Guerres du Vietnam et d’Algérie Deux films
Guerres du Vietnam et d’Algérie
Deux films
Vus par hasard à trois jours d’intervalle, deux films bien différents sur les guerres des États-Unis au Vietnam par un cinéaste étasunien (1) et de la France en Algérie par un cinéaste français (2).
Le premier est un film de guerre, classique, qui raconte un épisode d’après un fait réel qui s’est déroule en 1966.
Dans un bus, un homme jeune dévisage une jeune asiatique et s'endort.
Il se retrouve dans la guerre du Vietnam. Une permission de sortie ayant été refusée, son supérieur, un sergent, avec trois de ses hommes, enlève une jeune fille dans le but de la violer. Le héros du film ne cesse d'exprimer son désaccord jusqu'à se mettre en danger. Après qu’elle a été violée et blessée, il tente de la soigner mais ne peut la libérer. Au cours d’une attaque contre un groupe vietcong, ils l’assassinent. Le héros du film dénonce ces crimes malgré les tentatives de dissuasion de son commandement hiérarchique. Le sergent et ses complices sont condamnés en cour martiale.
Il se réveille dans le bus et revoit la jeune asiatique qui a suscité ce retour dans le passé. Vous avez fait un cauchemar mais je pense que c'est terminé maintenant, dit-elle.
C’est la dernière phrase du film. Mais ce n’est terminé ni pour ceux qui ont été au Vietnam, ni pour ceux qui ont été en Algérie.
Le second est un documentaire fait d’entretiens avec des hommes qui, entre 1954 et 1962, ont participé à la Guerre d’Algérie, qui ont connu les tortures, les corvées de bois (exécutions sommaires de prisonniers lors de fuites simulées)… qui n’ont pu oublier et qui, au moment de toucher la retraite d’ancien combattant, décident, enfin, de parler et de donner leur retraite à des associations algériennes. A l’occasion de retours en Algérie, ils retrouvent des anciens combattants de l’autre bord et essaient de nouer une solidarité fraternelle.
Les films étasuniens qui sont arrivés jusqu’ici et qui dénoncent la guerre du Vietnam sont bien plus nombreux que les films français sur la guerre d’Algérie. Les deux films ci-dessus montrent les difficultés que rencontrent ces jeunes de 20 ans mis dans des situations impossibles. Et tout le monde connaît les dégâts que cela a pu entraîner sur des générations. Le cas des Vétérans a été maintes fois signalé. Les témoignages en France sont plus rares, les appelés se sont très souvent enfermés dans le silence.
Les deux films parlent de responsabilité, de culpabilité ?, des blessures chez ceux qui ont participé à ces guerres mais de façon différente. Dans Casualties of War, il s’agit de jeunes engagés et l’épisode décrit est celui d’un sergent qui entraîne ses subordonnés dans une action criminelle. Dont un soldat au nom hispanique, probablement catholique qui avait promis de refuser. Par l’action du héros, luthérien, avec l’aide d’un aumônier méthodiste, le groupe sera condamné malgré les réticences de la hiérarchie, par le tribunal militaire.
Le héros du film n’a pu sauver la jeune vietnamienne. Celle qu’il voit dans le bus est-elle un reproche muet de son impuissance ? Par qui a-t-elle été sauvée ? Par l’État qui lui permet de faire des études sur un beau campus ? L’État sort totalement indemne de ce film.
Dans Retour en Algérie, il ne s’agit pas d’une bavure mais de pratiques couvertes, assumées par une hiérarchie, dénoncées seulement par le général Jacques de Bollardière (dont la femme témoigne dans le film), mis aux arrêts et condamné à 60 jours de forteresse. Il n’a jamais été réhabilité.
Pourtant le général Massu, responsable de la bataille d’Alger, des années plus tard, a reconnu : on aurait dû faire autrement.
C’est ce que des milliers d’appelés ont essayé de faire à l’époque (3). C’est ce que certains d’entre eux essaient de faire aujourd’hui, regroupés en association (4)
1 - Casualties of War (Outrages) de Brian de Palma,1989, 113 mn, se passe en 1966. Ce film a eu une diffusion normale.
2 – Retour en Algérie de Emmanuel Audrain, 2014, 52 mn. Ce film, produit avec l’aide de France Télévisions, n’est passé sur aucune chaîne. Il est diffusé tous les samedis à 11 heures au cinéma Luminor-Hôtel de ville à Paris pendant les mois de février et mars.
3 – Le nombre d’insoumis, déserteurs ou objecteurs de conscience est estimé à 12 000.
4 - Anciens Appelés en Algérie Contre la Guerre (4acg) : association fondée par 4 appelés du contingent en 2004.
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