• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Ils sont véners, ces p’tits jeunes et ces p’tits (...)

Ils sont véners, ces p’tits jeunes et ces p’tits vieux

Les p’tits jeunes se tapent dessus dans la rue et les p’tits vieux dans des revues, à la télé et même sur la toile. Ils sont tous véners :

vénère & véner ; être vénère adj.

Énervé, pas content, en colère, mécontent 

Exemple n°4 : « Ah j'suis vénère !! Ils m'ont mis la haine ces fachos ! 2002. »

http://www.languefrancaise.net/bob/detail.php?id=16853

 

Les victimes, ce sont des p’tits jeunes, Clément Méric (18 ans), le crâne fracassé dans une rue de Paris, et Esteban Morillo (20 ans), le crâne farci d’idées plus nazes que nazies au cœur de la campagne picarde. Le premier est la victime de l’autre qui est l’auteur de sa mort. Mais, dans un sens, ce pauvre con est la victime d’une mode et d’une dérive dont les auteurs ont pignon sur rue, s’ils n’y descendent pas (ou plus) y faire le coup de poing. Ils se contentent de faire le point dans des entretiens qu’ils accordent à des courtisans pour brosser dans le sens du poil des partisans.

 

Circonstances attenantes, Circonstances atterrantes… Circonstances aberrantes ?

Le plus remarquable et le plus ironique, c’est d’apprendre que ces bandes de jeunes, les « skins » et les « antifas » fréquentent les mêmes boutiques de fringues. Bientôt ils fréquenteront les mêmes bars. Bien sûr, on peut convenir avec Rimbaud qu’« on n’est pas sérieux quand on a dix sept ans. » Mais peut aussi revenir en mémoire cette remarque de Paul Nizan :

« J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. »

Il faut donc être un peu sérieux malgré tout et faire quelques remarques de bon sens. Si les jeunes « skins » et les jeunes « antifas » ont les mêmes fournisseurs de vêtements, ils n’ont pas les mêmes fournisseurs d’idées (même si parfois les « théoriciens nationalistes » ont emprunté certaines de leur idées à Sorel, Lénine ou Gramsci) . Et surtout, si l’arsenal « théorique » des « antifas  est parfois sophistiqué (beaucoup se contentent cependant de répéter le catéchisme antifasciste), l’arsenal matériel des fascistes est toujours plus élaboré et plus fourni. Ainsi, pendant que le petit Clément lisait des livres, Esteban, lui, s’il avait lu moins de livres, s’était sans doute entraîné au maniement des armes et au combat de rue.[1]

 

Le drame de rue montre bien les limites de l’antifascisme. Il arrivait au petit Clément de porter un masque, mais il aurait dû porter un casque. Et on aurait dû lui chanter :

Faut pas jouer les loubards
Pas casser les portes
Pas rêver qu'un blouson noir
Décuple les forces

https://www.youtube.com/watch?v=mk564Jawdns

 

Quant au pauvre Esteban, même si les lobbies nationaux saucissons lui payent un bon avocat et parviennent à lui éviter une peine trop longue, il lui restera sur la conscience d’avoir tué un plus petit que lui.

 

Constantes & circonstances

Les p’tits vieux n’ont pas ces problèmes de conscience, eux. Ils ont une stratégie. Par p’tits vieux, je vais me limiter ici au deux Eric de la droite décomplexée : Buisson et Zemmour.

Eric Buisson, l’homme de l’ombre qui apparaît parfois dans la lumière depuis que son poulain est tombé. Dans sa dernière confidence publique, il qualifie la mort de Clément Méric comme « un acte abominable, mais heureusement isolé, qu'on ne peut pas rattacher à un contexte de violence globale ». Puis il analyse la situation de la droite française qui descend dans la rue depuis qu’elle n’est plus aux affaires : « Nul ne peut mesurer l'impact qu'aura cette révolution culturelle. Nous sommes dans cette phase que décrivait Lénine de politisation de catégories jusque-là réfractaires ou indifférentes à l'égard de la chose publique. Regardez ce qui s'est passé avec les catholiques qui, en opposant la loi morale reliée à la transcendance comme légitimité supérieure à la loi, se sont redécouverts pleinement chrétiens et pleinement actifs contre la prétention de César de se substituer à Dieu. (…) D'une certaine manière, ce mouvement aura été la première manifestation de ce qu'on peut appeler un populisme chrétien ».

 

Zemmour, lui n’a pas eu ces mots pour Clément Méric. Il a juste dit qu’il trouvait ça « très triste, jamais plaisant, jamais réjouissant », avant de se lancer, comme n’importe quel « beauf », dans une de ses litanies quotidienne contre la récupération, la manipulation, la bien-pensance de gauche, la pensée unique, les élites parisiennes, etc. Mais tout cela a peu d’importance au fond, sauf pour les « beaufs » à qui il donne l’illusion qu’ils sont « pas cons » et la permission de s’énerver contre les gauchistes et les « communisses », comme on dit dans La Conjuration des Imbéciles.

Zemmour, s’il lui arrive de se référer à Marx, je ne l’ai jamais entendu se référer à Lénine. Quant à la religion, il se présente comme un Français d’origine israélite et non pratiquant et, pour peu qu’il se nomme Bonaparte ou de Gaulle, il ne voit aucun inconvénient à « la prétention de César de se substituer à Dieu ». Mais il aime bien être énervant et s’énerver à la télévision, comme un petit garçon qui fait son intéressant, quand il a un grand près de lui (comme Naulleau, qui peut le protéger) ou un vieux (comme Domenach qui reste bienveillant avec lui, quand ils se renvoient au visage leurs mauvaises fois respectives). Il se voit comme un grand stratège. Il se verrait bien comme un Machiavel des temps modernes et attend qu’un prince le recrute comme conseiller principal. Et il n’a pas choisi entre Marine et Nicolas.

 

Plus ardent, Eric Buisson n’a pas ces hésitations de petit garçon. D’abord, il a déjà été le conseiller du prince et il l’a mené là où il voulait le mener : à « une défaite fondatrice »[2]. Après quoi il déclare sans rire :

« Aujourd'hui, il n'y a en France qu'un homme d'Etat, c'est Nicolas Sarkozy. Face à la dynamique du FN, toute autre candidature que la sienne exposerait la droite au risque d'une élimination au premier tour. Il est le seul en capacité de rassembler »

Ça ne mange pas de pain de flatter un vaniteux. La « défaite fondatrice » du petit Nicolas va permettre l’avènement de la vierge Marine.

 

Conclusion circonstanciee

Eric Zemmour a beau jeu de se moquer des dérives de l’antifascisme. Il veut faire « historien » en déclarant que le fascisme (italien) a pris fin en 1945. Et il veut faire son intéressant, une fois de plus, en déclarant que « le fascisme est à l’origine d’extrême gauche ». Mais il est surtout « hystérique », ce type qui répète aussi que « l’islamisme, c’est le communisme, plus Dieu ». Il serait plus inspiré en reconnaissant que c’est « le principal fascisme du XXIè siècle ».

 

Le « marinisme », lui, pourrait être, si les événements le permettent, l’avènement tant attendu depuis les années trente de l’autre siècle d’un « fascisme à la française ». Un fascisme qui n’en porterait pas officiellement le nom, évidemment, mais qui pourrait réunir les « fondamentalistes catholiques » et les « fondamentalistes bonaparto-gaullistes ».Il pourrait même s’intégrer dans un « fascisme européen ». Le propagandiste de Zemmour l’appelle de ses vœux, qui intime à Sarkozy de devenir le Viktor Orban français (faute quoi il soutiendra La Marine comme un seul homme).

 

Lutter contre ce projet, c’est d’abord le critiquer et lui opposer un projet alternatif. Ce n’est pas chercher à en découdre dans la rue avec des crânes rasés, ni les singer dans les comportements.

« Sans la critique des armes, les armes de la critique sont les armes du suicide. Quand ils ne tombent pas dans le désespoir du terrorisme ou dans la misère de la contestation, bon nombre de prolétaires deviennent les voyeurs de la classe ouvrière, les spectateurs de leur propre efficacité différée. »

Raoul Vaneigem, TOAST AUX OUVRIERS REVOLUTIONNAIRES (1972)

 



[1] Je rappelle ici que la majeure partie de l’œuvre de l’historien Venner consiste dans des monographies consacrées aux armes.

[2] « La synergie dialectique créée par le candidat Sarkozy a rendu à ce peuple la fierté de se battre pour autre chose que des intérêts catégoriels. Elle lui a du même coup redonné une suprématie morale. En ce sens, la présidentielle n'a pas été un échec, mais une défaite fondatrice. »

 


Moyenne des avis sur cet article :  3.35/5   (17 votes)




Réagissez à l'article

8 réactions à cet article    


  • Ruut Ruut 13 juin 2013 16:10

    La bêtise est le plus grand fléau de notre pays, nous la cultivons pourtant avec hardeur.


    Il faut cependant avouer que nous léguons a ces jeunes un monde sans rêve.

    Seul le rêve calme la violence.

    Notons aussi que la sagesse de nos anciens n’est pas un modèle de vertus.


    • Cocasse Cocasse 13 juin 2013 17:45

      Je me demande si ceux qui écrivent ce genre d’articles n’ont pas avant tout besoin de se convaincre eux-mêmes.

       smiley


      • Kindred Kindred 13 juin 2013 18:13

        @ l’auteur

        Vous voulez parlez de PATRICK Buisson ?


        • Nuccia Nuccia 13 juin 2013 19:47

          Ce Mr Buisson est peut être une sorte de cheval de Troie ? 

          Un équidé galopant pour ses véritables éleveurs de la droite marine ?

          • Jules Elysard Jules Elysard 13 juin 2013 21:40

            @ Kindred

            J’aurais dû mieux me relire.

            C’était une petite contribution autour de L’affaire Méric... du nom de la victime...


            • Jimmy 14 juin 2013 10:50

              quand Zemmour dit que le fascisme est mort en 45 il tape dans le mille


              • Jules Elysard Jules Elysard 14 juin 2013 11:57

                Le fascisme a vraiment mauvaise presse de nos jours puisque ceux qui se sentent visés s’empressent de répondre que ceux ne sont pas eux qui sont « fachos », mais les autres, les « rouges ».

                Vous êtes Cocasse, Jimmy, quand vous faites le SAV d’Ericounet.

                Mais je ne suis pas certain de m’adresser à des personnes « réelles ». Je suis allé voir comment vous vous présentez. Vous ne faites pas dans la boursouflure comme certains. Vous ne dites rien et vous ne publiez aucun article. Vous ne risquez donc pas d’être jugés. Vous seriez plus vraisemblablement des désoeuvrés qui se contentent de jeter leur fiel sur les articles qui ne leur plaisent pas. Ou peut être même faites-vous partie d’une organisation de pestiférés dont c’est une partie du travail de militant (quand on n’est pas gaulé pour se battre avec un leucémique).

                Vous connaissez les règles d’AGORAVOX. Si vous réussissez à publier 4 articles (vous prenez le risque, bien sûr, qu’on se moque un peu de vous), vous serez MODERATEURS et vous pourrez contribuer à interdire la publication des idées qui ne vous plaisent pas.


                • Jules Elysard Jules Elysard 14 juin 2013 12:00

                  @ Cocasse

                  Seriez-vous fonctionnaire ?

                  Je vous demande ça j’ai lu une de vous réaction qui dénote :

                  "La jalousie privé-publique est fabriquée par une propagande incessante de plus de 30 ans.

                  Les conditions de travail s’endurçissent dans le privé, puis on montre le fonctionnaire (qui n’a pas encore perdu tous ses droits) comme un privilégié, un fénéant, un incapable, un gaspilleur, et bien sur un emmerdeur fini pour ceux qui essayent encore de défendre leurs droits, comme les cheminots.

                  Donc nivellement par le bas."

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès