malignes et dilemmes
Afin de rendre compréhensible la manière par laquelle la future tyrannie secrète organisera avec de grandes duplicités et tromperies les procédés par lesquels elle tentera, en trichant, de nous convaincre de la nécessité de mettre en application un nouveau système économique, sous contrôle numérique, nous reportons les faits suivants :
Ils imposent à notre pays (la Grèce) une très grande dette publique extérieure, si grande que, non seulement nous ne pourrons la rembourser, mais que nous ne parvenions même pas à faire face aux intérêts de cette dette. Ils parviendront ainsi, avec une excuse logique, à imposer au peuple un programme économique d’extermination, et ce jusqu’à la fin des temps [le terme grec est eschaton NdT].
Ils imposeront continuellement de nouvelles mesures économiques écrasantes, des impôts insoutenables et bien d’autres mesures, de sorte d’amener le peuple à peuple s’indigner.
Et qu’obtiendront-ils de la sorte ?
Entendez : Il viendra un moment où le peuple oppressé par les mesures économiques écrasantes demandera à reprendre son souffle, mais ce répit là ne lui sera jamais permis tant qu’il n’aura pas courbé la tête jusqu’à ce qu’elle touche terre et se soumette entièrement au nouveau système. Ils diront : « Vous avez raison de vous plaindre, cependant vous avez une grande dette extérieure alors que ceux qui sont riches échappent à l’impôt. Afin que nous ne vous imposions pas injustement de grands impôts (etc.). il faut que vous acceptiez le système total de contrôle économique électronique, de sorte que nous puissions voir qui sont les citoyens loyaux et qui sont les fraudeurs. »
Simultanément, ils génèreront par le biais du système économique électronique de nombreuses difficultés et des priorités avec lesquelles ils donneront l’illusion aux gens d’une rémission économique.
Mes frères, ils nous bernent avec d’immenses mensonges ! Quelques mesures économiques drastiques qu’ils prennent, il ne nous sera pas possible de rembourser cette dette. En effet l’existence d’une Grèce économiquement solide ne sert pas leur desseins.
Que font-ils donc ? Alors que nous nous retrouvons dans un chaos économique et que nous ne parvenons même plus à rembourser les intérêts courants de la dette, ils génèrent des crises fabriquées avec nos pays voisins, de sorte qu’effrayés par ces menaces, nous dépensions des trillions de Drachmes [l’Euro ne remplacera la Drachme que 5 ans plus tard. NdT ] en achat d’avions, navires, missiles, hélicoptères etc. [ A ce sujet voir mon article sur la corruption au sein de l’UE]
Nous entendons sans cesse parler de la guerre imminente avec la Turquie, d’épisodes tendus lesquels sont « pressentis » et rendus publics des mois à l’avance : Nos frontières sont remises en cause de même que nos îles et les Turcs profèrent ouvertement des menaces [Un an après la publication du livre, les Turcs contesterons à la Grèce. [ l’île d’Imia en mer Egée NdT]. Ainsi, l’attention de tous est monopolisée sur le seul danger apparent et l’esprit de chacun est détourné vers ce leurre. Par ce procédé, ils sont déjà parvenus, de façon très subtile et sans apparaître comme nos adversaires, à s’imposer à nous et à nous désorienter, dans le but de s’introduire dans notre maison.
Avec un peu d’attention, on se rend compte de derrière les apparences superficielles, les choses suivantes se jouent :
L’Union Européenne presse la Grèce de reconnaître entièrement les mesures de Shengen et de les mettre en application, mesures selon lesquelles à partir du 1er janvier 1997, nos frontières devront être abolies, après que nous ayons accepté et implémenté le systeme de renseignement numérique dans lequel seront consigné toutes sortes d’informations de caractère personnel [
Il s’agit du SIS Système d’Information Shengen. NdT http://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_d%27information_Schengen].
Nous voici pris entre Charybde et Scylla ou si vous préférez nous n’avons plus le choix qu’entre « la peste et le choléra » [J'ai substitué un proverbe français similaire en sens à celui du texte grec NdT]. C’est ainsi que nous avons été mené face à un dilemme par lequel ils vont contraindre nos hommes politiques à nous dire : « Nous subissons tout cela parce que nous n’avons pas suivi les conseils de nos partenaires. Il n’y a qu’une solution à notre problème. Il faut abolir nos frontières et se conformer aux accords de Shengen de sorte que nos frontières deviennent les leurs et qu’ils puissent les défendre ! » [C'est en substance ce qu'on entend à la Télévision grecque en ce moment NdT]
Mes frères, sachez qu’ils initieront des pressions de toutes sortes, en particulier sur nos dirigeants politiques, que nous ne devront pas considérer coupables. « Tu ne médira point du chef de ton peuple » (Actes des apôtres 23.4) car du premier citoyen grec (et dirigeant du pays) jusqu’au dernier d’entre nous, nous sommes tous les pions d’une même jeu. Il convient donc de ne pas nous focaliser sur nos propres politiciens, mais sur ceux qui vont l’imposer depuis les coulisses par la force, la cruauté et en les trompant.
Parmi leurs objectifs il en est un particulier : Celui de pousser le peuple à se soulever contre ses propres hommes politiques. Ainsi indigné, le peuple demandera finalement que quelqu’un vienne de quelque part « ailleurs » pour qu’il le sorte de son malheur. Aussi, évitons les récrimination et ne nous critiquons pas en tant que peuple et que nation, car ce faisant, nos ennemis se frotteront les mains en nous voyant que s’impose désormais la nécessité de venir nous « sauver »
--- Fin de l’extrait. ---
Voici les réflexions que m’inspire ce texte.
Tout d’abord, les autorités du monastère où réside la frère Christodoulos ont publié un papier dans lequel elles explicitent qu’il ne faut voir aucune prophétie dans ce passage du livre et qu’il ne s’agit que d’une analyse politique de la part du moine.
La question que je me pose est donc de comprendre comment un moine isolé dans un lieu où la technologie est absente, où le fracas du monde ne parvient que comme un bruissement lointain, a pu, avec une quinzaine d’années d’avance prévoir avec autant d’acuité les évènements qui se déchainent depuis deux ans sur la Grèce.
La réponse nécessite qu’on s’intéresse à ce qu’est le mont Atos.
La plupart des gens ont juste entendu parler du Mont Atos de façon anecdotique car son accès est interdit à toute « créature femelle » (ce qui est inexact mais passons).
Ce qu’ils ignorent c’est que la « République de la Montagne Sacrée » est aussi la plus vieille république d’Europe.
Cette république monastique a en été fondée en 971 par un traité avec l’empereur byzantin Jean 1er.
Elle reste aujourd’hui politiquement indépendante d’Athènes , même du point de vue de la hiérarchie ecclésiastique. En effet elle n’est pas rattachée au patriarcat d’Athènes mais à celui de Constantinople.
C’est une république multiethnique (Il y a des monastères Serbes, Roumains, Bulgares, Russes etc.) dotée d’un parlement, la Sainte Épistasie et un président, le Proton.
Cependant, à l'instar d'Andore ou Monaco, elle n’a pas de représentation diplomatique propre et ses relations extérieures passent par la diplomatie grecque.
Ce qui ne signifie pas que la Grèce impose sa politique extérieure aux moines d’Atos.
Au contraire, cette république monastique a réussi à maintenir son indépendance et ses statuts quel que soit le souverain avec lequel elle a dû négocier : empereur romain, roi franc, sultan turc, roi bavaro-grec, dictateur fasciste, plénipotentiaire nazi, roi greco-britannique, junte téléguidée par la CIA, république hellénique.
Soit la Vierge Marie les protège (le mont Atos est sacré car Marie y aurait vécu), soit ce sont des diplomates hors pair.
Ce statut de république indépendante a fait l’objet de tractation spécifiques lors des signatures des divers traités d’union avec la CEE et l’UE. Les moines ont donc épluché dans le détail les clauses de tous les traités internationaux européens et en ont débattu avec le personnel diplomatique grec qui a ensuite négocié leur statut auprès des partenaires européens.
On comprend donc que la vision qu’ont les moines du mont Atos des dispositions des divers traités européens ne découlent nullement d’une apparition de la vierge ou d’un décryptage gnostique des écritures.
Ils ont simplement fait ce que peu de citoyens européens ont fait (sauf pour certains lors du référendum du traité constitutionnel) : Ils ont décortiqué les textes et en ont débattu entre eux.
La vie monastique étant par essence consacrée à l’étude et la compréhension des textes, ils n’ont manqué ni de temps ni de moyens pour approfondir la lecture et l’analyse des traités.
Et comme ils n’ont ni la télévision ni la radio, ils sont insensibles aux campagnes médiatiques qui ont influencé le reste des opinions publiques européennes.
En un mot ils se sont fait leur propre opinion, comme chacun devrait le faire dans une démocratie réelle, en se basant sur les textes et non sur les effets de manches des promoteurs du projet.
Dire que ces moines sont plutôt conservateurs serait superflu. Leur démarche était vraisemblablement plus critique que celle de la majorité des opinions publiques.
Cependant il serait faux de croire qu’il s’agit d’intégristes. En réalité des gens de tous horizons sociaux et politiques prennent une retraite spirituelle à Athos. C’est peu connu mais le prince Charles d’Angleterre est un familier des lieux.

Les relations privilégiées des moines d'Atos avec le corps diplomatique grec (mais aussi avec nombre d’hommes politiques qui y passent pour des raisons personnelles) en font des observateurs privilégiés des fameuses « coulisses » politiques dont parle Christodoulos.
Voilà l’ensemble des pièces qui ont concouru à l’analyse clairvoyante du moine Christodoulos et qui tiens bien plus de l’esprit critique que de la vision mystique.
Pourquoi s’intéresser à ce texte 18 ans après sa publication alors que la messe est dite pour la Grèce ?
Tout d’abord parce que la Grèce n’est pas un cas spécial. Les procédés sournois que Christodoulos décrit sont egalement à l'oeuvre dans les autres pays de l’UE, symptomatiquement au sein de l’Eurozone.
Ensuite parce que la partie n’est pas finie et que c’est en comprenant où se cachent la malignité de la méthode et comment on nous piège dans des dilemmes fictifs que nous pouvons lutter pour défendre ce qui nous reste de liberté et de souveraineté.
L'histoire de ce texte montre comment notre société est intoxiquée par un conditionnement médiatique permanent qui détourne le processus démocratique de son fonctionnement naturel et fait de nous à notre insu des marionnettes aux mains d'intérêts discrets mais omniprésents. Et que ce n'est pas en nous en prenant aux marionettes qui sont agitéee devant nos yeux que nous echapperons au piège qui nous est tendu.
Enfin, il est rassurant de voir qu'il reste encore, en cette période de globalisation grignotante des isolats où la machine à décérébrer ne parvient pas à pénétrer.
Le mont Athos est un de ces îlots qui se tient à l'écart des soubresaut des siècles depuis plus d'un millénaire. Un lieu où l’homme encore penser par lui même. Et c’est sans doute ce qu’il y a de plus sacré en ce lieu.