Grèce, des citoyens (enfin) utiles
Le retour
J’avais décidé de me taire. Ne plus partir sur des analyses universelles mais plutôt, avec mon sac à dos, vers des enquêtes de plus en plus délicates, ailleurs, au moyen age d’aujourd’hui, à la renaissance de demain. Mais ce qui se passe en Grèce -mon pays après tout-, et surtout la manière stéréotypée, grise comme un moule de l’habitude, classique, me pousse à sortir de ma coquille, pour exprimer un ailleurs, un inattendu naissant d’une catastrophe partagée.
Je ne sais pas ou tout cela va déboucher, quels sont les risques de récupération, si le geste apportera une quelconque solution. Mais ce que je sais, c’est que la Grèce était à l’avant garde de tous les désastres qui s’abbattent, de manière encore timide encore sur le reste de l’Europe et du monde. A commencer par les médias, oui, la télé spectacle d’elle même, qui ose se consacrer pendant des heures et des heures, à son propre nombrilisme, de plus en plus dirigé vers la vie erotique de ses propres acteurs. Une chaîne, « avant-gardiste », a purement et simplement supprimé l’information, en la remplaçant par les potins de la jet set misérable athénienne : les dessous de la vie des acteurs, des chanteurs, des présentateurs, des avocats et autres stars du microcosme de la capitale.
Puis viennent les scandales : de plus en plus gros, de plus en plus inimaginables, mettant en cause des mibistres des curés, des avocats vereux, des journalistes. Au point qu’il s’est créé une addiction, que tout paraît fade, dès lors que l’on a pas pour sa consommation quotidienne un curé, un ministre, un député qui ne fera pas la mariole, expliquant pendant des heures que son fric, il l’a eu « avant ». Ce bombardement quotidien, cette hubris permanente transforme le citoyen en consomateur de scandales, en voyeur des vices de la suprstructure politique et culturelle qui est sensée lui donner l’exemple.
Pendant que ce petit peuple pathétique s’amuse sur les écrans, se lance des compliments et des satisfaicits es débrouillardise et exhibe ses millions dépensés dans des villas et des soirées lubriques, l’ouvrier, l’étudiant, le boutiquier, les jeunes -la génération des six cents (euros)-, se voient leur vie volée dans les transports en communs (taxis inclus qui vous demandent où vous allez avant de déciser de prendre ou pas et qui chargent quatre clients à la fois).
Ils voient leur futur compromis par des études qui ne mènent nul part, leur santé compromise par les « enveloppes » que tout medecin qui se respecte exige en parallèle du système de santé.
Ils voient une église national-extrémiste prendre en otage le monde politique, ils voient les ignares,les analphabètes, les cyniques, les armateurs et autres hommes d’affaires dépenser en une heure ce qu’ils gagneront dans leur vie entière.
On leur parle d’un monde imaginaire que l’on pourrait comparer aux élucubrations d’un Kim Il Sung à eux qui, il y a à peine deux décenies écoutaient radio-Tirana pour égailler les soirées.
Et bien, oui, tandis qu’on les croyait foutus, perdus, aspirés pas cette « modernité » televisuelle et prisonniers d’un discours nationaliste et réligieux revanchard, ils ne faisaient que couver une révolte.
Et si celle-ci est importante, c’est qu’elle exprime une sauvagerie naissante contre cet amalgame moderniste-réactionnaire qui voudrait faire d’eux des purs consommateurs. Cette crise n’est pas économique, malgré leur pauvreté.
Elle est culturelle. Et en ce sens, oui, elle va frapper à notre porte.
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