Je suis un affreux hippophage. Huummm !
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À midi, je vais manger du filet de cheval façon tournedos, acheté chez Maurice, le boucher chevalin qui vient chaque semaine au marché. Il ne vend que des Comtois, ces puissants chevaux de traits couleur châtain clair agrémentés d’une superbe parure – crinière et queue – blonde. Ces bestiaux courent sans contrainte dans les prairies des Hautes terres. Je me régale de les voir s’ébattre l’été, et je me délecte de les déguster ! Ben ouais… C’est comme ça la nature humaine.
Parce c’est bon le cheval ! Une belle viande d’un rouge sombre, très goûtu, bien poivrée et juteuse à souhait. Je vais le déguster, mon filet, avec des frites coupées gros, à la main, et salées à souhait. Le pied !
Pour dire qu’« ils » me gonflent les aliboffis tous les peine-à-jouir qui, profitant des magouilles des gougnafiers de l’industrie agroalimentaire jettent l’opprobre sur cette viande excellente, meilleure que celle des vaches (le bœuf est une appellation aussi erronée que trompeuse : il n’y a plus de bœufs, c’est-à-dire des taureaux castrés, seulement des vaches).
Vous aimez les voir s’ébattre fièrement dans les champs, crinière au vent et queue en panache. Vous avez raison, ils sont superbes. Comment peut-on tuer et manger de telles merveilles ? Ben, n’oublions pas que si la race équine existe encore depuis le tracteur, c’est grâce à nous, les ippophages, les bouffeurs de chevaux ! Et aux margoulins des courses de canassons. Environ 30 % des chevaux abattus sont des poulains de trait élevés pour la boucherie (comme mes beaux et bons Comtois de Margeride), 20 % des chevaux de trait adultes réformés (débardage, ramassage d’algues, labours de vignes escarpées, etc.), et le reste, soit la moitié, des chevaux « de course » réformés. 80 % de ces derniers sont des trotteurs âgés de moins de dix ans dont 20 % des poulains de moins de deux ans, soit des animaux encore jeunes.
Les premiers, c’est tout du bon, les deuxièmes c’est correct, les derniers (les plus nombreux) c’est plus douteux. Pour satisfaire plus que largement aux besoins des champs de courses, on fait naître selon les années de 11 000 à 13 000 chevaux de compétition potentiels, pour le trot attelé ou monté. Seulement 20 % de ces chevaux seront qualifiés, les autres finiront évidemment à la boucherie. Les éleveurs les inscrivent au chapitre pertes comptables, les larguent sans soins dans des prairies où ils bouffent ce qu’ils peuvent jusqu’à ce qu’un chevillard les achète pour quelques poignées de figues et les mettent dans le circuit boucherie. C’est comme ça. Il n’y a pas de sensiblerie dans le milieu des « amis de la race équine ». Le monde hippique est comme toute notre société où règne le tout-puissant dieu Profit. Les jockeys et les entraîneurs se prétendent des « hommes de cheval », les parieurs fantasment sur le pognon facile, les vétérinaires testent leurs drogues sur les canassons, les sociétés de pari et les éleveurs s’enrichissent, et n’oublions surtout pas l’État qui se gave taxes (de 60 à 80 % du total de sommes pariées qui tournent bon an mal an autour de 10 milliards d’euros !)… Tout cela sur le dos du cheval. Voilà la sordide réalité !
Ah ! Je crois que je vais me faire traiter de mangeur de cadavre, mais j’assume, sans complexe ni états d’âme. Avec une bouteille de Lirac rouge, le pied !
Photo : Moi
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