Israël est-il une démocratie ?
Un ministre israélien a été limogé par Netanyahou pour avoir envisagé comme une option, le largage d’une bombe atomique sur Gaza regrettant que les représailles israéliennes dans le territoire ne soient pas plus dures. Certes, ce ministre n’est plus au gouvernement, mais nous en sommes désormais à plus de 15 000 Palestiniens morts, dont plus d’un tiers d’enfants soit plus de 10 Palestiniens morts pour 1 Israélien le 7 octobre. Du reste, pourquoi une bombe atomique lorsque la 5e armée du monde détruit méthodiquement toute la bande de Gaza et s’attaque à une population qui n’a pas d’armée et qui est à la merci d’un groupe salafiste, le Hamas, qui lui impose la loi islamique et ne les défend pas ?
S’il n’y avait pas eu les otages, ce ministre aurait-il sauté ? Pas sûr. Mais les familles ont été outrées par ses autres paroles : « Dans une guerre, il y a un prix à payer. Pourquoi les vies des otages (...) sont-elles plus importantes que celles de nos soldats ? » Netanyahou pouvait-il accepter que ces paroles soient professées ? Évidemment non, car des étrangers se trouvent parmi les otages. Mais renvoyer un ministre, est-ce protéger les otages quand on voit les frappes indiscriminées israéliennes ? L’armée israélienne ne sait pas où sont cachés les otages. Cela veut dire que les bombes peuvent avoir déjà tué nombre d’entre eux. À la fin du mois d’octobre, une estimation indiquait la destruction de 45 % des habitations de la bande de Gaza. Il y a tout lieu de se poser la question sur la réelle volonté de Netanyahou à protéger la vie des otages. Il y a même lieu à se demander si, lui-même, n’a pas déjà accepté que les otages soient comptés comme victimes collatérales. Notamment lorsqu’on voit qu’une cinquantaine de journalistes ont déjà été tués ainsi que des membres de l’ONU.
Rétablissons rapidement deux ou trois vérités sur cette guerre soi-disant commencée le 7 octobre. D’une la guerre n’a pas commencé le 7 octobre, mais dès la création d’Israël le 14 avril 1948. De deux, les colons sont les Israéliens qui grignotent petit à petit le territoire palestinien depuis 1948. Ce territoire dévolu à la Palestine a donc déjà été réduit de plus de la moitié du seul fait des Israéliens. De trois, tout est prétexte pour Israël de coloniser. Ainsi les actes de terrorisme du Hamas. L’objectif est cette fois de vider la bande de Gaza en expulsant les Gazaouis en Égypte pour la coloniser et s’approprier la nouvelle réserve pétrolière découverte au large de Gaza. Sans parler que la colonisation redouble actuellement en Cisjordanie, ce qui n’a rien à voir avec un quelconque droit de défense. De quatre, les membres actuels du gouvernement sionistes messianiques (ceux qu’on appelle les suprémacistes) et ultraorthodoxes ne se sont jamais cachés que leur objectif était d’éliminer toute présence d’Arabe sur le territoire que leur a promis Dieu. C’est-à-dire la totalité du territoire situé à l’ouest du Jourdain (une fois atteint cet objectif, ne doutons pas un seul instant que leur revendication se portera sur toute la Jordanie). De cinq, Netanyahou a présenté en septembre aux Nations Unies la carte du Nouveau Moyen-Orient sur laquelle Israël recouvre entièrement la Palestine alors qu’il était en train de conclure des accords avec l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis qui s’apprêtaient à laisser tomber les Palestiniens.
Ce détour sur les raisons de cette guerre du 7 octobre ne veut montrer que si l’attaque du Hamas est sans excuse, elle n’est pas sans cause et que nous sommes malheureusement dans une suite logique de deux partis qui s’affrontent, Israël étant l’occupant colonisateur et les Palestiniens les victimes d’un non-respect permanent du droit international par Israël. Depuis 75 ans, Israël empêche la création de l’État palestinien qui avait été prévu par la résolution 181 de l’ONU. La dernière stratégie de Netanyahou ayant été de favoriser le Hamas pour rendre impossible la création de cet État palestinien. On voit ce que cela a produit...
Faut-il rappeler que le gouvernement de Netanyahou est formé d’un nombre important de ministres sionistes messianiques, ultra-orthodoxes qui cultivent un ressentiment depuis 2005, l’année où Ariel Sharon a retiré tous les colons de la bande de Gaza ? Pour ces gens-là, la terre d’Israël a été donnée par Dieu au peuple juif, et ce serait anathème d’en céder ne serait-ce qu’une partie à des non-juifs. Amichay Eliyahu, le ministre limogé, parlant des Gazaouis, mais aussi de tous les Palestiniens, a dit : « Nous devons commencer à [les] déloger de la bande de Gaza pour les faire émigrer vers d’autres pays ». S’il ne parlait que de Gaza... Faut-il rappeler que la Cisjordanie fait partie d’Eretz Israël (le Grand Israël, la Terre promise) et que les Arabes n’ont rien à y faire selon les sionistes messianiques et les ultraorthodoxes ? Faut-il aussi rappeler que depuis le 7 octobre, le gouvernement a distribué des armes aux colons de Cisjordanie pour se défendre ? Depuis, le monde assiste dans un silence médiatique, aux attaques en Cisjordanie contre les Palestiniens, victimes de violences, voire de déplacements forcés. “Les colons de Cisjordanie utilisent la guerre déclenchée par le Hamas pour expulser des milliers de Palestiniens de leurs maisons et de leurs terres”, résume le quotidien israélien Ha’Aretz. Le projet en Cisjordanie n’est nullement la défense des colons ni la défense d’Israël en rapport aux attaques du 7 octobre étant donné que le Hamas de Gaza est en rivalité avec l’autorité palestinienne qui réprime, actuellement, les manifestations de solidarité avec Gaza.
Le gouvernement, tous les gouvernements occidentaux pro-israéliens nous rabâchent qu’Israël est une démocratie et qu’à ce titre, elle a le droit de se défendre. La sempiternelle rengaine des démocrates institutionnels qui ont peur de la démocratisation, celle qui laisse la place au peuple et qui tient compte de son avis. Qu’est-ce que cette démocratie israélienne dont on ne parle pas ou qu’on camoufle en modèle de démocratie alors que le gouvernement actuel n’a jamais été aussi à l’extrême droite avec des et dessuprémacistes ultraorthodoxes aux postes clés ?
On sait que sous son précédent gouvernement, Netanyahou a fait passer une loi d’apartheid à l’égard des Arabes. Mais pour en rester au gouvernement actuel, l’une des premières lois votées par le Parlement après l’élection de partis d’extrême droite a été d’autoriser une personne reconnue coupable d'un crime, mais pas condamnée à la prison ferme à obtenir un portefeuille ministériel. À partir de cela, Netanyahou, premier concerné par la justice a pu former son gouvernement avec Itamar Ben Gvir, ministre de la Sécurité publique, condamné pour incitation à la haine et soutien à une organisation terroriste. Aryeh Deri Vice-Premier ministre, ministre de la Santé et de l'Intérieur, reconnu début 2022 avoir fraudé l’administration fiscale et qui devait passer devant la commission centrale électorale pour déterminer s’il s’était rendu coupable de « turpitude morale », ce qui l’aurait empêché d’avoir une carrière politique pendant une durée de sept ans. Benyamin Netanyahou qui est poursuivi pour corruption et dont le procès n’a toujours pas eu lieu.
Quant aux partis entrés dans les arcanes du pouvoir, gouvernement ou Knesset, sont :
► Le Shass, parti ultra-religieux séfarade. Le rabbin Ovadia Yosef, ancien dirigeant spirituel du parti, a notamment déclaré que « le Seigneur retournera les actions des Arabes contre eux-mêmes, épuisera leur semence et les exterminera ».
► Judaïsme unifié de la Torah, parti ultraorthodoxe. Le parti s’oppose à la séparation entre la religion et l’État. Il réclame même une inclusion plus importante de l’esprit de la loi juive dans la législation d’Israël.
►Le Parti sioniste religieux, « suprémaciste juif ». Il défend notamment l’annexion de certaines parties de la Cisjordanie, l’expulsion des demandeurs d’asile et la mise sous tutelle du pouvoir judiciaire par le pouvoir exécutif.
► Force juive, pour la « légitime » violence. L’accord entre Force juive et le Likoud prévoit notamment un assouplissement des règles encadrant le recours à la force. Celui-ci est censé favoriser les tirs à balles réelles lors des heurts avec les manifestants arabes israéliens.
► Noam, l’homophobie avant tout. Le nom du parti n’a nul besoin d’être explicité.
Il n’est pas inutile de présenter succinctement Benyamin Netanyahou. Élevé par son père selon l’idéologie du sionisme révisionniste de Jabotinsky (revendiquant l’établissement d'un État hébreu sur les deux rives du Jourdain intégrant donc toute la Jordanie), il devient le président du Likoud qui a revu les prétentions à la baisse, c’est-à-dire revenir aux frontières définies en 1967 équivalant à celles de 49, mais réduisant fortement le territoire palestinien prévu en 1947. Rappelons que le Likoud s'inspire très largement de l'idéologie du Parti révisionniste de Jabotinsky, et qui, petit à petit, va intégrer des sionistes messianiques et des ultraorthodoxes. C’est-à-dire des gens qui ne laissent aucune place aux Arabes et qui revendiquent la totalité de la Palestine à l’ouest du Jourdain. Cet extrémisme, Netanyahou va le pousser à des confins hallucinants en soutenant publiquement la thèse selon laquelle le Grand Mufti de Jérusalem aurait inspiré la solution finale à Hitler, cela, bien entendu, pour accréditer la responsabilité palestinienne dans la shoa.
Une démocratie qui vote des lois d’apartheid, qui ne respecte pas le droit international systématiquement, qui colonise un territoire qui ne lui appartient pas, qui s’appuie sur des croyances religieuses, fondamentalistes, est-ce bien une démocratie ? Peut-on prendre comme modèle une telle démocratie ? La démocratie est-ce seulement des élections et quelques institutions ? Une démocratie ne doit-elle pas porter des valeurs et des principes d’égalité, de solidarité et de laïcité qui irradient toute organisation, toute décision politique ?
Comment cela est-ce possible que des régimes qui se prétendent des démocraties soutiennent un tel pays qui est en train de perpétrer un génocide dans la bande de Gaza dont l’annexion est l’objectif caché ? Une chose est certaine : Benyamin Netanyahou est l’homme de la guerre et de l’impossible paix.
Bibliographie
La bombe nucléaire à Gaza, « une option » : un ministre ultranationaliste israélien sanctionné
Définition du génocide par les Nations Unies
18 septembre 1982 : le monde découvre le massacre de Sabra et Chatila
Affrontements de mai 2023 entre Gaza et Israël
Netanyahu prédit un nouveau Moyen-Orient
En Israël, l’essor de l’ultranationalisme religieux
En Israël, le nouveau gouvernement de Benyamin Nétanyahou obtient la confiance du Parlement
La Knesset vote des législations ouvrant la porte au nouveau gouvernement
Israël : qui sont les partis d’extrême droite et ultraorthodoxes partenaires de Netanyahou
Qui est Benyamin Nétanyahou ? Comprendre en trois minutes
Netanyahou : la fin du rêve sioniste (vidéo)
De la haine et de l'outrance : la stratégie de l'extrême droite israélienne pour peser
Réflexions sur la Notion de "Frontières de 1967"
Gaza : cinq États saisissent la CPI contre Israël
Israël : pourquoi un État suprémaciste juif ne pourra jamais triompher
Israël, une démocratie devenue illusoire
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