Inflation et TQM : éléments de réflexion !
Cet article s’inscrit dans le droit fil des articles déjà publiés sur l’inflation, le pouvoir d'achat et la hausse du prix du litre d'essence.
La TQM, théorie quantitative de la monnaie, est énoncée dès 1568 par le français Jean Bodin (1529-1596) 1, puis (Richard Cantillon (v. 1680-1734) 2 dans Essai sur la nature du commerce en général.) puis d'autres et notamment développée et popularisée ensuite par Irving Fisher (1867-1947) dans son ouvrage de 1912 (The purchasing power of money, p. 26) 3 sous la forme de l'équation d'échange suivante :
MV = ∑ pQ
Avec : M = quantité de monnaie, V = vitesse de circulation de la monnaie, ∑ pQ = somme des quantités de biens et services achetés, multipliées par leur prix
Équation plus connue aujourd'hui sous la forme simplifiée :
MV = QP
Avec : M = masse monétaire, V = vitesse de circulation de la monnaie, QP ≡ PIB nominal (Q = volume de transactions, P = niveau des prix)
Cette équation postule que V étant relativement stable, toute variation de M plus rapide que celle Q, aura des effets directs sur P, en termes d'inflation ou de déflation.
C'est notamment sur cette base que le courant de pensée monétariste, dont l'américain et Nobel 1976, Milton Friedman (1912-2006) est le principal fondateur, énonce (4 siècles après Bodin) que "La cause immédiate de l'inflation est toujours et partout la même : un accroissement anormalement rapide de la quantité de monnaie par rapport au volume de la production" 4
L'inflation est donc bien un phénomène strictement monétaire !
La relation entre l'afflux d'or ou d'argent et la hausse des prix a souvent été relevée dans les systèmes monétaires métalliques qui ont émaillé l'histoire économique. Ce fut notamment le cas au 16e siècle sous l'effet des nombreuses découvertes de mines d'or et d'argent dans le Nouveau Monde. Au 20e siècle, et principalement après la Seconde Guerre mondiale, la "Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie" de John Maynard Keynes (1883-1946) a éclipsé le lien fort qui existait entre la quantité de monnaie et l'inflation. Puis, dès la fin des années 1970, la crise du keynésianisme, la médiatisation et la mise en œuvre du monétarisme − notamment au Royaume-Uni (M. Thatcher) et aux États-Unis (R. Reagan) −, ont permis à la TQM de devenir, ou de redevenir, via les agrégats de masse monétaire, un outil privilégié de la politique monétaire 2 élaborée par les grandes Banques centrales – théoriquement indépendantes − des pays industrialisés. Et cela parfois au détriment de la politique de l'emploi menée par les Pouvoirs publics.
Notons que, dans le cadre d'une monnaie inconvertible, l'équation de Fisher s'applique à 100% et les exemples d'hyperinflation l'attestent, notamment celui récent du Zimbabwe – en 2009 ce pays a dû abandonner sa monnaie, le dollar zimbabwéen miné par une inflation de plusieurs milliers de pour cent, et prendre pour monnaies le dollar américain et d'autres monnaies internationales… impossibles à fabriquer légalement hors de leur pays d’émission (cf. : planche à billets).
Pour une monnaie convertible dont la zone commerciale s'étend sur plusieurs économies, voire au monde, comme c'est le cas du dollar américain, la variation de M sur P sera atténuée… du fait d'une certaine dispersion des signes monétaires.
N.B : il convient de rappeler qu'une politique monétaire ne peut se faire exclusivement par des objectifs de quantité. Si l'offre de monnaie diminue, une tension sur les taux d'intérêt va s'opérer, et inversement. Les taux d'intérêt (cf. : taux directeurs), voulus par la Banque centrale pour donner plus ou moins de qualité à sa monnaie, ont toujours une importance primordiale dans l'équilibre offre/demande de monnaie, et de son cours sur le change des changes.
1. voir Joseph-Aloïs Schumpeter (1883-1950) : Histoire de l'analyse économique, Livre I, chap. 6 : Valeur et monnaie, p. 433 et suivantes.
2. "L'augmentation de l'argent entrainera une augmentation de dépense, et cette augmentation [...] entrainera une augmentation des prix du marché [...]." dans Essai sur la nature du commerce en général, seconde partie, chap. VI, p. 90
3."This theory, though often crudely formulated, has been accepted by Locke, Hume, Adam Smith, Ricardo, Mill, Walker, Marshall, Hadley, Fetter, Kemmerer and most writers on the subject. The Roman Julius Paulus, about 200 A.D., stated his belief that the value of money depends on its quantity [...]" (Fisher, op. cit. chapitre 2, the equation of exchange, p. 14).
Ici, Fisher insiste sur le fait que cette théorie, bien que souvent formulée grossièrement, avait été acceptée par Locke, Hume, A. Smith, etc. Que, vers l'an 200, le romain Julius Paulus avait la conviction que la valeur de la monnaie dépendait de sa quantité.
4. Inflation et systèmes monétaires, chapitre 1, L'inflation, mal incurable, p. 67.
Prochain article : Loi de l'offre et de la demande
Crédit Photo : ICI.
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