Grande arnaque et scandale des 10,5 milliards prêtés aux banques
Sarkozy, que l’opinion gratifie d’une action efficace dans la crise qui nous atteint, surtout les plus démunis, a promis plus de 320 milliards d’euros garantis aux banques et surtout a décidé que 7 banques allaient toucher 10,5 milliards d’euros, à charge pour elles de les redistribuer en prêts. L’argument serait en premier lieu que ces banques, dont la Société générale, établissement à la gloire éternelle des traders, représenteraient à elles toutes le max des financements de l’activité économique et des prêts aux particuliers en pays de France. Il y en a six autres : BNP Paribas (gamelles overseas), Banque populaire (championne toute catégorie par sa filiale commune avec l’Ecureuil qui perd ses noisettes, Natixis qui a chu de plus de 80 % de sa valeur depuis son introduction en bourse et a annoncé récemment, elle aussi, 1 milliard de pertes pour avoir joué en bourse et sur les changes), Caisses d’épargne (autrement appelée la décaisse d’épargne au montant de plus de 700 millions de pertes), Crédit agricole (spécialiste de la perte par fusion et championne toute catégorie grâce au CL racheté), Crédit mutuel et HSBC (autre championne britanno-hong-kongaise des pertes).
Ces dix petits milliards n’ont pas fait grand bruit, noyés qu’ils ont été dans le maelström des 320 autres. Or ces derniers ne sont qu’une garantie, alors que les premiers picaillons au montant de dix milliards eux seront bien distribués d’ici la fin de l’année, et dont 5 sont déjà débloqués en urgence.
Alors que toutes ces banques se déclarent solvables et sans problème, ceci dit sous les autorités conjointes du gouvernement et de la banque de France, on peut se poser la question de l’urgence de ce premier versement de 5 milliards. La réponse a été émise ici ou là : dans le contexte général, et dans le contexte plus particulier du discours sarkozyaque, on nous fait prendre des vessies pour des lanternes. Le discours ambiant est à la garantie des banques et, dans ce vaste plan, on inclut, au passage, sans coup férir, espérant que personne n’y voit rien, dix milliards que l’on fourgue à 7 banques. La réalité semble-t-il est autre. En fait, ces banques avaient un besoin urgent de cet argent, non à cause d’un manque de liquidité, mais à cause de pertes plus importantes que prévues. Le premier enfumage est dans cette annonce glissée à la va-vite et amalgamée, comme tout bon dentiste, avec le paquet global. En effet, puisqu’il y avait déjà 320 milliards d’euros de garantie pour les liquidités, pourquoi sortir en urgence 10 milliards ? La réponse est dans la question : car c’est pour d’autres raisons Ceci est donc, comme d’habitude, mensonges et cie.
Mais cela n’est pas tout. En effet, j’ai eu entre les mains des éléments troublants. Une personne de ma connaissance, pas très contente de sa banque, décide de faire un test ailleurs. Il frappe à la porte de la fameuse Société générale au PDG qui vend ses stocks en pleine déconfiture et se fait du gras. Il veut financer un véhicule professionnel pour 5 000 euros sur 8 500, lui, amenant les 3 500 euros (évidemment, là nous sommes dans le monde tous les jours, le réel à quelques milliers d’euros, celui du citoyen de base, pas celui de Lehman Brothers ni de Kerviel ni celui de Paulson ni de la Caisse d’épargne ni de Natixis ni de la SocGé, ce monde virtuel à milliards). Comme d’hab la banque lui demande sa généalogie, son historique, ses bilans, ses relevés de comptes, le contenu de ses boîtes à chaussure, etc. Entre parenthèses, il bloque dans sa banque plus de 36 000 euros chaque mois, et fait ce prêt uniquement pour mettre en adéquation le bien et son usage avec son financement, la trésorerie servant pour les à-coups, sachant que lors de ces à-coups, il n’y a plus de banque qui tienne. La SG fait une curieuse proposition. Et vous allez comprendre tout de suite le rapport et pourquoi le titre parle d’arnaque et de scandale. La SG ne propose pas 5 000 qui sont demandés, mais 8 000. Tiens donc, une banque qui propose plus que ce que l’on demande ! Autant bizarre qu’étrange, non ? En fait, la réponse tient à ces fameux 10,5 milliards. La SG est obligée de les reprêter, ces biffetons que l’Etat lui prête. Alors elle les refourgue à ses clients. Dans cette proposition, on trouve donc 50 % garantis par Oséo soit 4 000 euros, mais une caution de 5 263 € pour l’emprunteur. Que vient donc faire Oséo là-dedans ? Tout simplement, c’est la garantie de l’Etat sur ces fameux prêts à ces 7 banques. Mais là où cela fait mal, c’est que le taux monte à 9,19 %. Or, même dans des établissements de crédits, qui ne font que cela et qui sont plus chers que les banques, on arrive à des taux plus bas. Testez ici avec 36 mois et 8 000 € vous arrivez à 8,21 (assurances en plus à 0,39 %) au jour où cet article est écrit. Or, les établissements de crédits se financent sur le marché, les banques ont la ressource des dépôts, ressource gratuite. Donc, en théorie, pour un bon client, ce taux pour véhicule devrait tourner autour de 6,5 à 7 %, voire 7,5 %.
Alors pourquoi si cher ? Voilà le scandale de ces prêts. Il faut comprendre le mécanisme. C’est la Société de refinancement de l’économie (SFRE) qui prête aux banques. Mais cette société n’ayant pas d’argent pour l’instant, c’est la Caisse des dépôts et consignation qui lui avance la trésorerie, charge à elle de la rembourser avant le 31 décembre. Ça c’est pour l’urgence (ces fameux 7 banquiers). D’ici le 31 décembre, la SFRE va se financer sur le marché. Et comme il n’y a pas de petits profits, elle prête aux banques avec une marge. Voici tout ce que ce mécanisme a d’inique, injuste, inefficace et scandaleux :
du fait que la SFRE prend sa marge par rapport au marché et que la banque va aussi prendre sa marge, cela renchérit le crédit au client final, du montant d’au moins de la marge de la SFRE ;
comme la banque pour toucher l’oseille a nécessité de prêter, il gonfle les prêts (cf. l’exemple plus haut) ce qui a pour effet immédiat de renchérir celui-ci. La conséquence est que le client solvable paye plus cher son crédit et enrichit l’Etat qui n’a pas vocation dans cette histoire à s’enrichir, mais à aider. En effet, un crédit plus cher, c’est plus difficile à rembourser et cela met en difficulté les entreprises. Premier effet pervers, ces prêts - alors que la BCE baisse ses taux - vont à l’encontre de leur objet. Et si les prêts deviennent trop onéreux, cela retardera les investissements : second effet pervers (ils ne seront pas utilisés) ;
là où se situe le scandale est dans ce mécanisme même. La SFRE va émettre des obligations pour se financer. Mais qui achète les obligations ? Les banques ! Démontons un peu ce mécanisme. La SFRE émet des obligations pour 10,5 milliards et comme le dit AGEFI : Contrairement aux OAT qui sont émis par adjudication, ces emprunts devraient être lancés par voie de syndication bancaire. Afin d’attirer un maximum de demande, ces nouveaux instruments de dettes pourraient porter aussi bien sur du taux fixe que sur du taux variable. N’étant pas de la dette souveraine en soi, les titres de dettes, qui n’ont pas encore de nom, bénéficieront d’une notation AAA du fait de la garantie de l’Etat et seront tout de même émis avec une marge... En d’autres mots, la syndication bancaire veut dire que ce sont les banques qui vont financer cet argent, ces banques qui n’ont pas de trésorerie. C’est un moyen de leur faire sortir leurs liquidités, mais cela entraîne des frottements dans les tuyaux et tout frottement c’est une perte d’énergie et, en l’occurrence, un coût plus élevé. En fait, le mécanisme consiste à garantir d’un côté l’argent placé, il sort donc de la banque, ensuite de lui reprêter en le garantissant à nouveau afin que la banque prête à ses clients. Pour faire concret, la SG, en bonne gestionnaire, souscrit des obligations d’Etat, garanties, c’est du bon papier. La SG prend par exemple un blot de 50 millions d’euros. Elle verse 50 millions et est garantie d’un revenu au coût du marché, disons 4,5 %. Elle reçoit de la SFRE un prêt de 50 millions d’euros qu’elle paye à 5,3 % par exemple. La SFRE prend sa marge. Ensuite, en divers prêts, elle ressort l’argent au taux de 6,95 % hors frais et hors assurance. La réalité fait que cet argent prêté au client final lui rapportera : 6,95 % - (5,3 - 4,5) = 6,15 %. Une bonne rentabilité. Mais, généralement, lorsqu’une banque prête, elle calcule son risque dans le taux du prêt : le coût de l’argent (ressources propres et marché) + sa marge + le risque. Dans ce cas précis, le risque disparaît complètement : les obligations sont garanties (c’est du sûr) et le prêt au client final est garanti par Oséo. Si le client ne rembourse pas, la SG se retourne vers la SFRE et dit qu’elle ne peut rembourser. Et c’est là le scandale : 1- la banque ne prend plus aucun risque, ce sont les contribuables qui vont les prendre à sa place ; 2- en plus cela coûte plus cher au client (plus de 9 % au lieu de 7) ; 3- cela va faire exploser la marge de la banque car, tous ces prêts étant sans risques, la quote-part risque du coût de l’emprunt disparaît et devient de la marge. Ce surcoût qui enrichit la banque, banque qui avec ses traders est responsable de la crise, diminue le pouvoir d’achat du client.
Ces 10,5 milliards sont donc contre-productifs car, d’une part, il y avait la mise en place de la contre-garantie pour 320 milliards d’euros qui devaient largement suffire, car, d’autre part, cela va coûter plus cher. Ce n’est pas très productif car les banques font bien que ce qu’elles veulent et ce n’est pas une centaine de préfets qui n’ont pas que cela à faire, ni un Pérol tout imbu de son pouvoir qui vont forcer les banques à prêter d’autant que, comme le révèle la Banque de France dans sa dernière étude, les conditions aux crédits vont encore se durcir, après s’être déjà durcies cet été. C’est scandaleux car cela va enrichir les banques, et ces 7 banques ont toutes péché en bourse et pêché non du poisson, mais des pertes pour avoir jouer en pleine période de crise ce qui est doublement amoral, c’est scandaleux car cela va rapporter à l’Etat alors qu’en période de crise il devrait rester neutre, c’est scandaleux car c’est le client qui supporte le différentiel, et enfin c’est scandaleux car la présentation qui a été faite est mensongère.
Vous comprenez maintenant pourquoi une banque, contre toute attente, prête plus que ce qui lui est demandée - du jamais vu d’emprunteur - et pourquoi au lieu d’avoir un taux à 7,5 % on se trouve avec un taux à 9,19 %
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