Impressions de Seignosse, de A à V
Ambiance peu argentée, argent, Bayrou, centre, démocrate et démocratie... UDF, valeurs.
Ambiance. Peu argentée, joyeusement et râleusement créative. Le mur de la salle d’accueil envahi d’annonces - pour des réunions autogérées, des débats hors programme, la recherche d’autres militants d’un même département...
Argent. S’il n’était pas là, on lui a pourtant donné la chasse. François Bayrou semble avoir trouvé là un terrain d’entente entre ses personnalités "de centre gauche" et "de centre droit". Et pourtant, dit-il, "je ne mésestime rien de l’économie, (...) des conditions qui créent la croissance ; mais la responsabilité d’un politique est de parler (...) des valeurs". Refrain originel du centre, après quoi on passe aux choses sérieuses, l’économie et le social ? Ou dénominateur commun des nouveaux adhérents, associatifs, écologistes, citoyens engagés pour "l’avenir de [leurs] enfants" ?
Bayrou. Cette prononciation le démontre : l’ancien Vert qui présente la synthèse des ateliers sur l’organisation du MoDem est un adhérent très récent. 1 300 personnes le reprennent de plus en plus fort jusqu’à obtenir un "Bai-irou".
Centre. Le mot, peu populaire parmi les participants, est désormais utilisé en phrases négatives par François Bayrou : "nous ne bâtissons pas seulement un centre - je ne vais pas renier l’idée de centre - mais au fond, le mot signifie qu’on se définit par rapport à droite-gauche, et je vous invite à vous définir par rapport à notre projet et à notre idéal : c’est le projet démocrate que nous avons à bâtir. C’est un mouvement central, mais il a son identité", comme "le Parti démocrate aux Etats-Unis, le Parti démocrate au Japon (...)".
Démocrate et démocratie. Qu’est-ce qu’un parti démocrate ? Pour les participants, c’est un parti qui pratique la démocratie. Montre-moi ce que tu fais, je te dirais qui tu es. C’est l’article 2 de la Charte éthique proposée par François Bayrou (PDF), et c’est de loin le plus applaudi : "Le Mouvement Démocrate respecte en son sein les principes démocratiques qu’il promeut à l’extérieur, notamment participation, information, liberté du débat, séparation des pouvoirs, transparence des décisions".
Elections municipales. "Il y a dans cette salle deux préoccupations : des gens qui vont essayer d’être élus, et ont un impératif de date ; et des gens qui se sont intéressés au MoDem en tant que mouvement, participation des citoyens, n’ont pas envie d’être élus ; un Mouvement doit permettre un travail entre les périodes électorales", dit un adhérent lors du grand débat de samedi. Oui mais... on est en période électorale, déjà les municipalités sortantes composent leurs listes. Alors François Bayrou, dans le dernier paragraphe de son discours de clôture, se contente d’une consigne facile à remplir : que les listes auxquelles le MoDem participera soient des listes de "rassemblement". Donc toute liberté est laissée... à l’instance qui accordera les investitures, instance à préciser, mais qui remontera plus haut que le niveau départemental.
Fraternité. Mot que je n’ai pas entendu en quatre jours, alors qu’il avait été cité lors de la campagne présidentielle (c’est la fraternité qui permet de concilier liberté et égalité, c’est l’apport traditionnel du centre). Mais la fraternité m’a semblé évidente dans toutes les activités et les débats.
Gare. Une navette est arrivée à la gare de Bayonne pas très longtemps après le train. Et, une bonne suée aidant, j’ai assuré une place dans la navette retour, malgré la demi-heure de retard du discours de clôture. Ouf.
Huées. Les "élus" qui plaidaient pour le statu quo, ou pour une période transitoire ultrafloue, ou pour l’alliance à droite, n’y ont pas échappé. "On a un problème avec un certain nombre de nos élus" - François Bayrou, samedi 15 au soir, applaudi.
Informatique et internet. À l’atelier "Internet et politique", beaucoup de participants se sont tournés vers le siège du MoDem en demandant, qui des outils, qui des consignes, qui un début d’organisation - sans parler de la relance du site du MoDem. À la plupart de ces questions, Thierry Crouzet, Christophe Ginisty et moi-même avons répondu quelque peu mécaniquement : "faites-le vous-même, n’attendez pas, le MoDem c’est vous, les compétences c’est vous". À quoi bon dire "patience" ? Ça aurait dissuadé toute initiative. Mais les participants sont sortis assez fâchés. Ça n’a pas échappé à François Bayrou : il a ajouté un paragraphe à son discours de clôture, à l’attention des informaticiens (p. 5 du PDF). En substance : merci pour vos critiques, merci surtout pour votre aide.
Jeunes. Apparemment, il y a un problème avec les jeunes (UDF ? Démocrates ? Le terme est souvent employé seul). Leur président Jean-Yves de Chaisemartin a démissionné en direct à la tribune, puis distribué un communiqué de presse. Jean-Marie Cavada s’en est étonné. Dans son discours de clôture, François Bayrou n’a pas cité Chaisemartin. Je présume qu’en lisant la presse, je saurais le pourquoi du comment...
Kit petit déjeuner. L’an dernier, le petit déjeuner au restaurant était très bon. Cette année, on trouvait dans son bungalow un kit comprenant notamment un litre de lait, des sachets de thé et un paquet de café. Le matin, dépôt de pain à quelques hectomètres de mon bungalow : en indiquant le numéro de celui-ci, on avait droit à une baguette pour trois personnes. Mais aussi, sur demande, à une remise à niveau en lait et thé.
Lot-et-Garonne. Mes deux colocataires étaient de cette fédération, dont le président est, aux dernières nouvelles, le député Jean Dionis. Jean Dionis a critiqué la scission du Nouveau Centre, puis il a rejoint ce particule, et envoyé aux adhérents UDF une invitation à l’y rejoindre. Entre-temps, des militants ont créé un "comité de soutien au MoDem 47", celui qui a organisé le pique-nique publié sur dailymotion.
Militants. Le mot est plus juste que jamais. Les nouveaux adhérents venus à Seignosse ne sont pas des novices en militantisme. Ils sont forts de leur expérience associative, syndicale, entrepreneuriale. Loin du public passif qui a fait les belles années de meetings politiques télégéniques. Ils arrivent avec des méthodes, des outils, des expertises. Et l’expérience les a déjà échaudés - "Au niveau syndical, que les représentants soient élus est une chose ; mais si, une fois élus, ils font comme les politiques..." (entendu en atelier). Ils restaient à l’écart des politiques et de la politique, ce marécage à chausse-trappes, jusqu’au jour où entendre François Bayrou leur a donné envie d’y croire. Maintenant, ils vont voir. "Si ces nouveaux sont déçus, ça a été dit textuellement, il n’y aura pas de deuxième chance" (synthèse des ateliers).
N... . Un de mes soucis d’apprenti-journaliste : faut-il nommer les adhérents dont je note des déclarations ? Le Forum est-il un espace privé ou public ? J’ai un badge, mais n’ai pas sur la tête de gyrophare "journaliste", et pour cause. J’ai fait... au cas par cas.
Ouverture. Non, rien à voir avec le gouvernement, cette ouverture-là est absente des esprits - évoquée par un politique, elle ne recueille que sourires. L’ouverture dont parle Michel Veunac, délégué départemental des Pyrénées-Atlantiques, en synthèse d’un atelier sur la démocratie interne, c’est le contraire de "fermeture" : "Les systèmes fermés ne sont, par essence, pas démocratiques. Faire "entre nous", on s’asphyxie. Faire venir des gens qui ne sont pas du MoDem pour des débats ou réunions, j’y crois beaucoup. Si le mouvement veut être démocrate, il doit être parfaitement ouvert".
Prise de notes. Pendant mes 18 mois au siège de l’UDF, on m’a vu prendre des notes cursives au clavier pendant les réunions et colloques, à six doigts. À Seignosse, j’ai récidivé. Moralité : j’ai été mobilisé pour saisir au vol les changements et ajouts au discours de clôture. Laissant France démocrate sans rédacteur... Sacrifice militant ? Un camarade a eu pire : Cédric Augustin qui a dû, à cause de cela, laisser la place qu’il avait pourtant bien méritée à la même table. Cédric, si tu me lis... désolé, désolé, désolé. Et merci.
Quand. Le Béarnais François Bayrou le dit souvent, "le militant est par nature impatient". Le Tarbais Pierre Lagonelle, également UDF canal historique, a entendu dans les ateliers "une forte impatience". "La première chose qui sort, c’est la peur que cette parole reste en l’air, que certaines manières de fonctionner traditionnelles ne se traduisent par des blocages, que les propositions innovantes ne se noient dans les sables. Ce qui revient de tous les ateliers : quand est-ce qu’on attaque vraiment la construction du MoDem ? Les militants sentent dans les départements des blocages, et ont envie que ces blocages sautent. Ils veulent un mouvement qui laisse la place aux initiatives, pour que les gens qui veulent faire des choses puissent les faire, et vite !" (synthèse des ateliers).
Rupture. François Bayrou croit détecter une rupture sarkozyste : la précipitation à réintégrer l’Otan, contre la ligne d’indépendance des présidents de la Ve République. Forme de... continuité dans le discours bayrouiste depuis un an : la dénonciation du "modèle américain".
Séparation des pouvoirs. "La plupart des partis sont tentés par la monopolisation des pouvoirs : séparons la programmatique, les investitures, la conciliation, l’administration, les adhésions... il faut que ce soient des corps cloisonnés, et choisis par les membres. Évitons la monarchie associative." Applaudissements (atelier sur la démocratie interne).
Surf. Samedi à 7 h 30, quand le soleil projette de se lever et que le jogger arrive sur la page, deux surfers sont déjà dans l’eau.
Tables de presse. Y venant pour répondre aux questions des journalistes, François Bayrou m’y trouve et m’invite à utiliser cet espace. Mazette, première consécration pour France démocrate ! C’est avant l’épisode de la prise de notes.
UDF - la dernière entrée
que j’aie trouvé pour cet abécédaire, la première que je rédige. Le mot
n’a pas de sens commun : chacun l’utilise dans un sens différent.
- Beaucoup sont fiers d’avoir "adhéré à l’UDF" pendant la campagne présidentielles - l’UDF, c’est François Bayrou.
- Thierry Benoît se répète "député UDF" - l’UDF, c’est le centre droit, la démocratie chrétienne, le centre qui travaille avec la droite.
- Un
participant à un atelier raconte que, "à l’UDF, le président
départemental avait le pouvoir absolu" - l’UDF, c’est la politique à
l’ancienne.
- François
Bayrou utilise le terme en deux sens. "L’UDF a ses statuts, elle va se
réunir sous ma présidence" - c’est la chimie par laquelle il contrôle
la gestation du Mouvement Démocrate naissant. Et "l’UDF de Giscard",
c’est le "nœud de vipères" dont il garde un si mauvais souvenir que
rien ne sera plus jamais comme avant.
Valeurs. François Bayrou, le 15 au soir, très applaudi : "Nous avons un corps de valeurs à défendre, construire, illustrer, proposer, dans un projet de société que nous allons proposer aux Français... Nous nous définissons par notre avenir, notre horizon, notre projet". Et un peu plus loin : "Naturellement, on a besoin d’une organisation".
Tout est là - ce qui permettra d’en rester à la lettre V ;-).
L’organisation n’est-elle, que la contrainte inévitable, le côté obscur, les coulisses, la fondation cachée de la construction politique ? Façon RPR-UMP ? Ou l’organisation est-elle, à la façon des associations militantes, le prototype, la démonstration des valeurs, ce qu’on met en vitrine ?
(article publié les 16-17 septembre sur France démocrate).
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