Les fossoyeurs de la lutte anti-raciste
Le débat provoqué jusqu’à aujourd’hui encore sur l’islamo-gauchisme au sein de nos universités par la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche Frédérique Vidal le 14 février dernier peut nous paraître bien loin de nos réalités actuelles liées à cette crise sanitaire dramatique mais il revêt en fait un intérêt particulier.
En effet, à la suite des propos de notre ministre nous avons assisté à une soudaine levée de boucliers portant notamment sur la méthode, ce qui peut se comprendre, mais aussi à des tribunes et des prises de positions d’universitaires ou de chercheurs qui soulignaient tout de même un problème comme le fait notamment que certaines personnes étaient refusées dans nos facultés en fonction de leurs idées. Par exemple Alain Finkielkraut n’avait pas pu se présenter face à des étudiants. Mais les universités ne sont-elles pas pourtant les lieux de confrontations des points de vus justement pour se forger une opinion ? Quelques semaines plus tard, le syndicat étudiant UNEF a provoqué une polémique en s’associant à l’affichage des noms de deux enseignants de l’IEP de Grenoble qui les traitait d’islamophobes alors que pour cette même accusation le professeur Samuel Paty avait trouvé la mort le 6 octobre dernier, décapité devant son école. Les deux professeurs sont actuellement sous protection policière renforcée. Le même syndicat a créé à nouveau la polémique récemment en reconnaissant en son sein des réunions réservées aux personnes de couleurs noirs pour mieux se défendre des discriminations. Le débat a continué ce week-end avec les propos d’une candidate aux régionales en Ile-de-France, Audrey Pulvar, au sujet du fait que les blancs devaient se taire au sein des réunions non-mixtes.
Alors, si le concept d’islmao-gauchisme est utilisé à tort et à travers il n’en demeure pas moins issu des travaux de recherches académiques de Pierre-André Taguieff, politologue et directeur de recherches au CNRS qui analyse une certaine alliance entre une partie de la gauche avec des radicaux religieux à des fins politiques et cela depuis la seconde Intifada. Ce qui peut être d’ailleurs illustré par le choix de la France Insoumise de marcher auprès d’intégristes religieux ou encore avec la proximité de ce parti politique avec le Parti indigène de la République (PIR) dont la porte-parole avait eu des propos ambiguës au sujet du terroriste Mohammed Merah.
Quoiqu’il en soit, ce débat a eu le mérite d’éclairer une certaine réalité qui dépasse peut-être cette notion mais qui est l’importation de théories "décoloniales" ou dites « woke » venant des États-Unis. Nous assistons en effet à des actions militantes comme le déboulonnage de statuts ou bien la censure de traduction d’ouvrages en fonction de la couleur de la peau. Aussi, aux États-Unis, certaines universités organisent des remises de diplômes spécialement pour les personnes dites "racisées".
Ainsi, est-ce que nous souhaitons ce modèle de lutte contre les discriminations et le racisme ? Il me semble que nous devons combattre le racisme qui existe encore mais pas de cette manière, pas en gommant notre histoire avec le déboulonnage des statuts ou en censurant des traducteurs en fonction de leurs couleurs de peaux ou encore en séparant les personnes en fonction de leurs couleurs ou de leurs origines. La promesse républicaine est qu’elle est une, indivisible et universelle. Ne délaissons pas nos idéaux au risque de tomber dans l’assignation identitaire, de se morceler et à accélérer les clivages au sein de notre société.
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