Hommage à Christian Poveda : « La Vida Loca »
C’est un hommage poignant que nous a offert la Licence Professionnelle de « Journalisme & Médias Numériques » de l’Université Paul Verlaine de Metz ce soir.
Christian Poveda, journaliste, photographe et documentariste français a payé de sa vie la volonté de rendre compte de la réalité. Il sera assassiné dans l’exercice de sa passion le 2 septembre 2009 à San Salvador de quatre balles dans la tête en laissant derrière lui un travail d’investigation éblouissant. Engagé, ce franco-espagnol a mené sa carrière journalistique en prenant le soin de rester au plus près de l’objectivité. Ainsi dans « Voyage au bout de la droite », qu’il réalisera avec Nicholas Fraser, Christian Poveda relèvera audacieusement le pari risqué de filmer au cœur des candidats et partisans d’extrême droite européens. Il sera également à l’initiative du projet novateur de la série de documentaire « Citoyen Klarsfeld » en collaboration avec Claude Ardid, également journaliste et Arnaud Klarsfeld, avocat réputé qui aura le rôle d’intervieweur. Le concept, inspiré des documentaires de Michael Moore, sera de trouver un journaliste capable de traquer des gens sur des phénomènes de sociétés afin de mettre la lumière sur des affaires. Parmi leurs investigations, la traque des cyclistes dopés sur le Tour de France, la double peine, etc.
Mais c’est le remarquable documentaire « La Vida Loca », dont il est le réalisateur et initiateur, qui lui aura valu sa vie au Salvador en septembre dernier. Film empreint d’humanité, il sera le résultat d’une enquête exceptionnelle de plusieurs années au cœur des gangs les plus violents d’Amérique Latine. Il y montrera la haine, et la violence extrême provenant du désespoir de ceux qui n’ont jamais rien eu. Ce cinéma-vérité ira au plus profond de la vie quotidienne des salvadoriens avec un tournage au sein même des gangs : le « Mara 18″ d’un côté et le « Mara Salvatrucha » de l’autre. Ces pouvoirs parallèles contrôlent et rythment la vie des habitants : de leurs appartenance à la naissance à un gang à un autre, à leurs signes distinctifs au travers d’imposants tatouages sur tout leur corps. Dévoilant pendant 1h30 des moments intenses d’intimité captés au vif, le documentariste fera le portrait croisé de ces personnages en montrant leurs attentes quotidiennes, leurs espérances, leurs craintes, etc. Une insertion impressionnante dans le trafic de drogue, les vols, la politique du pays, … Des scènes crues dévoilent aux spectateurs les règlements de comptes entre les gangs avec l’assassinat sous l’objectif de Poveda de plusieurs des protagonistes. Il aura fallu un courage et une prise de risque inconsidéré au journaliste pour tourner ce film et en faire ce qu’il est : un formidable témoignage. Sa disparition à trois jours de la sortie sur les écrans français de « La Vida Loca » laisse un grand vide à tous les journalistes militants et engagés. Et notamment à Denis Robert et Claude Ardid, ses collègues et amis, qui lui auront rendu un honorable hommage aujourd’hui. Certes, « la fin d’une époque » mais l’espoir que d’autres auront l’audace de continuer ses combats : la démocratie ne peut pas vivre sans le journalisme, et le journalisme sans documentaire…
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