Jeux Olympiques de Paris : leurs Jeux, notre argent
Le 26 juillet 2024 s'ouvriront les Jeux Olympiques de Paris. Voilà un siècle qu'un tel évènement ne s'est pas produit en France. En effet, les derniers jeux olympiques d'été sur notre sol s'étaient tenus en 1924. Cela fait près de sept ans que notre pays a été choisi par le CIO pour accueillir ces XXXIIIe olympiades, Paris ayant été officiellement désignée comme ville hôte par le CIO lors de la séance du 13 septembre 2017. Dans un pays normal, une telle responsabilité est à la fois un honneur et un plaisir, le genre d'évènement qui ne se vit qu'une fois par siècle. C'est une joie pour la population d'y participer que ce soit en tant que spectateurs ou en tant que bénévoles. Mais vivons-nous encore dans un pays normal ?
Lors des Jeux Olympiques de Moscou, en 1980, malgré le boycott des États-Unis et de plusieurs de ses vassaux alliés occidentaux, ces Jeux avaient déclenché une grande ferveur populaire chez les Soviétiques qui se sont montrés exemplaires et dévoués pour rendre agréable le séjour soviétique tant aux athlètes qu'aux spectateurs venus les encourager et visiter l'URSS. Bien sûr, comme tous les Jeux Olympiques, qui sont des outils de soft-power, ceux-ci avaient été pour le régime brejnevien l'occasion de montrer une image positive et, faut-il le dire, un peu faussée de l'URSS. Les autorités avaient ainsi procédé à un nettoyage, dans tous les sens, de Moscou : des immeubles délabrés datant de l'ère stalinienne avaient été rapidement rénovés, les rues nettoyées et goudronnées, et l'on avait chassé de la ville pour toute la durée de la compétition les éléments dits "perturbateurs" (drogués, ivrognes, personnes condamnées) en leur assignant des mission de travail dans des provinces éloignées. Comme on le verra dans cet article, l'URSS n'a guère l'apanage de telles pratiques. Mais si faussés qu'aient été les jeux de Moscou, ils avaient été l'occasion de rendre le peuple soviétique fier et même d'adoucir quelque peu la réputation du pays dans le monde, notamment grâce à "Misha" la fameuse mascotte en forme d'ours en peluche qui avait même conquis les enfants Américains via la télévision, au point que le FBI s'en était inquiété…
Les Jeux de Paris semblent avoir pioché tous les vices de ceux de Moscou (artificialité, autoritarisme, propagande, argent dilapidé plus ou moins à bon escient) sans les vertus : rendre le peuple fier, montrer au monde la culture française, rassembler le pays, qui en aurait pourtant bien besoin. Au lieu de l'élément fédérateur qu'auraient pu être ces Jeux dans un France plus "archipélisée" que jamais (pour reprendre l'expression de Jérôme Fourquet), ils ont réussi à en faire un fête de la bourgeoisie pour la bourgeoisie, un spectacle où les élites et les bobos s'auto-congratulent, un bal grotesque où tout n'est que masque et où, surtout, 99% du peuple n'est pas convié. L'esprit Coubertin est bel et bien mort. Là où l'olympisme avait pour vocation de démocratiser le sport et de faire des jeux un évènement populaire, ces Jeux de Paris sont l'illustration de ce que l'Occident moderne a de pire : la propagande idéologique en faveur d'une prétendue "inclusion" que ses promoteurs mêmes ne respectent pas, l'hypocrisie bourgeoise qui la joue populo, la perversion du sport par l'argent.
Examinons en détails ce dernier point qui permet d'affirmer sans craindre l'exagération que ces J.O, sont, avant même leur début, les jeux de la honte – dans tous les sens du terme.
Encore en 2023, les documents budgétaires officiels estimaient le coût total de l'organisation de ces Jeux à 2,44 milliards d'euros, dont seulement 1,6 milliard d'argent public (1,3 milliard venant de l'État et 260 millions du budget de la ville de Paris), le reste étant mis à disposition par les sponsors, les partenaires et le secteur privé en général. En janvier 2024, Pierre Moscovici, ancien ministre de l'Économie et actuel président de la Cour des Comptes a affirmé lors d'une audition devant la Commission parlementaire des affaires culturelles que finalement le coût estimé était "entre 3 et 5 milliards d'argent public". Ce 12 juillet
Si les instances chargées de l'organisation semblent avoir la main leste avec l'argent du contribuable, d'autres semblent plutôt animés par la cupidité et veulent profiter de l'évènement pour s'enrichir de façon certes légale, mais moralement plus que questionnable. Ainsi, dès janvier 2024, le Figaro alertait sur le fait que les prix des hôtels parisiens commençaient à augmenter drastiquement, jusqu'à trois fois son prix de 2023 ; d'aucuns prévoyaient que ce nouveau prix pouvait encore doubler durant les JO, ce qui nous amènerait à des pris six à sept fois plus élevés que lors de l'été précédent. Des particuliers, souvent boomers, avaient également pensé saisir un filon en louant leurs appartements parisiens à des prix vertigineux, parfois dix fois plus chers que le tarif habituel. Pour eux, la sanction est déjà tombée : les réservations stagnent. "Cheh !", comme disent les jeunes.
Ce désamour inhabituel des touristes envers les J.O., se répercute aussi sur les hôtels et même le nombre de billets pour les épreuves sportives. En effet, malgré l'annonce fanfaronne de la presse sur le "record olympique de la vente des billets", dont le nombre aurait atteint 8,6 millions d'après les chiffres officiels annoncés de façon triomphale – et toute soviétique – par le comité d'organisation, il semble que le chiffre réel soit bien en-deça, comme en témoigne la prise de parole de l'ex-rugbyman Pierre Rabedan face au Conseil de Paris, durant laquelle il dénonçait le fait que les ventes de billets stagnent… ce qu'il imputait aux critiques de l'opposition de droite. Peut-être faudrait-il que les tenants du narratif des "Jeux les plus extraordinaires de l'histoire" accordent leurs violons, au moins avant leurs prises de paroles publiques. Ou ce sont les Jeux Olympiques les plus fréquentés de l'Histoire intergalactique – trous noirs compris – ou c'est le désintérêt qui règne tant pour le public français qu'étranger. Mais les deux théories, antinomiques l'une de l'autre, ne peuvent être vraies à la fois. À moins que l'État ne brade à ses frais les billets aux "jeunes" franciliens – comme cela nous a été rapporté par certaines sources proches du dossier – à la fois pour gonfler le nombre de spectateurs et pour maintenir la paix sociale dans les quartiers dits "sensibles".
Quoi qu'il en soit, ce sont leurs Jeux, mais c'est avec notre argent qu'est financée cette fête de l'entre-soi où 99% des Français ne sont pas conviés et qu'elle n'intéresse guère.
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