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Il faut libérer le blogueur Kareem Amer

Deux ans, ça suffit !

Aujourd’hui, l’étudiant Abdel Kareem Nabil Suleiman (“Kareem Amer”), 24 ans, entre dans sa troisième année de détention à la prison de Borg el Arab, près d’Alexandrie. Deux ans déjà et rien n’a changé. Sa famille n’est jamais venue le voir. Seule son avocate rapporte des nouvelles d’un moral qui s’amenuise de jour en jour et d’une santé fragile. Ses parents, sans doute victimes d’intimidations, ont même publiquement désavoué leur fils et appelé à sa condamnation à mort. Depuis le 1er septembre, les gardiens l’empêchent de sortir de sa cellule.

Ce 6 novembre 2006, Kareem Amer a été arrêté en raison d’articles qu’il postait sur son blog (www.karam903.blogspot.com), critiquant la dérive autoritaire du président Hosni Moubarak, ainsi que le fonctionnement de l’université sunnite Al-Azhar, où il étudiait le droit. Sur son site, il avait notamment mis en cause la politique de séparation des sexes en vigueur dans cette université. Il révélait également les pressions subies par certains religieux pour qu’ils soutiennent Hosni Moubarak. Etait-ce une raison suffisante pour le condamner à quatre ans de prison cent huit jours plus tard ? Le 22 février 2007, deux chefs d’accusation ont été retenus à son encontre : “insulte à l’islam” et “insulte envers le président”.

Ce 6 novembre 2006, Kareem Amer est également devenu un symbole pour l’une des blogosphères les plus actives du monde arabe. A eux seuls, les blogueurs égyptiens représentent près de 30 % des blogueurs de la région. La plupart d’entre eux sont des défenseurs des droits humains, victimes de mesures de dissuasion toujours plus dures. Depuis cet été, les blogueurs qui veulent avoir accès au réseau WiFi (Wireless Fidelity) doivent fournir leur adresse e-mail et leur numéro de téléphone portable avant de pouvoir accéder au World Wide Web. Ce sont des données précieuses pour les publicitaires, les spammeurs… ou les agences de sécurité.

Etant donné ce contexte, les blogueurs égyptiens sont devenus incontournables et, dans les conférences internationales, il y en a toujours un pour parler de la blogosphère en Afrique du Nord. Ecoutez-le et vous apprendrez qu’internet n’est pas seulement un moyen de consulter ses e-mails. Sans la mobilisation des blogueurs, deux policiers continueraient à torturer des prisonniers dans un commissariat de la capitale en toute impunité. Sans leur ténacité, le “mouvement du 6 avril” n’aurait duré qu’un jour. Ce jour-là, début avril 2008, plusieurs centaines de manifestants ont été interpellés alors qu’ils protestaient contre les conditions de vie au Caire et dans ses environs. Parmi eux, une trentaine de blogueurs entraînant la mobilisation. Certains sont restés deux semaines derrière les barreaux, “pour l’exemple”.

Comble du paradoxe, l’Egypte attire plus que jamais les acteurs internationaux du secteur de l’internet. Depuis le 2 novembre 2008, l’organisation américaine ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers), qui gère l’attribution des noms des sites internet dans le monde, fête son dixième anniversaire au Caire. La fondation Wikimédia, une organisation non gouvernementale qui représente la plus grande entreprise collaborative sur internet, a réuni des centaines de blogueurs, en juillet, à Alexandrie. A 40 km de la cellule de Kareem Amer. Pas un mot n’a été prononcé sur son cas.

“Un an déjà et je suis toujours privé de liberté. La douleur de l’expérience m’a appris qu’aucun sentiment n’égale celui de l’injustice”, écrivait Kareem Amer, depuis sa prison, en septembre 2007. “Ennemis de la liberté, symboles de l’oppression […], sachez que vos jours s’embrument déjà. L’aube des générations futures pointe. Demain nous appartient”, concluait-il.

Deux ans, ça suffit !

 

Plus d’informations : http://www.freekareem.org


Les blogueurs qui veulent montrer leur soutien peuvent afficher sur leurs blogs des bannières à l’effigie de Kareem Amer, à télécharger ici : http://www.rsf.org/article.php3 ?id_article=29186

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5 réactions à cet article    


  • Zalka Zalka 6 novembre 2008 10:22

    Récemment, j’avais trouvé criticables et vaines certaines actions de RSF, mais aujourd"hui dans le cas de Kareem Amer, je soutiens à 100% votre position.

    Merci pour ces infos et ces liens.


    • caleb irri 6 novembre 2008 10:54

      il est bon que ce genre d’infos soit relayé, internet doit servir la liberté.


      • Lisa SION 2 Lisa SION 2 6 novembre 2008 14:44

        " deux chefs d’accusation ont été retenus à son encontre : “insulte à l’islam” et “insulte envers le président”.

        Que ceci serve de leçon à la nation égyptienne, et qu’elle comprenne enfin ce que veut dire " séparation de l’Eglise et de l’Etat ".

        " Sans la mobilisation des blogueurs, deux policiers continueraient à torturer des prisonniers dans un commissariat de la capitale en toute impunité. "

        L’heure est venue où les caméras cachées, les téléphones portables vidéo et la blogosphère sont devenus imparables. Les institutions publiques de sécurité intérieures et de justice religieuse vont devoir s’humaniser, se civiliser, sous peine de révolution populaire. Ce qui est discutable et condamnable dans les écrits des blogueurs ne l’est plus quant à la preuve par l’image. C’est comme cela que les Etasuniens ont découvert les dérives de la police et peut-être pour cette raison qu’ils ont maintenant un président noir.

        En effet, ce qu’Internet découvre, Dieu le voit aussi...


        • K K 7 novembre 2008 09:42

          Aux états unis, ce sont davantage les cameras embarquées dans les véhicules de police que les videastes amateurs qui ont contribué à assainir les interventions.


        • Annie 6 novembre 2008 20:08

          A rapprocher je suppose de la Tunisie qui a accueilli le sommet mondial sur la société de l’information pendant qu’elle censurait les journalistes assistant à ce sommet.
          Il est quand même utile de préciser que les insultes comme chef d’accusation s’appliquent aussi à des pays laïcs. Je citerai en particulier l’insulte à l’identité turque.
          Sinon, un apparté un peu méchant, pas contre RSF que j’admire et respecte pour le travail fantastique que fait cette organisation, et en particulier pour ses investigations et ses rapports.
          Vous auriez publié le même article lorsque R. Ménard était encore votre président, vous auriez eu 200 commentaires vous accusant d’être le suppôt de satan (des américains).
          Ménard parti, RSF n’intéresse plus beaucoup de gens sur AV. Mais il faut dire que les droitsdel’hommistes ont mauvaise presse ici.

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