J’ai testé pour vous une journée de formations aux « valeurs de la république »
Comment finir une semaine en beauté, en privant six cents collégiens d'une journée de cours ? En imposant aux enseignants, assistants d'éducation et personnels administratifs d'un établissement scolaire une journée de formation aux "valeurs de la république", c'est-à-dire à la laicité principalement.
Votre narrateur n'en est pas à sa première communion en la matière. Journée de formation en primaire il y a vingt ans, journéee contre la radicalisation islamiste il y a huit ans, demi-journée de prises de parole et d'échanges suite au massacre de Samuel Paty (dont l'affaire a engendré cette énième formation à nos valeurs communes). Si on ajoute à tous ces séminaires le catéchisme républicain inculqué dans les bahuts fréquentés quand j'étais jeune, plus celui du service militaire et enfin l'IUFM, je pense être en mesure de prêcher une homélie convenable en matière de valeurs laïques, de séparation des cultes et de l'état.
Je me suis donc retrouvé dans une vaste salle polyvalente pour assister à un rappel des évangiles républicains. Nos trois formateurs étaient un prof d'histoire-géo habillé en complet d'agent immobilier, une conseillère d'éducation et une psychologue scolaire. Ils se sont présentés, et la messe a pu débuter.
- Présentation de la charte de la laicté (ci-dessus), au demeurant consensuelle et pleine de bon sens pour permettre le vivre-ensemble. D'ailleurs, je l'ai fait illustrer par un groupe d'élèves dans mon local il y a deux ans ; un rappel des dix commandements n'est jamais inutile. La loi de 1905 est aussi abordée, elle renvoie à une époque où l'église était ultra-conservatrice et freinait les réformes sociales ; une séparation justifiée dans le contexte de l'époque.
- Puis nous entrons dans le vif du sujet, les entraves à la laicité. Jusqu'à présent, c'était l'intégrisme islamique qui était pointé du doigt : le foulard, voile, burqa, burkini et autres douceurs, le refus et le rejet de la culture européenne, les fichés S (y compris parmi les profs !). La nouveauté, c'est la globalisation du phénomène : juifs, chrétiens et bouddhistes sont aussi indexés. De façon malsaine, nos formateurs font passer leurs opinions politiques avant le devoir de neutralité, ils pensent bien faire au milieu d'un public conquis (les deux tiers de mes collègues votent Mélenchon ou EELV).
- Place aux échanges ! Et là, impossible de s'endormir comme lors d'une messe morose ou d'un mauvais sermon dans une mosquée. Car, hélas, les profs sont à l'image de la société, une société où les uns sont courageux, les autres couards, la plupart attentistes.
Une enseignante d'histoire-géo veut supprimer les jours fériés chrétiens, un prof de maths parle de "l'homosexualité du Christ" (!), un autre regrette qu'une collègue ait souhaité bonne fête à "Gertrude", et qu'elle l'ai rembarré quand il lui a rappelé le devoir de laicité (on la comprend, vu la rigidité du type). Pas un mot, bien entendu, sur les dérives des élèves marqués par l'islam politique, car nos honorables fonctionnaires carriéristes ne veulent pas finir en martyr comme Samuel Paty. Surtout, parler dans la bonne direction en présence de l'équipe de direction, c'est excellent pour leur promotion dans la "hors-classe" et leur emploi du temps sur trois jours.
Je tente, seul, d'apporter la contradiction. Pourquoi ne pas férier aussi les jours de l'Aid et du Kippour, plutôt que de déchristianiser tant qu'on y est ? Et surtout, parce que personne ne veut rappeler que les jours fériés sont un héritage culturel, un droit pour les salariés et que musulmans et juifs peuvent aussi s'absenter pour fêter leurs croyances. D'ailleurs le bon sens n'est-il pas de s'intégrer aux coûtumes locales quand on s'installe dans un pays ? Impossible de dialoguer et d'échanger, ça risque de déraper. Surtout, et c'est assez nouveau, certains recherchent le conflit, l'esclandre, les incidents. Ceux qui pensent comme moi préfèrent se taire, parcourir leur téléphone, lire un bouquin en douce. Se dire chrétien, juif ou musulman, est désormais proscrit et passible du bûcher : voilà où en est l'école publique aujourd'hui.
L'après-midi est consacrée à une étude de cas. J'apprends que des élèves refusent d'entrer dans la cathédrale du coin, que les repas sans porc séparés ont toujours été interdits dans les cantines scolaires (! ?). Je rétorque qu'à Paris, c'est le cas depuis toujours (repas de substitution). Il existe une liste nominative de fêtes religieuses ouvrant droit à une autorisation d'absence. Un prof nous apprend qu'il a été accusé de pornographie par des parents d'élèves après une leçon sur les statues grecques de l'antiquité et la représentation divine du corps humain ; il a dû se justifier. Cerise sur le gâteau, nous devons rapporter désormais à nos vaillantes directions tous les faits d'entrave à la sainte-laicité, religion de substitution de notre république.
Bien entendu, il aurait été déplacé de ne pas abordé le "racisme" en dessert. Ici, dans le cadre de l'éducation aux médias et à l'information, on nous donne l'exemple de dessins racistes (dualité blancs contre noirs) publiés sur des sites... belges(!) ; un "racisme" qui date d'il y a quarante ans ; rien sur l'antisémitisme, les problèmes inter-communautaires, les timides condamnations pour "racisme anti-blanc". C'est convenu, à sens unique, sans mise en perspective. Une démarche de mauvais commissaires politiques, sectaires et bornés, sans discussion possible.
Pauvre Samuel Paty, dont le massacre n'aura servi à rien. Pas un mot sur le refus d'intégration d'individus portés par l'islam politique dans sa version web 2.0, pas un mot sur les quelques profs courageux menacés au quotidien, les élèves qui refusent de suivre le ramadan, insultés et tabassés, sur la fuite vers l'enseignement privé des familles qui en ont marre de la violence scolaire, des incivilités et des profs à côté de la plaque. Un discours de militants gauche bobo, de gens qui vivent dans des quartiers pavillonnaires à l'abri des questions de "vivre-ensemble", de profs détachés pour faire autre chose que de l'enseignement, qui se fichent de la communautarisation du pays, de l'anarchie des quartiers populaires, de la fin de l'ascenseur social. Des gens qui se donnent bonne conscience en se proclamant progressistes, qui parfois sont les premiers à mettre leurs enfants dans le privé tout en prêchant la laicité dans l'enseignement public dont ils dépendent financièrement.
Car les profs n'ont hélas pas la chance des familles, qui peuvent choisir entre public et privé. Depuis une réforme de Jack Lang, il n'existe plus de passerelles pour les carrières ; les uns sont condamnés à subir le baratin pseudo-laicard tout en gérant comme ils le peuvent des élèves culturellement défavorisés et parfois virulents, les autres ont la liberté (certes relative) du privé. Tel est l'état de l'enseignement français en 2023.
En attendant une probable guerre civile inter-communautaire vers 2050, il faudra continuer à encaisser des leçons philosophiques, des dénis de réalité, à formater des islamistes et des antifas convaincus que l'ennemi est le petit blanc chrétien et rien d'autre, sous le regard bienveillants d'Ayatollahs sectaires formateurs aux "valeurs de la république". Les mêmes qui seront les premiers à fuir en cas de conflit armé, car la résistance et l'action ne sont pas dans leurs gènes.
Pour conclure sur une note positive, j'étais hier-matin à la messe des rameaux. Une foule dense, beaucoup de jeunes, des gens de toutes origines, sous la surveillance de la police à l'extérieur pour rappeler que les terroristes sont rarement chrétiens de nos jours. Je toise un bobo qui raille les chants entendus depuis la rue adjacente en arrivant ; inutile de dialoguer avec ce gugusse, sans doute bon produit d'un cursus scolaire où il a retenu sa leçon d'éducation civique : cracher sur les croyances et les identités, consommer sans réfléchir, rejeter frontières et patriotisme. Allez, ne nous privons pas de spuhaiter bonnes fêtes de Pâques et bon ramadan à toutes et à tous !
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