Initier le nouveau et la confiance, pour piloter la transition au sein de l’entreprise
Le mot « transition » caractérise bien la situation dans laquelle nous sommes dans tous les secteurs d’activités, au niveau politique, industriel, économique, social et environnemental. La question qui se pose notamment aux dirigeants dans les entreprises est de savoir initier du nouveau pour créer du développement et de l’activité utile et durable. Quelques réflexions sur ce sujet.
Un exemple dans secteur de l’énergie
La transition énergétique
Ce récent débat, loin d’être abouti, a été l’occasion de commencer à réfléchir à la façon dont on passe d’un état à un autre état -non connu- avec des objectifs définis :
- une consommation maîtrisée des matières premières,
- un respect de l’environnement,
- un accès à l’énergie pour tous
- une responsabilisation de chacun dans sa contribution à ces objectifs.
Contribuer à un développement industriel, économique, avec une énergie disponible, fiable, peu coûteuse respectueuse de l’environnement. C’est tout l’enjeu. Un enjeu majeur qui va conditionner nos modes de vie dans le futur.
La complémentarité entre les énergies, et particulièrement entre le
nucléaire, les énergies renouvelables et le gaz naturel est une réalité. Elle permet de proposer des solutions fiables et performantes, adaptées à cette phase de transition, et qui n’obèrent pas des équilibres qui seront redéfinis pour les générations futures.
Nous avons devant nous un vaste chantier…
La transition entre le monopole et la concurrence
Cette transition énergétique a été précédée d’une évolution profonde dans les entreprises historiques du secteur de l’énergie, pour s’adapter à l’ouverture du marché à la concurrence.
Ainsi pendant ces 10 dernières années, les électriciens et gaziers d’EDF et de Gaz de France devenu GDFSUEZ, ont-ils vécu et mené la transition pour passer d’une situation du monopole à une situation d’opérateur en concurrence pour les activités commerciales, et en mode régulé pour les réseaux qui transportent l’électricité et le gaz pour les fournisseurs jusqu’à leurs clients consommateurs. Ouverture du capital, fusion pour ce qui est de Gaz de France avec Suez et changement de « statut d’EPIC (Etablissement public à caractère industriel et commercial) » pour devenir une entreprise privée avec des missions de service public. Bouleversements rapides et profonds culturels, organisationnels, managériaux et sociaux.
Ce type de transition ne peut se mener qu’avec une remise en question bien comprise et acceptée, des repères historiques. Ils sont le terreau culturel sur lequel se base l’évolution. Il est important de les respecter.
Il a donc fallu dés-imbriquer le système intégré, et construire un nouvel ensemble qui se traduit aujourd’hui pour le client par une complexité et une multiplicité d’interlocuteurs, …et malheureusement une facture qui ne baisse pas. La concurrence ne signifie par forcément baisse des prix, surtout si les conditions ne sont pas mises en œuvre pour qu’elle puisse réellement s’exercer.
Pour les gaziers, l’objectif prioritaire dans ce changement en profondeur, était de ne pas perdre la reconnaissance et la confiance des collectivités locales et des clients, et de continuer à être reconnus comme des professionnels de la sécurité industrielle.
C’est une aventure humaine dans laquelle chaque salarié s’investit, avec des moments difficiles et de grandes satisfactions aussi.
La transition entre une organisation d’entreprise verticale et une organisation qui favorise la transversalité
Aujourd’hui, la transition pour les entreprises, c’est aussi l’histoire d’une transition entre une organisation héritée du passé en « silos verticaux étanches » avec un soupçon de discipline militaire …. et un modèle managérial basé sur la coopération, la transversalité et la complémentarité. Evolution incontournable pour rester dans la course, et être à la fois agile et performant.
Ce fonctionnement encore trop « pionnier » bouscule nos habitudes.
Il intègre la « réalité virtuelle » de la circulation de l’information et des communautés qui se créent et vivent à travers les réseaux sociaux.
Il prend en compte les aspirations des jeunes. Il conjugue responsabilisation de chacun dans son activité et coopération avec les autres, pour avoir un maillage efficace et ressenti comme tel par les clients.
Il mise sur l’engagement et l’intelligence individuels et collectifs.
Il est exigeant et ne peut être piloté que par des dirigeants convaincus, exemplaires, impliqués, courageux et tenaces, qui voient au-delà d’eux et assurent la cohérence dans le temps.
La mise en œuvre d’un tel modèle est une aventure humaine passionnante que j’ai eu la chance d’engager avec les dirigeants, les salariés et les représentants du personnel de GrDF.
Le rôle du dirigeant, du chef d’entreprise pour mener ces transitions
Quel que soit le secteur d’activité, les chefs d’entreprise et les dirigeants ont la responsabilité de s’engager dans ce type de transitions. Ils sont là pour initier du nouveau, l’imaginer, le faire vivre, le créer. Ils nourrissent les maillons de la chaîne qui relie les salariés entre eux, et qui relie les salariés à l’entreprise et font vivre des valeurs, des comportements. Ils incarnent et portent le sens.
Un sens qui, à l’heure du RSE et de l’entreprise citoyenne, dépasse le seul cadre de l’entreprise qui irrigue la société.
La transition citoyenne
Les rapports de force classiques se modifient. Le numérique transforme radicalement les rapports sociaux. Internet permet de nouveau modes d'expression et de contestation. L'enjeu sociétal est aujourd'hui de créer une dynamique constructive plus efficace que la logique du bouc émissaire ou du rejet de l’autre comme étant le responsable de nos maux.
L’enlisement des conflits et l’absence de créativité ne sont pas inéluctables.
Dans une période aussi critique que celle que nous vivons aujourd’hui, nous avons à réfléchir :
- à la façon dont nous créons une réelle coopération entre les acteurs de la société, plutôt que des oppositions et des incompréhensions porteuses de rejet comme on le voit avec les manifestations,
- à la façon dont nous prenons les décisions,
- à la façon de faire évoluer les représentations, d’identifier les dissensus et les consensus pour avancer avec une vision partagée.
Dans ce domaine, il faudrait d'ailleurs s'intéresser de plus près aux pratiques de travail utilisées au CESE (Conseil Economique Social et Environnemental), institution souvent décriée, mais qui pourtant veille à développer une maïeutique qui permet de générer des propositions entre de multiples acteurs de la société, aux priorités et à la culture diamétralement différents.
La transition entre les générations
Enfin la transition, c’est aussi ce passage de relais au sein d’une famille entre les générations.
Une culture, une éducation, des valeurs, des références, un état d’esprit qui nous irriguent et nous relient.
De génération en génération, pour chacun d’entre nous, pour nos enfants et les leurs, il s’agit de s’approprier ces valeurs et ces références, pour construire demain.
Un « demain » qui sera forcément différent.
Gérer la transition, c’est aller vers l’inconnu, c'est prendre des risques, c’est ne pas en avoir peur. C’est nous hisser « sur les épaules nos parents, de nos prédécesseurs, de ceux qui nous transmettent le relais » pour être solides sur nos bases, nos racines et regarder plus loin.
Laurence Hézard
Blog : ledesirdepenser.com
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