Haro sur l’euro !
La situation française, économique, politique, européenne n'est pas florissante. Ni la situation de l'Union européenne (UE) où seule l'Allemagne semble, pour le moment, tirer profit de la situation mondiale. Tout ceci, c'est clair, c'est la faute de l'UE et, surtout, de l'euro.
En France, il est classique que les gouvernements fassent porter la responsabilité de mesures impopulaires à une obligation européenne qu'ils ont acceptée ou approuvée à Bruxelles. Que les élections européennes soit vues comme la confirmation ou la revanche d'une élection précédente qu'elle qu'en soit la nature, présidentielle, législative, municipale. Que la composition des listes soit un bureau de placement, un lot de consolation, une mesure d’éloignement, une sinécure permettant de poursuivre des activités politiques hexagonales.
Bien sûr, ce n'est pas le cas de tous les députés, et certains ont à cœur de participer activement au travail du Parlement européen (PE) . Il sera intéressant de voir leur place et leur rôle pendant la campagne électorale.
Pour le première fois, lors d'une élection européenne, il est possible que l'Europe soit, en 2014, au centre des débats : sortie ou non de l'UE et abandon ou maintien de l'euro pourraient en être des thèmes principaux. Avec des positions qui risquent de faire clivage aussi bien au sein de la droite qu'au sein de la gauche et peut-être même au sein des partis et des listes constituées.
Ces questions toucheront d'autres pays de l'UE, au delà des partis populistes ou nationaliste. Déjà des dissidents des partis au pouvoir se ont constitué Alternative für Démocratie en Allemagne et United Kindom Independence Party au Royaume-Uni.
Tout va mal, à cause de l'euro ?
Ce n'est pas la faute de l'euro, ni de l'UE d'ailleurs, si la crise a éclaté en 2008 aux États-Unis, avec les subprimes, entraînant la faillite de Lehman Brothers qui a fait trembler le système bancaire mondial. Depuis, il a fallu, toutes affaires cessantes (?), sauver les banques, les peuples dussent-ils en mourir.
Première puissance mondiale, les États-Unis ne sont toujours pas sortis de la crise malgré le roi dollar, un changement de président, des investissements massifs, la Réserve fédérale aux possibilités quasi illimitées qui maintient sa politique monétaire ultra-accommodante...
Avec une dette de l’État fédéral qui ne cesse de croître : 69,7% du PIB en 2008, 103,6% en 2012. Et un déficit public à 12% du PIB en 2012 (4% prévu en 2013).
La situation japonaise n'est pas due à l'euro ou à l'UE. Le Japon, malgré une monnaie nationale, n'en finit pas de sortir de la crise avec une dette publique la plus importante au monde (199% du PIB en 2010, : 229 en 2011, 236 en 2012)... Après avoir incarné, pendant des années, l'économie miracle, le modèle à suivre...
Ce n'est pas la faute de l'euro si la situation du Royaume-Uni n'est guère plus brillante que celle de la France. Elle dispose en effet d'une devise prestigieuse et autonome.
Le principal reproche fait à l'euro, c'est d'être une monnaie adoptée par des pays qui sont dans des situations économiques bien différentes : ainsi le PIB par habitant varie de 1 à 2 entre Estonie, Malte, Slovaquie, Grèce, Portugal et Autriche, Danemark, Pays-Bas et Allemagne et même de 1 à 4 avec le Luxembourg.
Est-ce bien différent à l'intérieur d'un pays ? Le rapport du PIB par habitant varie de 1 à 2 entre Picardie ou Languedoc-Roussillon et Île de France sans que personne ne propose une monnaie différente pour ces régions.
Ce rapport de 1 à 2 se retrouve aux États-Unis entre le États les plus pauvres (Mississipi, Idaho, Virginie O. ou Caroline du Sud et les plus riches Delaware, Alaska, Connecticut et même de 1 a 6 si on prend en considération le District de Columbia.
Bien entendu, les différences structurelles entre les pays de l'UE ne se résument pas au seul niveau de PIB mais la Picardie ou le Languedoc-Roussillon ne sont pas différents de l'Île de France seulement par le PIB...
Ce qui fait la différence entre un pays comme la France, les États-Unis et l'UE, c'est le degré de solidarité budgétaire, les transferts entre parties riches et parties pauvres.
Le budget de l'Union représente 1 % environ du PIB de l'UE à 27 alors que les budgets de ces États représentent en moyenne 44 % du PIB, plus de 50% pour la France. Aux États-Unis, pays fédéral, les dépenses publiques représentent 24 % du PIB.
Alors est-ce l'euro qu'il faut mettre en cause ou l'absence de solidarité organisée entre États européens parfaitement illustrée par la ridicule faiblesse du budget européen ? Budget que les chefs d’État et de gouvernement ont encore voulu diminuer ? Est-ce l'euro ou la politique des États de l'UE ? Le succès n'est pas éclatant à la vue des résultats des politiques imposées par la triade maléfique (FMI, Banque européenne, Eurogroup).
Un simple coup d’œil sur les pays « aidés » permet de voir que, depuis 2008, leur situation ne s'améliore guère (PIB, Déficit, Dette) alors qu'une cure d'austérité sans précédent leur est imposée avec un chômage insupportable et une « croissance négative », comme ils disent, le tout couronné par une reprise des migrations intra-européennes, surtout, vers l'Allemagne mais aussi vers d'autres pays où semble exister une possibilité de travail : Afrique (Angola, Maroc), Amérique latine...
L'abandon de l'euro serait un grave aveu d'échec de l'idée européenne qui ne s'en relèverai pas de sitôt : argument largement insuffisant car on peut être contre l'idée d'UE et surtout telle qu'elle s'est construite et qu'elle fonctionne actuellement. L’institution de monnaies nationales n’empêcherait pasde conduire des politiques libérales, très probablement, peu différentes de celles d'aujourd'hui. Ce ne serait pas un remède au manque de solidarité, bien au contraire, avec des dévaluations compétitives, et un stimulant du rejet, du repliement national et du nationalisme, déjà trop répandus à droite comme à gauche, dans de nombreux États de l'UE.
A ce jour, au delà du refus de l'UE telle qu'elle fonctionne, aucune force crédible, nécessairement européenne, n'a été capable d'avancer des propositions.
Les peuples manifestent, quelquefois massivement et vigoureusement, à l'échelle nationale dans l'isolement, sans aucune coordination et solidarité européennes. Chacun pour soi et la triade maléfique et les gouvernements contre tous !
Au niveau des forces politiques, il n'existe pas d'espace public européen, en dehors du PE, largement ignoré, pas de réel parti à l'échelle européenne, ailleurs que sur le papier, aucune action politique pour s'opposer aux mesures prises par des gouvernements plus ou moins soumis à la tutelle de proconsuls sans mandats électoraux. Les chefs d’État et de gouvernement arrivent à s'imposer avec quelques entorses à la démocratie qui n'est que proclamée : ils n'ont pas tenu compte des résultats des référendums en France et aux Pays-Bas, des proconsuls font plier des gouvernements élus...
Euro ou pas euro, ne serait-ce pas la politique qu'il faut changer ? Les élections européennes peuvent être un moment fort pour une relance démocratique au niveau européen. A condition de sortir de son petit territoire, de sa petite chapelle.
Dette publique en % du PIB – Google Data
|
Espagne |
Grèce |
Irlande |
Italie |
Portugal |
UE |
2013 |
84,2 |
156,9 |
117,6 |
127 |
123,6 |
85,3 |
2011 |
69,3 |
170,3 |
106,4 |
120,8 |
108,3 |
82,5 |
2010 |
61,5 |
148,3 |
92,1 |
119,3 |
94 |
80 |
2009 |
53,9 |
129,7 |
64,8 |
116,4 |
83,7 |
74,6 |
2008 |
40,2 |
112,9 |
44,5 |
116,1 |
62,3 |
62,3 |
Déficit public en % : http://epp.eurostat.ec.europa.eu/statistics_explained/index.php/Government_finance_statistics/fr
|
Espagne |
Grèce |
Irlande |
Italie |
Portugal |
UE |
2013 |
10,6 |
10 |
7,6 |
3 |
6,4 |
4 |
2011 |
8,5 |
9,1 |
13,1 |
3,9 |
4,2 |
4,5 |
2010 |
9,3 |
10,3 |
31,2 |
4,6 |
9,8 |
6,5 |
2009 |
11,2 |
14,6 |
14 |
5,4 |
10,2 |
6,9 |
2008 |
4,5 |
9,8 |
7,3 |
2,7 |
3,6 |
2,4 |
Croissance économique du 1er trimestre 2013 par rapport au 4ème 2012 (Les Echos Eurostat 16/05/13)
Espagne |
Grèce |
Italie |
Portugal |
-0,5 |
-5,3 (sur 1 an) |
-0,5 |
-0,3 |
Chômage :http://www.statistiques-mondiales.com/ue_chomage.htm
|
Espagne |
Grèce |
Irlande |
Italie |
Portugal |
UE |
2013 |
26,8 |
28,8 |
13,5 |
12 |
18,5 |
11 |
2012 |
26,2 |
25,7 |
14,7 |
11,3 |
17,3 |
10,7 |
2011 |
22,8 |
22 |
14,5 |
8,9 |
13,6 |
9,9 |
2009 |
18,9 |
9,2 |
11,1 |
7,4 |
9,3 |
9,1 |
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