Itinéraire d’un libertaire en terre d’islam
Itinéraire d’un libertaire en terre d’islam
Allal est né en 1970, à Casablanca, au Maroc. Élève brillant, il obtint son baccalauréat scientifique avec mention. Après l’école des ingénieurs de Mohammedia dont il sortit major de sa promotion, il intégra l’Office national de l’électricité. Véhicule et maison de fonction, Allal avait réussi socialement. Du moins, presque. Pour que cela fût parfait, il eût fallu qu’il se mariât. Sa mère le poussait ; son père, ses frères, ses sœurs, ses tantes et ses oncles lui répétaient sans cesse :
« _ Alors quand vas-tu te décider à te marier avec une fille de bonne famille. N’as-tu pas marre de cette vie de zoufri, de célibataire endurci. »
Même l’hajja, sa grand-mère maternelle qu’il chérissait tant, lui disait souvent :
« _ Mon fils, tu as tout ce qu’il faut ! Une bonne situation, la santé, l’intelligence et la beauté. Il faut que tu te maries pour te préserver du mauvais œil. »
Pour fuir ces conseils rapidement devenus des reproches, Allal cessa de rendre visiter aux membres de sa famille. Bientôt, une folle rumeur se propagea. Allal aimait les hommes ; Allal était un zamel, un pédé. Allal ne jeûnait pas pendant le mois du Ramadan ; Allal était un mécréant. Il ne fut plus considéré comme un membre de la famille ; il devint la honte des siens.
« _ Na’hlatou Allah ‘Aley ! Que Dieu le maudisse ! », répétait souvent son père.
Allal appréciait faire la fête. Il participait à des soirées organisées par ses amis, des expatriés et des Marocains aisés. Il y avait des femmes, des hommes ; le champagne coulait à flot.
Allal est mort la semaine dernière, victime d’un accident de la route. Sa famille accueillit la nouvelle avec soulagement. Sa mère aurait même dit en public :
« _ Vous voyez, Allah ne veut pas que les musulmans s’égarent. Sa malédiction finit toujours par s’abattre sur tous ceux qui s’écartent du droit chemin. »
Allal ne voulait pas vieillir. Son souhait a été exaucé. Il est mort à 46 ans.
Cette histoire est une fiction. Toutefois, toute ressemblance avec des personnages vivants ou ayant existé ne serait pas que pure coïncidence. Ce texte est un soutien, un appel à la dépénalisation de l’homosexualité dans tous les pays où l’islam est religion d’État. Il est aussi un appel à l’ouverture des esprits et à l’acceptation de l’Autre et le respect de ses droits inaliénables.
© Youssef Jebri
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