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Jackpot au casino mondial du libéralisme ?

La crise financière n’est pas une banale crise économique, mais elle s’est inscrite au contraire ces derniers mois dans une stratégie planifiée par les banquiers et dirigeants financiers pour impliquer les états et resolder leur insolvabilité ou dettes dues aux excès de la spéculation bancaire virtuelle, suite aux dernières initiatives politiques de « remoralisation » de la finance internationale énoncées par quelques dirigeants d’états européens, puis mondiaux lors de la récente réunion du G20, qui a permis notamment aux organismes financiers internationaux de renflouer leur caisse avec la légitimité politique des gouvernements des pays les plus industrialisés.

Les cinq milliards d’euros partis en fumée de la Société Générale par un trader appelé Jérome Kerviel ne sont pas un banal fait divers isolé. La plupart des grandes banques mondiales jouent avec les limites acceptables de la virtualité de la finance bancaire pour asseoir leur profit et maximiser la spéculation. Les déclarations de Nicolas Sarkozy sur la moralisation de la finance internationale ou encore concernant "l’ère révolue du secret bancaire", ressemblent pourtant à de bien pieux vœux devant l’énormité de la dispersion et de l’accumulation fiscale par une maigre fraction de la population mondiale qui se déroule chaque jour "au nez et à la barbe" des simples citoyens, qu’ils soient travailleurs, chômeurs, ou dans une situation de précarité. Aussi, les déclarations énoncées lors du G20 articulées autour de mesurettes bureaucratiques ne peuvent tromper les professionnels du secteur ainsi que les citoyens avertis :
 
  • La création d’une liste blanche, grise et noire des zones financières dérégulées ("paradis fiscaux"), basée sur le modèle de la punition et de la récompense, s’avère être totalement anachronique, les listes et documentations concernant ces zones existant déjà depuis de nombreuses années et faisant l’objet des travaux d’investigation et d’information de nombreuses associations de réflexion autour du développement de la finance internationale.
  • La révision des modes de rénumération et de surveillance des traders apparaît également comme un faux-problème : la crise n’est pas due aux traders qui ne font que se conformer à un système de compétition déséquilibré, mais bien au comportement des sociétés financières elles-mêmes dont l’unique objectif est l’accumulation de bénéfices, que celles-ci soient des industries des secteurs primaires, secondaire ou tertiaires.
  • Enfin, la création d’un organisme de supervision bancaire international et de nouvelles normes comptables apparaissent également comme fort superficielles, tant les directions politiques actuelles dans le cadre des transferts financiers internationaux s’inscrivent au contraire dans l’optique d’une liquidité et d’une efficience maximale des marchés, impliquant une traçabilité toujours plus difficile des transferts d’argent, principalement relayé par les chambres de compensation internationales et autres réseaux interbancaires.
 
En octobre 2000, la filiale de Francfort de la chambre de compensation Clearstream a été victime d’une importante erreur comptable de près de 1 000 milliards d’euros intervenue dans les dépôts. Une seconde erreur dans la comptabilité (près de 650 milliards d’euros) est intervenue en janvier 2001, soit un total 1650 milliards d’euros... A la suite de la crise des subprimes, la vente de "seulement" 6 milliards de dollars d’actifs par la banque Lehman Brothers entraîna sa faillite, à l’origine de la panique économique généralisée de l’automne dernier. Comment se fait-il alors qu’en 2000 et 2001 n’eut lieu aucun écho dans la presse, aucune répercussion dans le monde de la finance, aucun avis d’alerte, aucun soubresaut de la bourse, ni des politiciens concernant les erreurs comptables proprement faramineuses de la chambre de compensation internationale... ? Ces dernières entités semble effectivement ne jamais connaître la crise, de par leur fonctionnement même, car le marché des transferts financiers est inusable : tant qu’il y a des bourses, des traders, des mouvements bancaires, les transferts financiers sont là, et donc les revenus et les profits, pour les entreprises comme Clearstream, Euroclear ou la Depository Trust and Clearing Corporation (DTC) de New-York.

Mais étonnamment, malgré leur importance essentielle, ces multinationales du routage financier ne sont pas du tout interrogées en temps de crise économique, comme si ce n’était pas leurs problèmes. Et pourtant, ces organismes ne semblent pas des plus transparents, comme le témoignent les chefs d’accusation retenus contre la multinationale luxembourgeoise et reprochés à l’ancien dirigeant de Clearstream et ses associés : « escroquerie fiscale », « faux et usage de faux », « fabrication de faux-bilans », « non-dénonciation de délit financier » et « blanchiment d’argent ». Pourtant, les suites de cette affaire judiciaire ont été stoppées par l’état luxembourgeois lui-même, par ordonnance du 30 novembre 2004 de la Chambre du Conseil du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, et sur réquisitoire du Parquet et rapport du Juge d’instruction conformes, déclarant qu’il n’y a pas lieu à suivre.
 
D’autre part, bien que connu, le fonctionnement des chambres de compensation internationales n’en reste pour le moins jamais interrogé ni remis en question en profondeur par les spécialistes de l’économie, qu’ils soient journalistes financiers ou autres. Le problème de liquidités des banques actuelles n’est pourtant que la partie émergée de l’affaire dite "Clearstream" et de la spéculation bancaire via les réseaux des chambre de compensation internationales au travers des zones fiscalement dérégulées de la planète. Aussi, ces entreprises sont directement concernées et responsables de la crise, même si bien évidemment elles se dédouanent de toute proximité avec les difficultés économiques que peuvent rencontrer les banques et les bourses de la planète, en adoptant des positions communicatives toujours plus évasives les unes que les autres depuis quelques années.

Et effectivement, les banquiers siégeant au Conseil d’Administration de ces chambres de compensation internationales sont loin d’être des moralisateurs de la finance internationale. Bien au contraire, ils œuvrent depuis plusieurs décennies pour le contrôle total du système financier mondial par le sommet, notamment en cherchant à se dédouaner de toute restriction ou régulation politique liées à leurs activités. C’est ainsi qu’en créant les perturbations récentes ayant plongé le monde des médias et de la finance dans la panique, les opérateurs de la finance ont poussé les dirigeants politiques des états, les uns après les autres, à intervenir en faveur des banques par des plans de sauvetage financier, comme le plan Paulson aux Etats-Unis, ou en demandant directement aux gouvernements de subvenir à leur besoin comme en Grande-Bretagne où le Trésor Public débloquait en automne dernier 200 milliards de livres sterling pour les huit grandes banques du pays, tandis qu’en France un plan de 360 milliards d’euros en faveur des banques était présenté par le gouvernement.
 
En l’espace de quelques semaines, le secteur bancaire a d’une pierre trois coups réussi à affaiblir encore plus la position des états en renforçant la dette des gouvernements, à se positionner en victimes dans l’opinion publique d’un système devenu tout d’un coup déréglé, et jusqu’à réussir à obtenir des principales banques centrales une baisse historique du taux directeur de ces dernières permettant à leurs entreprises clientes du CAC40 d’éviter de trop souffrir à court terme des dégâts collatéraux immédiats de la crise. La réaction politique ne s’est pas fait attendre avec la création du G20, et 1000 milliards d’euros furent attribués au FMI et à la Banque Mondiale, relançant le partenariat entre politiques gouvernementales libérales et un secteur bancaire fraîchement relancé. Plutôt qu’une "refondation du capitalisme" tant plébiscitée par les médias, le G20 a finalement défini les moyens d’une consolidation encore plus forte du même vieux système économique qui a déjà montré ses limites et son incapacité à régler les problèmes matériels et économiques urgents d’un monde en proie à la division parcellaire des nations et regroupées en zones d’intéressement et de coopération économique limitée, dans un système compétitif destructeur et conflictuel à l’échelle globale.
 

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8 réactions à cet article    


  • paul muadhib 20 avril 2009 10:57

    Et oui ,salut a l auteur.. bien resume l arnaque..cela dit qu attendre d autre de la notion de profit comme valeur unique et ultime..finalement ,si ce n etait si tragique pour des milliards d humains, on pourrait presque applaudir des 4 mains, c est une reussite !
    Depuis environ 250 ans ,voir plus , les progres dans le domaine technique ont ete l arbre cachant la foret de ce que j appelle « l horreur de l aventure humaine »...l humain n a pas change,
    Uniquement preoccupe par l objet, la matiere, le palpable,et la peur de sa mort a venir qu il fuit comme il le peut , l homme a globalement cru, sauf exceptions, que ca y etait , l humanite s engageait sur la voie d un progres humaniste...euh la , faut pas deconner , a condition de ne pas voir les guerres,famines,tortures,destruction volontaire de la civilisation africaine et autres pour avoir acces a leur richesses, et plein d autres joyeusetes encore.
    Il etait necessaire de devenir aveugle et insensible aux autres pour s engager dans cette voie...mais voila le monde des puissants pouvait dire : regardez les resultats !..
    honnetement qui n a pas cru a ce discours pseudo liberal, ? peu de personnes ? dans les annees 1970 on nous parlait de la « societe des loisirs » qui se profilait.
    C est sur que bientot nous allons peut etre tous etre dans un joli camp, ..................
    Mais tout ceci est encore une reflexion a la superficie des choses..13.7 milliards d annees apres un big bang, nous en sommes rendus ou ?
    a la souffrance d un mecontentement permanent que nous fuyons comme nous pouvons, ceux qui souffrent le plus etant ceux qui font souffrir le plus...vous savez quand interieurement on a une vision sereine de sa vie , on ne s en prends pas aux autres comme pour diminuer sa propre souffrance...
    et meme si demain TOUS les problemes materiels des humains de la planete entiere etaient resolus, le malheur serait toujours la, car alors resterait LE probleme ultime et apparemment insurmontable de LA MORT, et alors nous reviendrions encore et toujours a ce monde que nous connaissons aujourd hui , car ce monde est la consequence de la fuite permanente de nous meme, ainsi nous sommes deconnectes en permanence de notre nature, nous ne voyons plus que nourriture ,logement ,objets etc sont des moyens, nous vivons dans les moyens qui deviennent la finalite, c est un non sens qui explique pourquoi on ne comprends rien...et avec une vie aussi passionnante et renouvellee qu un roulement a bille de camion, qui aurait conscience de son usure a venir...
    Mais voila , uniquement a la superficie des choses , nous ne savons RIEN sur nous,
    et , sauf rares exceptions, egares dans nos peurs insurmonables, cela n interesse personne,
    Alors je ne connais pas le futur , celui des 6 milliards d humains est tout trace,sans revolution profonde dans le « cerveau »,
    Et pourtant , par experience , je sais que vivre, c est beaucoup plus que la peur et la frustration permanente que nous avons admis comme etant inevitable....
    Encore faut il etre curieux et avoir atteint le stade ou la fuite en avant devient l horreur absolue, comme une enorme depression ,une envie de suicide qui ne serait alors que la fuite ultime, mais aussi le debut de l intelligence, dans le sens de comprendre..
    La souffrance psychologique comme un symptome d etre sur la mauvaise route ??


    • Lisa SION 2 Lisa SION 2 20 avril 2009 11:01

      " Comment se fait-il alors qu’en 2000 et 2001 n’eut lieu aucun écho dans la presse, aucune répercussion dans le monde de la finance, aucun avis d’alerte, aucun soubresaut de la bourse, ni des politiciens concernant les erreurs comptables proprement faramineuses de la chambre de compensation internationale... ? « Aucun soubresaut de la bourse ... ?, en 2OO1 ?

       » les banquiers siégeant au Conseil d’Administration de ces chambres de compensation internationales sont loin d’être des moralisateurs de la finance internationale. Bien au contraire, ils oeuvrent depuis plusieurs décennies pour le contrôle total du système financier mondial par le sommet, « En effet, ce contrôle total s’effectue en premier sur le système de contrôle interne qui occulte complètement les chiffres et masquent ainsi toutes les dérives.

      C’est le même système que Monsanto met en place en publiant ses propres études sur ses produits.

       » en France un plan de 360 milliards d’euros en faveur des banques était présenté par le gouvernement. " En France, on taxe la prostitution sans lutter contre les prostitueurs , et on arrose les mafias qui ont pris le contrôle des banques avec de l’argent public prété pour ensuite, taxer cet argent et en faire des impôts proxénètes...

      De toutes façons, les mafias s’introduisent là où il y a la monnaie et se servent des femmes pour soudoyer les autorités. C’est comme ça que des putes peuvent finir députées...


      • King Bounty 20 avril 2009 19:41

        certaines finissent meme président !!


        • Proudhon Proudhon 20 avril 2009 20:31

          Très bonne analyse de l’escroquerie mondiale en cours.


          • ffi ffi 20 avril 2009 21:50

            Le 21 mars, sur Agora vox, j’écrivai :
            http://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/paradis-fiscaux-et-secret-bancaire-53255#forum2047217
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            Sachant que 80% des paradis fiscaux ont pour chef d’état la reine d’Angleterre, le plus probable c’est que le G20 sera bien pâlichon sur ce sujet.
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            On est jamais si bien servi que par soi-même.


            • Thierry LEITZ 20 avril 2009 23:25

              Bon article synthétique. La prochaine crise majeure sera celle des finances publiques. Et là, ce sera plus difficile de se défausser comme font les banques dans la crise actuelle.

              Nos impôts vont servir à payer les intérêts d’une dette-boulet que 3 générations vertueuses aurait peine à résorber. Sans parler des dépenses militaires aussi lourdes qu’inutiles qui concourrent à perpétuer cette horreur économique...

              Et on parle encore de « responsables » politiques.

              C’est à vomir.


              • patroc 21 avril 2009 10:13

                 Bon article !.. Mais oui, va falloir qu’on rembourse !.. L’arnaque totale d’un totalitarisme économique... Ils nous préviennent qu’on va se faire enfiler, mais attention, le plus douloureux est à venir !...


                • Constantin Constantin 23 avril 2009 11:15

                  Vous avez tout dit dans votre article. Pour résumer je dirai que la ploutocratie a acheté l’oligarchie politique !

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