Grippe H1N1, climat, crise ; un éclairage de Spinoza
La grande menace pandémique est inéluctable. Soyons prêts pour le tsunami viral qui devrait emporter des centaines de millions de terriens. Et ce n’est pas tout, d’ici 40 ans, d’autres centaines de millions d’errants se déplaceront sur la terre, envahissant les contrées au climat tolérable car les pays du Sud seront des fours géants, alors que les populations habitant en zone côtière seront chassées de leur terre par la montée des eaux. C’est peut-être la fin de la planète et de l’humanité. Il faut agir vite sinon nous sommes condamnés. « Ce message est un communiqué du ministère des peurs, pour en savoir plus, consultez le site panik.gouv.fr »
Ce communiqué paraît caricatural et déconnecté du bon sens. Pourtant, de plus en plus de gens pensent ainsi, croyant que le virus risque d’être fatal au cas où il muterait, écoutant l’avis des experts de la machine sanitaire. Quant aux climatologues et aux Savonarole de la géophysique, ils ont réussi leur coup. Si bien qu’une journaliste très sérieuse peut écrire sur Slate que la survie de l’humanité est en jeu et qu’il faut changer nos comportements en réduisant les rejets de gaz carbonique et que ce n’est pas négociable. Une sorte de folie semble avoir gagné le monde civilisé. Et je ne résiste pas à la tentation de reproduire cet extrait issu de la préface du Traité théologico-politique de Spinoza.
« Personne en effet n’a vécu parmi les hommes sans avoir observé qu’aux jours de prospérité presque tous, si grande que soit leur inexpérience, sont pleins de sagesse, à ce point qu’on leur fait injure en se permettant de leur donner un conseil ; que dans l’adversité, en revanche, ils ne savent plus où se tourner, demandent en suppliant conseil à tous et sont prêts à suivre tout avis qu’on leur donnera, quelque inepte, absurde ou inefficace qu’il puisse être. On remarque en outre que les plus légers motifs leur suffisent pour espérer un retour de fortune, ou retomber dans les pires craintes. Si en effet, pendant qu’ils sont dans l’état de crainte, il se produit un incident qui leur rappelle un bien ou un mal passés, ils pensent que c’est l’annonce d’une issue heureuse ou malheureuse et pour cette raison, bien que cent fois trompés, l’appellent un présage favorable ou funeste. Qu’il leur arrive maintenant de voir avec grande surprise quelque chose d’insolite, ils croient que c’est un prodige manifestant la colère des Dieux ou de la suprême Divinité ; dès lors ne pas conjurer ce prodige par des sacrifices et des vœux devient une impiété à leurs yeux d’hommes sujets à la superstition et contraires à la religion. De la sorte ils forgent d’innombrables fictions et, quand ils interprètent la Nature, y découvrent partout le miracle comme si elle délirait avec eux. » (Spinoza)
Malgré un penchant manichéen opposant la sagesse raisonnée à la passion affolante, ce propos nous met sur la piste d’une hypothèse. Celui qui scrute un peu le cours des sociétés s’aperçoit que depuis un ou deux ans, les autorités mondiales et nationales semblent avoir passé une vitesse supérieure dans la prévention de fléaux naturels. Tandis que dans les médias, la diffusion des peurs s’est accélérée au point que notre gouvernement en arrive à imposer la taxe carbone et à organiser un plan sans précédent de lutte contre une épidémie de grippe aux conséquences ordinaires. On peut se demander alors si la crise économique (et sociale) n’influe pas sur le déroulement des peurs. Car comme l’expose si bien Spinoza, en période d’abondance, et j’ajoute, d’abondance perçue par les gens, la sagesse est répandue et chacun gère son cours existentiel sans avoir besoin de conseil. Alors que dans l’adversité, les comportements les plus déraisonnables se répandent. Les gens devenant superstitieux, ne savant plus où donner de la tête, obéissant à des ordres stupides et suivant des conseils ineptes, absurdes ou inefficaces.
Y a-t-il encore des sages en 2009 ? Oui, certainement, des gens qu’on dit sensés, ou alors pénétrés de bon sens, qui ne croient pas en l’utilité des plans antiviraux et climatiques. Mais beaucoup, guidés par des experts aux intentions pas claires, sont prêts à suivre des mesures dont on peut dire qu’elles sont d’abord inefficaces. Pour le carbone, le développement industriel est tel que toute la production d’énergie sera absorbée. Quant à stopper la grippe, les Anglais ont bien compris que fermer les établissements ne servait à rien et qu’il faut attendre que ça se passe. Mais nous Français, croyons encore à la ligne Maginot.
Stupides les mesures contre le rejet de gaz carbonique. L’effet sera d’aider les bourgeois écolos à se payer des investissements qui leur permettront d’alléger leur facture énergétique. De quoi accentuer les inégalités. Quant au plan antigrippal, sa stupidité est évidente, ne serait-ce que ces 100 millions de doses commandées alors que même pas un tiers des Français sont prêts à se faire vacciner, le tout dans un contexte de déficit de la Sécu. Sans parler du reste, de cet affolement, de cette préparation à une catastrophe naturelle dans tous les établissements public. Et l’ineptie. Nul besoin de démonstration pour juger ineptes ces peurs virales et climatiques. L’humanité est menacée par d’autres fléaux, le premier étant le lent processus de décivilisation, avec à la clé des désordres sociaux. L’autre étant la démographie galopante.
Quoi qu’il en soit, le propos de Spinoza nous livre un élément d’explication sur cette agitation déraisonnée et cette panique collective ayant gagné les gens ces deux dernières années. Il existe certainement un terreau, voire un engrais favorisant la poussée d’accès de crainte sans rapport avec la sagesse. Ce terreau, c’est en fait la mondialisation de l’adversité, alimentée à la fois sur le plan réel et économique avec les inégalités, et sur le plan psychique avec des philosophes de petite vertu et des politiciens sans vergogne n’hésitant à jouer sur les peurs, les menaces, sur la victimisation des populations. En s’appuyant notamment sur le principe de précaution. Spinoza est avec Descartes et Malebranche l’un des hérauts de la Raison. Force est de constater que l’homme de 2009 a perdu la raison. L’adversité l’a conduit à édicter et suivre des conduites stupides. Mais une chose est certaine, cette adversité du monde hyper moderne, elle a été fabriquée par l’homme. Quand tout ne va pas très bien, les inquiétudes s’emparent des âmes qui ne sont plus immunisées face aux peurs qui elles aussi, sont fabriquées. Le monde de 2009 est sous le signe du crépuscule de la Raison. Avec comme spécificité le marché qui récupère l’intégralité de l’existence humaine pour en tirer profit.
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