Grandes canicules du passé
La vague de chaleur actuelle a des antécédents. Les fortes températures estivales, de juin à septembre, sont régulières. On trouve ainsi un rythme de plus ou moins 30 ans où l’on constate un épisode de très forte chaleur accompagné le plus souvent de sécheresse.
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Le mot canicule désigne une période au mois d’août, où l’étoile Sirius, dans la constellation du Grand Chien (Canis Major) se lève et se couche en même temps que le soleil. C’est en juin que le soleil est au plus haut dans le ciel et frappe le plus intensément la surface de l’hémisphère nord. Cependant les plus fortes chaleurs viennent en juillet ou en août, soit avec un décalage dû entre autres à l’inertie de la chaleur accumulée dans le sol, à la position des anticyclones et aux courants atmosphériques.
Les relevés météorologiques ont moins de deux siècles. Dans certaines villes ou régions ils sont moins anciens que par exemple à Paris. Toutefois il existe différents moyens de connaître, au moins approximativement, la météo du passé : la croissance des arbres étudiée en coupes transversales du tronc en est une, les chroniques historiques ou paysannes en sont une autre.
J’ai recherché tant dans les archives d’infoclimat.fr que dans d’anciennes chroniques quels ont été les épisodes marquants du passé : sécheresses et canicules en France. Il y en a régulièrement. Commençons au VIe siècle :
« La chaleur de l’année 582 fit fleurir les arbres au mois de janvier. En 584, on eut des roses en janvier : une gelée blanche, un ouragan et la grêle ravagèrent successivement les moissons et les vignes ; l’excès de la sécheresse vint consommer ensuite les désastres de la grêle passée : aussi ne vit-on presque pas de raisins cette année ; les cultivateurs désespérés livrèrent leurs vignes à la merci des troupeaux.
Cependant les arbres, qui avaient déjà porté des fruits au mois de juillet, en produisirent une nouvelle récolte au mois de septembre, ce qui implique régulièrement 20° à 24° de chaleur moyenne, et 32° à 34° au moins de chaleur extrême ; quelques-uns refleurirent encore au mois de décembre, et les vignes offrirent à la même époque des grappes bien formées, augurant 12° à 14° de chaleur moyenne, et 24° à 25° de chaleur extrême. Les arbres refleurirent au mois de juillet 585 ; ils refleurirent encore au mois de septembre 586, et un grand nombre de ces derniers, qui avaient déjà porté des fruits, en produisirent une seconde fois jusqu’aux fêtes de Noël. Au mois d’octobre 587, après la vendange, les vignes présentèrent de nouveaux jets avec des raisins bien formés. »
De : « Des changements dans le climat de la France », 1845.
Selon la même source, il y eut en 1718 et 1719 deux années de chaleur et sécheresse intenses :
« Les deux années de 1718 et 1719 eurent l’une et l’autre des chaleurs sèches, violentes, longues et soutenues. A Paris, le 7 août 1718, le thermomètre de Lahire, malgré son exposition défavorable, indiqua néanmoins vers trois heures de l’après-midi 35° ou 36° : il s’éleva aux mêmes chiffres le 11, le 21 et le 23. Un hiver très doux succéda à ces chaleurs. La plupart des arbres se couvrirent de fleurs dès le mois de février et de mars 1719.
Les fortes chaleurs réapparurent avec le mois de juin. Plus intenses que celles de l’année précédente, elles durèrent aussi beaucoup plus longtemps. A Paris, le thermomètre de Lahire indiqua au maximum une température de 37° ; en outre, la table de Cassini attribue à cet été quarante-deux jours d’une température de 31° ; enfin, les chaleurs ont persévéré trois mois et demi, depuis le mois de juin jusqu’à la moitié du mois de septembre. »
La canicule de 1719 fit 450’000 morts. Durant l’été 1793 il y eut plusieurs jours de fortes températures - 34°, 38° et même 40° :
« Les chaleurs de l’été 1793 éclatèrent brusquement. (...) Les grandes chaleurs commencèrent à paris le 1er juillet ; à Montmorency, après le 4. Elles augmentèrent si rapidement, que la journée du 8 figure déjà parmi les époques de leur maximum. Pendant tout le mois, le thermomètre se balança, au milieu du jour, entre 40° et 25° à 26°, en indiquant douze fois 24° à 34°, et dix fois 34° à 40° ; son élévation ne fut guère moindre les dix-sept premiers jours du mois d’août. Le maximum de la chaleur a donné 38°4 le 8 juillet à l’Observatoire royal de paris, et 40° le 16 du même mois à l’Observatoire de la marine. Durant ces grandes chaleurs, le vent resta fixé au nord, le ciel fut presque toujours beau, clair et sans nuages. »
Le XXe siècle a connu de grandes canicules et sécheresses : 1911, 1947, 1976, 1983, pour les plus intenses et les plus longues. Il y eut même un premier réchauffement climatique dans la première moitié du siècle :
« C'est de 1922 à 1952, que la France a connu un très fort réchauffement en été à cause d'un flux de sud à répétition.
En 1911, ce fut la seule année du siècle où on a dépassé les 35°C durant les mois de juillet, août et septembre à Paris (32 jours au dessus de 30°C à Paris et 53 jours à Marseille !)
En 1949, l'été a commencé plus tôt. Il faisait déjà plus de 30°C en avril dans la moitié nord, et la sécheresse a duré tout l’été avec des températures extrêmement élevées. »
Pour être encore plus précis voici quelques archives reprises de l’excellent site www.infoclimat.fr.
‣ Paris juillet 1911 : canicule et sécheresse (40’000 morts) . Pendant 10 jours à fin juillet : 30°, 34°, 36,6 et 37,5°. Du 8 au 14 août : 35° à 37,7. Du 1er au 12 septembre : de 30° à 35,6°.
‣ Lyon 1947, fin juillet : une semaine entre 32° et 39,5°. Août 1947 : 39,5° le 2 et 35,2° le 20. Du 10 au 19 septembre : de 30,7 à 32°. Le record absolu pour Lyon est de 39,8° le 22 juillet 1983.
‣ Lyon 1949, dernière semaine de juillet : de 30 à 35°. 1er août, 35,6 ; 2 août : 34,7° ; 7 août : 35° ; 8 août : 37,7° ; 22 : 33,2° ; 31 : 31,8°. 1ère semaine de septembre : de 30,8° à 35,8. 23 et 24 septembre : 31,3 et 30,1°.
‣ Lyon 1976 : 6 mois de sécheresse, la pire du siècle. Du 19 au 30 juin, 30 à 34°. 33-34° atteints plusieurs fois en juillet.
‣ Lyon 1983, 15 au 30 juillet : de 30° à 39,8° (7 jours au-dessus de 35°).
Il y a eu des été très froids ou des années sans été. Il y a eu d'intenses épisodes caniculaires. L’épisode très chaud de ces jours n’est donc pas le premier du genre. Quelles que soient l’origine et l’importance du réchauffement actuel les épisodes extrêmes existent en eux-mêmes, indépendamment des tendances séculaires.
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