Hollande et son armée mexicaine

L'équipe de campagne de François Hollande, telle que dévoilée cette semaine, sera donc articulée autour de Pierre Moscovici, de l'eurodéputé Stéphane Le Foll, responsable de l'organisation, de Martine Aubry, première secrétaire du PS, de Manuel Valls, chargé de la Communication, et de Michel Sapin. Certes deux fidèles historiques "hollandais" sont aux postes clefs, (Stéphane Le Foll et Michel Sapin) mais avec l'ex-strauss-kahnien Pierre Moscovici comme directeur de campagne, Manuel Valls à la communication et deux proches de Ségolène Royal parmi les quatre porte-parole, toutes les sensibilités du PS sont intégrées. Martine Aubry dirige le conseil politique avec Jean-Michel Baylet, président du parti radical de gauche. Des représentants de tous les candidats à la primaire sont essaimés dans l'équipe. Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste à l'Assemblée, est conseiller spécial. Même Laurent Fabius, pourtant assez réservé envers Hollande, n'est pas oublié. François Lamy, bras droit de Martine Aubry, est chargé des relations avec le parti. Quatre porte-parole ont été nommés : les « royalistes » Najat Vallaud-Belkacem et Delphine Batho, et les « hollandais » Bruno Le Roux et Bernard Cazeneuve !

Il est assez évident que nous sommes ici en présence d'une armée mexicaine, au point du reste que le travers a été formulé par la presse dès hier : Moscovici a répondu que l'équipe était « très cohérente, solide, rassemblée et finalement plutôt resserrée." Il a annoncé néanmoins qu'elle devrait « s'élargir dans les prochains jours" ! Tous « les talents du PS seront mobilisés, personne ne sera oublié, tout le monde est à bord ». Par delà cette organisation en forme d'étoile, Hollande souhaite éviter que soient réitérées les erreurs de 2007, notamment la fracture entre le candidat et le parti. Voilà une intention louable, sauf que tout ici rappelle le travers le plus fréquent de la Vème République, à savoir la nomination stratégique.

Depuis 25 ans en effet, gauche et droite pratiquent à jets continus la technique du remerciement pour nommer ministre et responsables, ou circonscrire un ennemi en puissance (Sarkozy sur le point de nommer ministre Villepin, par exemple). Avec cette technique dite Roux-Combalusier, combien de fois a-t-on vu des ministres totalement ignorant de la charge qui leur était confiée ? Plusieurs noms viennent aussitôt en tête, même récemment....

François Hollande, en adoptant la technique sempiternelle de la nomination de complaisance (pour, souvent, des responsabilités imaginaires) montre là le visage d'un homme qui ne sait pas dire non, ce qui risque d'avoir un coût électoral certain puisque c'est semble-t-il un des axes importants de la potion concoctée par ses adversaires pour le discréditer. Il tombe, en quelque sorte, dans le travers, réel ou inventé, que ses contempteurs - y compris dans son propre parti -soulignent le plus souvent.

Et l'air de la "Curcaracha" n'est pas en voie d'achèvement : le député européen socialiste Kader Arif est en charge du secteur Coopération, et le président de la commission des finances à l'Assemblée, Jérôme Cahuzac, dirigera le pôle Budget, Finances, Fiscalité. Des radicaux de gauche siègent également dans l'équipe : Thierry Jeantet, vice-président du PRG, conduit le pôle Économie sociale et solidaire. Harold Huwart est chargé aux côtés de Michel Sapin du projet présidentiel. Jacques Mézard, sénateur du Cantal et président du groupe RDSE, Jean-Bernard Bros, adjoint au maire de Paris, Guillaume Lacroix, vice-président du conseil général de l'Ain et Patrick Molinoz, conseiller général de Côte d'Or, sont intégrés au conseil politique etc. etc.

Si François Hollande est élu l'an prochain, pratiquera-t-il cette même technique de remerciements tous azimuths, soit l'un des plus détestable travers de la politique au petit pied ? C'est une question que l'UMP, tout crocs dehors, ne manquera pas de lui poser.