Histoire et Actualité
Le système démocratique a de nombreux défauts mais possède une qualité centrale : celle d’établir les règles de la transmission pacifique du pouvoir. Ce n’est donc pas tant le droit du citoyen de participer à la vie publique et de choisir ses gouvernants qui importe le plus, mais la transformation de la lutte pour le pouvoir en compétition relativement pacifique. Ces règles de succession ont pour conséquence d’éviter sa confiscation par un dictateur, un roi, un clan, un parti. Elles évitent les querelles souvent sanglantes de dévolution, l’incompétence d’un successeur déjà désigné, la stagnation de la vie publique qu’engendrent les règnes royaux ou dictatoriaux interminables.
Bien évidemment les procédures démocratiques peuvent être détournées pour permettre la perpétuation d’un homme ou d’un clan : les votes truqués, la propagande orientée, la presse et l’audiovisuel muselés, les constitutions amendées. Mais les atteintes à ce principe de succession démocratique conduisent à la remise en cause de l’alternance pacifique : révoltes, coups d’états et révolutions en sont les conséquences. Il y a retour vers la lutte, la guerre, pour l’éviction des gouvernants contestés, le plus souvent haïs. Mais par là-même, cette règle de succession démocratique se trouve justifiée comme mode de pacification de la vie politique. Lorsque le vaincu félicite son concurrent, c’est la marque du haut niveau de respect et d’acceptation de l’autre qu’atteint une société.
On doit dès lors la considérer comme faisant partie du territoire de l’idéal, de cet ensemble utopique de souhaits et principes démocratiques destinés à réaliser une certaine harmonie sociale. Ils participent en effet à cette idée du « bien » par lequel se combattent l’injustice, la terreur, la guerre, la souffrance. Ces différentes aspirations transcendent l’histoire dont elles sont le moteur. Avec persévérance et opiniâtreté, ces forces du bien travaillent notre histoire et tendent à la concrétisation de l’idéal. Il y a des avancées, des reculs, des régressions, mais le cap est tenu malgré l’adversité.
Ce qui est frappant, dans l’histoire contemporaine, et même dans toute notre histoire, c’est l’homogénéisation, à chaque époque, des sociétés et des modes de gouvernance (mais comportant toujours des exceptions). A la généralisation de la royauté, a succédé le régime républicain ; aux dictatures en Europe et Amérique latine, la démocratie. Bien évidemment demeurent des états régressifs où, comme dans la théorie de l’évolution biologique, la mutation progressiste cohabite avec l’organe et l’espèce antérieurs.
Le nez dans le guidon de l’actualité nous vivons l’évènementiel dans le court terme, ce qui nous empêche d’accéder aux lents mouvements de l’histoire et à sa direction générale. Comme le fascisme hitlérien ou le communisme stalinien, les formes politiques les plus incompatibles avec l’idéal du bien sont condamnées à régresser. Il en va ainsi de l’islamisme radical dont l’annihilation complète est une question de temps. Le combat peut être long, les souffrances terrifiantes, mais l’avenir ne saurait lui appartenir. Les conflits ne sont jamais éternels : même la guerre de cent ans s’est achevée. Les contradictions se dénouent, le camp des perdants se fait un raison : l’orientation proposée n’était pas la bonne.
L’homogénéisation des modes de vie et de pensées, le rôle décisif des sciences et de la technologie, la mondialisation des échanges et des types de consommation, façonnent à l’identique les sociétés. Ceux qui s’en éloignent ne sauraient s’en détacher très longtemps : la théocratie iranienne, le communisme héréditaire nord-coréen sont à plus ou moins long terme condamnés. Mais le temps d’une vie d’homme est bref, les évènements tragiques sont vécus au quotidien. Il est difficile de se projeter dans le lointain imprévisible qui apparaît plus sûrement comme prolongement naturel du présent. Mais il importe néanmoins de ne pas demeurer indifférent à l’actualité du présent au nom de l’histoire : présent et avenir se fécondent mutuellement.
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